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22/12/2006 | FRANCE | N°04PA01299

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre - formation b, 22 décembre 2006, 04PA01299


Vu la requête, enregistrée le 9 avril 2004, présentée pour la SNC SAE IMMOBILIER, dont le siège est 143 avenue de Verdun à Issy les Moulineaux (92442), par Me Laurent ; la SNC SAE IMMOBILIER demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9802078 du 11 février 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1995 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ; >
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article ...

Vu la requête, enregistrée le 9 avril 2004, présentée pour la SNC SAE IMMOBILIER, dont le siège est 143 avenue de Verdun à Issy les Moulineaux (92442), par Me Laurent ; la SNC SAE IMMOBILIER demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9802078 du 11 février 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1995 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la 6ème directive CEE 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2006 :

- le rapport de M. Francfort, rapporteur,

- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que par un mémoire en réplique enregistré au Tribunal administratif de Paris le 22 janvier 2004 la SNC SAE IMMOBILIER a soulevé deux moyens qu'elle n'avait pas encore développés à l'appui de ses conclusions en décharge à savoir, d'une part, le fait que la taxe sur la valeur ajoutée dont elle sollicitait la déduction, si elle était facturée par des tiers, était afférente à des dépenses engagées pour les besoins d'opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée et, d'autre part, que les produits financiers perçus par l'entreprise étaient hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; que ce mémoire, bien que parvenu avant la clôture de l'instruction, n'a pas été visé et que le Tribunal administratif de Paris s'est abstenu de répondre aux moyens qu'il comportait ; que compte tenu de cette omission à statuer le jugement contesté doit être annulé ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SNC SAE IMMOBILIER en première instance ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que les redressements contestés par la SNC SAE IMMOBILIER sont suffisamment motivés par le rappel des principes gouvernant le prorata de déduction et leur application aux biens acquis par la requérante, lesquels ne sont pas affectables exclusivement à une catégorie déterminée d'opérations ; que les irrégularités qui peuvent entacher le rejet des réclamations contentieuses par l'administration sont en tout état de cause sans influence sur le droit des contribuables à obtenir devant le juge de l'impôt la décharge ou la réduction des impôts qu'ils contestent ;

Sur le droit à déduction :

Considérant, en premier lieu, que les redressements litigieux ne portant que sur la taxe sur la valeur ajoutée déductible afférent à des services et à des biens ne constituant pas des immobilisations, la SNC SAE IMMOBILIER ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article 215 de l'annexe II au code général des impôts, lesquelles ne concernent que les biens constituant des immobilisations ;

Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que les biens et services dont l'administration a refusé la déduction intégrale à la taxe sur la valeur ajoutée auraient concouru à la réalisation, par les filiales de la société SAE IMMOBILIER, d'opérations soumises à taxe sur la valeur ajoutée est sans incidence sur le montant de la taxe sur la valeur ajoutée due par la société requérante ; que si la société SAE IMMOBILIER allègue que l'administration aurait, par le redressement contesté, « introduit une notion de groupe en matière de taxe sur la valeur ajoutée en méconnaissance des textes légaux » , elle n'a assorti cette affirmation d'aucune précision permettant au juge d'en apprécier la portée ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 213 du même code « Lorsqu'un assujetti a des secteurs d'activités qui ne sont pas soumis à des dispositions identiques au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, ces secteurs font l'objet de comptes distincts pour l'application du droit à déduction (…) Le montant de la taxe déductible au titre des biens communs aux différents secteurs est déterminé par application du rapport prévu à l'article 212 » ; qu'aux termes de l'article 212 du même code, dans sa rédaction alors applicable : « 1. Les redevables qui, dans le cadre de leurs activités situées dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, ne réalisent pas exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction, sont autorisés à déduire une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les biens constituant des immobilisations utilisées pour effectuer ces activités. Cette fraction est égale au montant de la taxe déductible obtenu, après application, le cas échéant, des dispositions de l'article 207 bis, multiplié par le rapport existant entre : a) Au numérateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations ouvrant droit à déduction, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ; b) Au dénominateur, le montant total annuel du chiffre d'affaires, taxe sur la valeur ajoutée exclue, afférent aux opérations figurant au numérateur ainsi qu'aux opérations qui n'ouvrent pas droit à déduction, et de l'ensemble des subventions, y compris celles qui ne sont pas directement liées au prix de ces opérations » ;

Considérant, d'une part, que la SNC SAE IMMOBILIER, qui exerce une activité de promotion immobilière, a perçu au cours de la période contrôlée des recettes provenant à la fois de son activité de promotion, de la vente d'immeubles qu'elle a fait construire directement ainsi que de terrains aménagés ou non, de loyers afférents à des immeubles loués assujettis ou non à la taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que de produits financiers résultant de sommes avancées aux sociétés civiles et immobilières dans lesquelles elle a des participations, enfin de quotes-parts de bénéfices desdites sociétés ; que si la société a ainsi réalisé des opérations qui ne sont pas toutes soumises à des dispositions identiques au regard de la taxe sur la valeur ajoutée, il n'est pas contesté d'une part que la SNC SAE IMMOBILIER n'a procédé à aucune sectorisation de ses activités et d'autre part que les opérations de vérification n'ont pas permis d'affecter les biens et services utilisés par la requérante, soit à la réalisation d'opérations ouvrant droit à déduction, soit à la réalisation d'opérations n'ouvrant pas droit à déduction ; que par suite les biens et services acquis par la SNC SAE IMMOBILIER au cours de la période doivent être regardés, au sens des dispositions de l'article 213 de l'annexe II au code général des impôts, comme des biens communs, susceptibles d'ouvrir droit à déduction dans les seules conditions prévues par l'article 212 précité ;

Considérant, d'autre part, que la SNC SAE IMMOBILIER invoque la doctrine 3-D-1722 du 2 novembre 1996, selon laquelle « La constitution de secteurs distincts est de droit. Elle s'impose aussi bien à l'administration qu'aux assujettis, soit lorsque la situation au regard de chaque activité exercée par un assujetti conduit à appliquer cette règle, soit lorsque les textes législatifs ou réglementaires prévoient sa mise en oeuvre » ; qu'ainsi qu'il a été dit, la situation de la requérante au regard de chaque activité n'ayant pu conduire à distinguer des biens affectés spécifiquement à chacune des activités exercées, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que cette instruction aurait été méconnue ;

Considérant, enfin, que la SNC SAE IMMOBILIER invoque divers arrêts de la Cour de justice des communautés européennes ainsi que les conclusions que l'administration en a tirées dans l'instruction du 15 octobre 2001 publiée au BOI 3-D-4-01 du 23 octobre suivant ; que toutefois les principes correspondants sont relatifs au droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les dépenses exposées par les entreprises assujetties au titre d'opérations en capital ; que de telles opérations étant sans rapport avec les motifs à l'origine du redressement contesté, la SNC SAE IMMOBILIER n'est en tout état de cause pas fondée à se prévaloir de l'instruction qu'elle invoque ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, par une décision exclusive de toute sanction, l'administration pouvait à bon droit déterminer la fraction de taxe sur la valeur ajoutée déductible par la société requérante en application de la règle du prorata prévue à l'article 212 de l'annexe II au code général des impôts et rendue applicable aux biens ne constituant pas des immobilisations par l'article 219 du même code ;

Sur le calcul du prorata :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 214 de l'annexe II au code général des impôts : « Le rapport prévu à l'article 212 est déterminé provisoirement en fonction du chiffre d'affaires réalisé l'année précédente (…) Le montant des taxes déductibles est définitivement arrêté avant le 25 avril de l'année suivante » ; que la SNC SAE IMMOBILIER ne peut utilement se fonder sur ces dernières dispositions pour soutenir que le rappel relatif à l'année 1994 devrait être déterminé par référence au prorata provisoire afférent à l'année 1993, dès lors qu'elle n'a pas établi de prorata provisoire au titre de ce dernier exercice ;

Considérant en second lieu, que la SNC SAE IMMOBILIER soutient que la part de son chiffre d'affaires liée au produit des avances consenties à ses filiales devrait être exclu du calcul du prorata visé à l'article 212 précité ;

Considérant, d'une part, que la SNC SAE IMMOBILIER soutient que les activités financières dont il s'agit ne rentrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; que toutefois il ressort de l'instruction que les prêts consentis à ses filiales par la société requérante correspondent à une pratique permanente poursuivie dans un objectif de stricte rentabilisation des capitaux investis ; que dès lors les revenus qui en ont résulté doivent être regardés comme acquis dans un but commercial, par l'exercice d'une activité économique soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 212.2 de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : « Par dérogation aux dispositions du 1, il est fait abstraction, pour le calcul du pourcentage de déduction, du montant du chiffre d'affaires afférent (…) b) Au produit des opérations immobilières et financières exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée et présentant un caractère accessoire par rapport à l'activité principale de l'entreprise, à la condition que ce produit représente au total 5 % au plus du montant du chiffre d'affaires total, toutes taxes comprises, du redevable » ; que la SNC SAE IMMOBILIER soutient qu'en raison de l'incompatibilité de ces dispositions, qui lient le caractère accessoire de l'activité financière à une notion de pourcentage du chiffre d'affaires, avec l'article 19 paragraphe 1 de la directive communautaire susvisée du 17 mai 1977, elle est recevable à se prévaloir directement des dispositions communautaires pour solliciter qu'il soit fait abstraction du chiffre d'affaires afférent à son activité financière ; que toutefois si la SNC SAE IMMOBILIER soutient que les opérations financières qu'elle a réalisées auraient revêtu un caractère accessoire, en tant qu'elles n'auraient impliqué qu'une utilisation très limitée de biens et services pour lesquels la taxe sur la valeur ajoutée est due, elle n'en justifie nullement alors que comme il a été dit ci-avant, cette activité présente un caractère permanent et qu'elle est le prolongement nécessaire de l'activité taxable de marchand de biens ; que par suite elle n'est pas fondée à demander l'exclusion des recettes correspondantes du calcul de la taxe sur la valeur ajoutée déductible ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SNC SAE IMMOBILIER n'est pas fondée à obtenir la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie ;

Sur les conclusions de la SNC SAE IMMOBILIER tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamné à payer à la SNC SAE IMMOBILIER une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 11 février 2004 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande et le surplus de la requête de la SNC SAE IMMOBILIER sont rejetés.

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N° 05PA00938

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N° 04PA01299

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N° 02PA01649

Société du LOUVRE


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 04PA01299
Date de la décision : 22/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés SOUMET
Rapporteur ?: M. Jérome FRANCFORT
Rapporteur public ?: M. ADROT
Avocat(s) : BONTOUX ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-12-22;04pa01299 ?
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