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04/12/2006 | FRANCE | N°05PA04472

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre - formation b, 04 décembre 2006, 05PA04472


Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE enregistré le 18 novembre 2005 ; le ministre demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 982747 du 8 juillet 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a accordé à M. et Mme X la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels ils avaient été assujettis au titre des années 1993 à 1995 et des pénalités y afférentes ;

2°) de rétablir M. et Mme X au rôle de l'impôt sur le revenu à raison de l'intégralité des droits et pénalités qui leur ont été assignés au titre

desdites années ;

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Vu les autres pièces du do...

Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE enregistré le 18 novembre 2005 ; le ministre demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 982747 du 8 juillet 2005 par lequel le Tribunal administratif de Paris a accordé à M. et Mme X la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels ils avaient été assujettis au titre des années 1993 à 1995 et des pénalités y afférentes ;

2°) de rétablir M. et Mme X au rôle de l'impôt sur le revenu à raison de l'intégralité des droits et pénalités qui leur ont été assignés au titre desdites années ;

…………………………………………………………………………………………………..

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2006 :

- le rapport de M. Francfort, rapporteur,

- les observations de Me Biaggini, pour M. X et Mme Y,

- les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;

et après avoir pris connaissance de la note en délibéré présentée le 23 novembre 2006 pour M. X et Mme Y ;

Considérant que dans le cadre d'une vérification de comptabilité de la société Altran Technologies, la Direction des vérifications nationales et Internationales a pris connaissance d'un protocole par lequel M. X et Mme Y convenaient de céder à la société Altran technologies les titres qu'ils détenaient dans la société Altior ; qu'il n'est pas contesté que cette convention prévoyait un versement différé du prix de vente, avec un règlement étalé notamment sur les années 1993 à 1995 ; que constatant, lors d'un contrôle sur pièces, que les sommes correspondantes n'avaient fait l'objet d'aucune déclaration à l'impôt sur le revenu, le service a notifié le 23 décembre 1996 à M. X et Mme Y un redressement, en imposant lesdites sommes dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Sur l'absence de communication de l'origine et de la teneur des renseignements à l'origine du redressement :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation » ; qu'il résulte de ces dispositions que l'administration est tenue d'indiquer au contribuable l'origine et la teneur de tout document émanant de tiers au vu duquel le redressement aurait été décidé ; que sur la demande du contribuable, elle est tenue de lui communiquer copie dudit document ;

Considérant qu'il est constant qu'à la suite de l'envoi de la notification de redressement du 23 décembre 1996, M. X et Mme Y, par lettre datée du 8 juillet 1997, ont demandé la copie des courriers échangés entre la société Altran et la société Altior ainsi que celle de la convention de cession des titres visée dans la notification ; que l'administration a opposé le 8 août 1997 un refus à cette demande ;

Considérant, cependant, que l'administration indique sans être sérieusement contredite, n'avoir pas été autorisée, lors de la vérification de comptabilité de la société Altran Technologies, à effectuer une photocopie de la convention dont les éléments ont servi de fondement au redressement litigieux ; qu'alors même que le vérificateur aurait pris note de la teneur des principales clauses de la convention, il ne ressort pas des pièces du dossier que la société vérifiée aurait remis à l'administration des documents, de quelque nature que ce soit, liés à ce redressement ; que par suite l'administration ne peut être regardée comme ayant été en possession d'un document contenant le renseignement recueilli et susceptible d'être mis à la disposition de M. X et Mme Y ;

Considérant, également, que si l'administration par ce refus, n'a pas expressément indiqué les modalités de recueil du renseignement à l'origine du redressement, à savoir les constatations effectuées dans le cadre de la vérification de la comptabilité de la société Altran, il résulte de l'instruction que M. X et Mme Y, auteurs de la cession de leurs propres actions dans la société qu'ils dirigeaient, avaient nécessairement connaissance de la teneur et des modalités de la transaction en litige ; qu'il résulte au surplus de leur réponse du 4 février 1997 à la notification de redressement qu'ils disposaient dès cette date des éléments d'information les mettant à même de contester le redressement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X et Mme Y, bien que l'administration n'ait pas donné suite à leur demande de communication des documents ayant permis de procéder au redressement litigieux, ne peuvent être regardés comme ayant été, de ce fait, privés de la possibilité de discuter utilement ce redressement ; que par suite l'irrégularité commise par l'administration, pour regrettable qu'elle fût, n'ayant pas substantiellement vicié la procédure d'imposition, le Tribunal administratif de Paris ne pouvait, sans commettre d'erreur de droit, décharger pour ce motif M. X et Mme Y des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu qui leur avaient été notifiées ;

Considérant qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par M. et Mme X ;

Sur la motivation du redressement :

Considérant qu'aux termes de l'article 92-1 du code général des impôts « Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une activité non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices (…) de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus » ; qu'afin de motiver le redressement constitué par l'imposition du solde du prix de vente des actions de la société Altior dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, le service, après avoir relevé que la convention liait le paiement du solde du prix de la vente d'une part à la réalisation d'objectifs par la société Altior et d'autre part au maintien de la présence des vendeurs dans l'entreprise dont les parts étaient cédées, a indiqué que le profit retiré par un contribuable de la revente d'une partie des actions d'une société, qui trouve son origine dans l'activité déployée par l'intéressé, devait être regardé comme un bénéfice provenant d'une occupation ou d'une activité lucrative, et assimilé aux bénéfices non commerciaux en application des dispositions de l'article 92-1 du code général des impôts ; que l'administration a ainsi suffisamment motivé l'application aux versements perçus du régime prévu par les dispositions précitées ; que les demandeurs ne sont par suite pas fondés à soutenir que le redressement litigieux aurait été insuffisamment motivé au sens des dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

Sur la compétence de l'auteur du redressement :

Considérant que si les demandeurs ont soutenu en première instance l'incompétence des agents vérificateurs, l'article 122 de la loi de finances pour 1997 valide les contrôles effectués par la Direction des vérifications nationales et internationales (DVNI) avant l'entrée en vigueur des règles de compétence matérielle et territoriale posées par le décret n° 96-804 du 12 septembre 1996 ; qu'en application de ce texte, codifié sous l'article 350 terdecies de l'annexe III au code général des impôts, et de l'arrêté d'application du 12 septembre 1996, les agents de la DVNI étaient compétents à l'égard des personnes physiques ou morales et des groupements liés aux personnes ou groupements qui relevaient de leur compétence ; que tel était le cas, contrairement à ce qu'ils soutiennent, de M. X et de Mme Y, compte tenu des conditions de leurs relations avec la société Altran Technologies postérieurement à la cession de leur participation dans la société Altior ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant que M. X et Mme Y ne contestent pas qu'ils ont cédé à la société Altran Technologies leur participation dans la société Altior, aux termes d'une convention qui prévoyait des paiements échelonnés de 1990 à 1996, paiements conditionnés par les résultats de cette cession ; que si M. X et Mme Y contestent que les clauses de la convention liaient le paiement du solde du prix de vente à la réalisation d'objectifs fixés à la société cédée, les intéressés se sont abstenus de produire ladite convention à l'appui de leurs dires sans pour autant en contester sérieusement l'existence ; que, par suite, et alors même que M. X et Mme Y auraient eu le statut de salariés d'Altior après la vente de leur participation, les revenus qu'ils ont tirés de cette cession et qu'ils se sont abstenus de déclarer doivent être regardés comme la contrepartie directe du maintien de leur présence au sein de l'entreprise cédée et de la réalisation des objectifs fixés dans le cadre de la convention de cession ; que ces revenus pouvaient dès lors être taxés en tant que bénéfices non commerciaux sur le fondement des dispositions précitées de l'article 92-1 du code général des impôts ;

Sur la motivation des pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : «Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. Toutefois, lorsque la pénalité mise en recouvrement ne constitue pas l'accessoire d'une imposition ou lorsqu'elle sanctionne une infraction dont la qualification est fondée sur l'appréciation du comportement du contribuable, la motivation est portée à sa connaissance au moins trente jours avant la notification du titre exécutoire ou de son extrait. Durant ce délai, le contribuable peut présenter ses observations. » ; qu'aux termes de l'article 3 de la loi susvisée du 11 juillet 1979 « La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. » ;

Considérant que M. X et Mme Y font grief à l'administration fiscale de s'être bornée, dans la notification de redressement du 23 décembre 1996, à motiver les pénalités exclusives de bonne foi dont ils faisaient l'objet par l'importance des sommes reçues ; que toutefois dans sa « réponse aux observations du contribuable » du 30 mai 1997, l'administration a indiqué à M. X et Mme Y, qui se prévalaient du régime des plus-value de l'article 160 du code général des impôts, qu'ils auraient dû alors imposer la totalité du prix de cession l'année du transfert des titres, et que dès lors qu'ils s'étaient sciemment abstenus de déclarer les sommes litigieuses dans leurs revenus imposables, les pénalités de mauvaise foi étaient maintenues ; qu'ainsi l'administration, qui n'a pas établi la mauvaise foi par rapport à des faits prescrits mais par rapport à l'incohérence de l'argumentation des contribuables, doit être regardée comme ayant régulièrement porté à la connaissance de ces derniers les considérations de droit et de fait justifiant l'application des pénalités retenues ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a déchargé M. X et Mme Y des impositions mises à leur charge ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X et à Mme Y une somme au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D EC I D E :

Article 1er : Le jugement n° 982747 du 8 juillet 2005 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : M. X et Mme Y sont rétablis au rôle de l'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre des années 1993 à 1995.

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N° 05PA00938

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N° 05PA04472

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N° 02PA01649

Société du LOUVRE


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 05PA04472
Date de la décision : 04/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés SOUMET
Rapporteur ?: M. Jérome FRANCFORT
Rapporteur public ?: M. ADROT
Avocat(s) : BIAGINI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-12-04;05pa04472 ?
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