La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/06/2007 | FRANCE | N°06PA01311

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites à la frontière, 22 juin 2007, 06PA01311


Vu la requête, enregistrée le 10 avril 2006, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0417477/8 du 28 décembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 26 juillet 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. X et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Paris ;

…………………………………

………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droit...

Vu la requête, enregistrée le 10 avril 2006, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0417477/8 du 28 décembre 2005 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 26 juillet 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. X et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Paris ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du 31 janvier 2007 par laquelle le président de la cour a désigné

M. Marino, magistrat, pour statuer notamment sur les appels dirigés contre les décisions juridictionnelles rendues en application de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir au cours de l'audience publique du 8 juin 2007, présenté son rapport et entendu :

- les conclusions de M. Coiffet , commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : « Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité malienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 13 mai 2004, de la décision du 7 mai 2004 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. ;

Considérant que M. X, entré en France le 14 décembre 1999 à l'âge de vingt-trois ans sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa Schengen, a sollicité le 28 août 2003 son admission au séjour en qualité d'étranger malade ; que le médecin chef de la préfecture de police a estimé le 3 octobre 2003 que si son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine ;

Considérant que, pour annuler l'arrêté du 28 juillet 2003 du PREFET DE POLICE, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a estimé que l'état de santé de M. X, atteint d'une schizophrénie paranoïde, nécessitait un traitement à base de neuroleptiques et d'une réhabilitation psychosociale pour laquelle la présence de sa famille était nécessaire et que ce traitement ne pouvait lui être prodigué dans son pays d'origine ;

Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il existe des structures de soins adaptés aux troubles de M. X dans son pays d'origine ; que si M. X fait valoir que les neuroleptiques qui lui sont prescrits ne sont pas commercialisés au Mali, il n'établit pas qu'il ne pourrait pas y disposer d'une molécule équivalente ; que l'intéressé qui ne réside pas avec les membres de sa famille en France, a indiqué avoir un fils au Mali et n'établit pas qu'il n'aurait plus d'autre famille au Mali qui pourrait le soutenir dans sa thérapie ; que, dans ces conditions, c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a jugé que la décision du 7 mai 2004 par laquelle le PREFET DE POLICE a refusé de délivrer un titre de séjour à M. X sur le fondement des dispositions précitées de l'article 12 bis 7 alinéa 11 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 alors applicable était illégale et ne pouvait pas servir de fondement à l'arrêté attaqué ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Paris ;

Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 7-5° introduit dans le décret du 30 juin 1946 par le décret du 5 mai 1999 : Pour l'application du 11° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 précitée, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu de l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé (…). Cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'intégration, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé ; que l'arrêté du 8 juillet 1999 pris pour l'application de ces dispositions impose au médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales d'émettre un avis précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays, quelle est la durée prévisible du traitement, et indiquant si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers le pays de renvoi ;

Considérant, d'une part, que le secret médical interdit au médecin inspecteur de la santé publique de révéler des informations sur la pathologie de l'intéressé et la nature de ses traitements médicaux, fût-ce en portant une appréciation sur l'état du système de soins dans le pays d'origine ; que, par suite, l'avis dudit médecin est suffisamment motivé par l'indication que si l'état de santé du demandeur nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ce dernier peut néanmoins bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, d'autre part, que, si M. X soutient que l'avis du médecin inspecteur de santé publique ne comportait pas d'indication sur la possibilité pour lui de voyager sans risque vers son pays, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de l'intéressé pouvait susciter des interrogations sur sa capacité à supporter ce voyage ;

Considérant en second lieu que, si M. X fait valoir que sa mère, son frère et sa soeur vivent régulièrement en France, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, né en 1976, célibataire, est entré en France le 14 décembre 1999 après avoir vécu au Mali jusqu'à l'âge de 23 ans et qu'il est le père d'un enfant vivant toujours au Mali ; que, dans ces conditions il n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour du 7 mai 2004 aurait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article 12 bis 7° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, par ailleurs, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions de séjour de M. X, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet de police en date du 26 juillet 2004 n'a pas porté au droit de celui-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance précitée du 2 novembre 1945 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 26 juillet 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ; que les conclusions incidentes aux fins d'injonction et de condamnation de l'Etat à lui verser des frais irrépétibles, présentées par M. X, doivent être rejetées par voie de conséquence ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 28 décembre 2005 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande de M. X présentée devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.

2

N° 06PA01311


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 06PA01311
Date de la décision : 22/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Yves MARINO
Rapporteur public ?: M. COIFFET
Avocat(s) : ROCHICCIOLI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2007-06-22;06pa01311 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award