Vu la requête, enregistrée le 26 août 2005, présentée pour M. et Mme Scott X demeurant ..., par la SCP d'avocats Lefebvre Pelletier ; M. et Mme X demandent à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 02-4065/3, en date du 9 juin 2005, par lequel le Tribunal administratif de Melun, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur de la somme de 16 066,75 euros sur les conclusions de la requête tendant à la réduction de la base imposable de l'année 1993, n'a que partiellement fait droit à leur demande tendant à obtenir la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1993, 1994 et 1995 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;
3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 juin 2007 :
- le rapport de M. Pujalte, rapporteur,
- les observations de Me Drouin, pour M. et Mme X,
- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. et Mme X ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 1993, 1994 et 1995 à l'issue duquel plusieurs redressements leur ont été notifiés sur la base de la procédure de taxation d'office ; qu'ils relèvent régulièrement appel du jugement, en date du 9 juin 2005, du Tribunal administratif de Melun qui n'a que partiellement fait droit à leur demande ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant qu'à la suite des dégrèvements auxquels il a été procédé avant l'introduction de la requête en appel le litige se trouve désormais limité aux quantum de 5 065,42 euros au titre de l'année 1993, 140 009,64 euros au titre de l'année 1994 et 27 077,23 euros au titre de l'année 1995 ;
Sur l'année 1993 :
Considérant que si les requérants contestent la base imposable des revenus fonciers qui a été retenue par l'administration au titre de la location d'un appartement situé ... ils n'apportent, à l'appui de leur demande de déduction de certains frais et charges, aucun justificatif de nature à en établir le bien-fondé ; que, par suite, alors que la charge de la preuve leur incombe, ce moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur l'année 1994 :
Sur la détermination du domicile fiscal des requérants :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 4 B du code général des impôts : « Sont considérés comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a) Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b) Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c) Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques. » ; que la satisfaction de l'un de ces critères alternatifs suffit à regarder le contribuable comme domicilié fiscalement en France et qu'aux termes, d'autre part, de l'article 166 du même code : « Lorsqu'un contribuable précédemment domicilié à l'étranger transfère son domicile en France, les revenus dont l'imposition est entraînée par l'établissement du domicile en France ne sont comptés que du jour de cet établissement » ;
Considérant que les requérants soutiennent qu'ils résidaient initialement en Irlande et n'ont transféré leur foyer et domicile fiscal en France que le 1er juillet 1994 ; que, dès lors, ce n'est qu'à partir de cette dernière date qu'ils sont imposables en France ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les requérants produisent, à l'appui de leur affirmation, un certain nombre de documents cohérents et probants, qui ne sont pas utilement contredits par l'argumentation soutenue par l'administration, de nature à établir qu'ils ont effectivement transféré leur domicile fiscal d'Irlande en France à partir du 1er juillet 1994 ; que, par voie de conséquence, les salaires ou traitements qu'ils ont perçus ne sont imposables à l'impôt sur le revenu en France qu'à compter du 1er juillet 1994 ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 1649 quater A du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : « Les personnes physiques qui transfèrent vers ou en provenance de l'étranger des sommes, titres ou valeurs, sans l'intermédiaire d'un organisme soumis aux dispositions du titre 1er du livre V du code monétaire et financier, ou d'un organisme cité à l'article L. 518-1 dudit code, doivent en faire la déclaration dans des conditions fixées par décret. Une déclaration est établie pour chaque transfert à l'exclusion des transferts dont le montant est inférieur à 50 000 F. Les sommes, titres ou valeurs transférés vers l'étranger ou en provenance de l'étranger constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables lorsque le contribuable n'a pas rempli les obligations prévues aux premier et deuxième alinéas » ; qu'aux termes de l'article 344 I bis de l'annexe III du même code : « I. La déclaration des sommes, titres ou valeurs, prévue au premier alinéa de l'article 1649 quater A du code général des impôts, est déposée(…) auprès de l'administration des douanes(…) ; qu'enfin aux termes de l'article 164 F novodecies A de l'annexe IV dudit code : « Pour l'application de l'article 344 I bis de l'annexe III au code général des impôts, doivent être considérées comme des sommes, titres ou valeurs : - les billets de banque (...),- les pièces de monnaie (...),- les chèques avec ou sans indication de bénéficiaire (...) » ; que l'ensemble de ces dispositions s'appliquent à toute personne physique qu'elle soit résidente en France, ou non résidente ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. X a fait l'objet d'un procès-verbal, établi le 3 juin 1994, par la direction régionale des douanes du Léman pour manquement aux obligations susmentionnées ; que, lors de son entrée en France, il était en possession d'une somme de 200 000 F en espèces, et de deux chèques d'une valeur respective de 650 000 F et 200 000 F ; qu'à défaut d'avoir procédé à la déclaration de ces valeurs celles-ci étaient présumées constituer des revenus imposables ; que, malgré les demandes réitérées de l'administration fiscale, qui était fondée à le faire, de justifier de la nature, de l'origine et du caractère non imposable desdites sommes, notamment parce que provenant de sources non françaises, les requérants n'ont pas été à même d'y répondre de façon probante ; que, par voie de conséquence, c'est à bon droit que l'administration les a regardées comme des revenus imposables conformément aux dispositions précitées et nonobstant le fait que les requérant n'étaient pas, alors, résidents fiscaux français ;
Considérant, en second lieu, qu'en application des dispositions de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, l'administration a procédé à la taxation d'office des crédits bancaires figurant sur les comptes bancaires français des requérants, dans la mesure où ils n'en établissaient pas l'origine ; qu'en se bornant à émettre de simples allégations selon lesquelles ces crédits correspondraient à des virements provenant de leurs comptes bancaires détenus en Suisse ou en Espagne, ou encore du change de devise irlandaise, les requérants ne rapportent pas la preuve qui leur incombe du caractère non imposables des sommes en litige ; que, par suite, l'administration était fondée à procéder à leur imposition dès lors qu'ils avaient leur domicile fiscal en France ; que, toutefois, il résulte de ce qui a été dit ci-avant sur la domiciliation fiscale des requérants, que ceux-si sont fondés à demander la décharge des revenus d'origine indéterminée crédités sur le compte Crédit lyonnais le 28 avril 1994 pour un montant de 43 645 F (6 653,64 euros) ;
Sur l'année 1995 :
Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales l'administration a, comme pour l'année antérieure et pour le même motif, procédé à la taxation d'office des crédits bancaires figurant sur le compte bancaire du CIC détenu par les requérants ; qu'en se bornant, à nouveau, à émettre de simples allégations selon lesquelles ces crédits correspondraient à des virements provenant de comptes bancaires suisses, ils ne rapportent pas davantage la preuve qui leur incombe du caractère non imposable des sommes en litige ; que, par suite, l'administration était fondée à procéder à leur imposition ;
Sur la majoration pour mauvaise foi :
Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : « I. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts, ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 % s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales... » ;
Considérant que si les requérants soutiennent qu'ils n'avaient pas l'intention de commettre une fraude comme l'attesterait, à leurs dires, le montant peu élevé de l'amende douanière il est constant, d'une part, qu'ils ne pouvaient ignorer l'obligation de déclarer l'ensemble de leurs revenus et, d'autre part, qu'ils se sont abstenus de répondre aux demandes réitérées de production des comptes bancaires et de justifications formulées par l'administration ; que le caractère délibéré et répétitif des manquements relevés justifie l'application des pénalités pour mauvaise foi ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer aux requérants la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun n'a pas fixé au 1er juillet 1994 la date du transfert de leur domicile fiscal en France ;
D E C I D E :
Article 1er : Le domicile fiscal des époux X est fixé en France à dater du 1er juillet 1994.
Article 2 : M. et Mme X sont déchargés de l'impôt sur le revenu correspondant au montant des traitements ou salaires perçus du 1er janvier 1994 au 30 juin 1994, ainsi que de la somme de 43 645 F (6 653,64 euros) imposée en tant que revenu d'origine indéterminée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X est rejeté.
Article 4 : Le jugement n° 02-4065/3 du Tribunal administratif de Melun, du 9 juin 2005, est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
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N° 05PA03556