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09/10/2006 | FRANCE | N°05PA04149

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites a la frontiere, 09 octobre 2006, 05PA04149


Vu la requête, enregistrée le 17 octobre 2005, présentée par le PREFET DE POLICE, lequel demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-13329 du 14 septembre 2005, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 5 août 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Hassane X, sur le fondement des dispositions de l'article L. 511-1-3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et, d'autre part, enjoint au PREFET DE POLICE de réexaminer la situation de M. X dans u

n délai d'un mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de rejeter...

Vu la requête, enregistrée le 17 octobre 2005, présentée par le PREFET DE POLICE, lequel demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 05-13329 du 14 septembre 2005, par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé son arrêté du 5 août 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. Hassane X, sur le fondement des dispositions de l'article L. 511-1-3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et, d'autre part, enjoint au PREFET DE POLICE de réexaminer la situation de M. X dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. X devant le Tribunal administratif de Paris ;

…………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, ensemble le décret du 3 mai 1974 portant publication de la convention ;

Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951, relative aux réfugiés et le protocole signé à New-York, le 31 janvier 1967 ;

Vu la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985, signée à Schengen le 19 juin 1990, ensemble le décret n° 95-304 du 21 mars 1995 portant publication de cette convention ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et en tant que de besoin, l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, modifiée, relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ensemble le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, relatif à son application ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946, modifié, réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu l'arrêté interministériel du 10 avril 1984 relatif aux conditions d'entrée des étrangers sur le territoire métropolitain et dans les départements d'outre-mer français ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision en date du 1er septembre 2006, par laquelle le président de la cour a délégué les pouvoirs qui lui sont attribués par l'article L. 512-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à M. Bernardin ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir, au cours de l'audience publique du 14 septembre 2006, présenté son rapport et entendu :

- les observations de Me Rochiccioli, pour M. X ;

- et les conclusions de M. Coiffet, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) » ; qu'il est constant que M. X, de nationalité marocaine, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 19 mars 2005, de la décision du 16 mars 2005, par laquelle le PREFET DE POLICE lui a refusé un titre de séjour et l'a invité à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée qui permet au préfet de décider la reconduite à la frontière d'un étranger en situation irrégulière ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Ne peuvent faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre (…) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. (…) » ; qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance susvisée du 2 novembre 1945, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mai 1998, qui ont été repris à l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (…) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. (…) » ; qu'aux termes de l'article 7-5 introduit dans le décret du 30 juin 1946 par le décret du 5 mai 1999 : « Pour l'application du 11° de l'article 12 bis de l'ordonnance, le préfet délivre la carte de séjour temporaire, au vu de l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé. Cet avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'intégration, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur (…) » ; qu'enfin, l'arrêté du 8 juillet 1999, pris pour l'application de cette disposition, prévoit que l'avis du médecin-inspecteur précise si une prise en charge médicale de l'étranger est nécessaire, si son défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour l'état de santé, si le traitement peut être assuré dans le pays d'origine et indique enfin quelle est la durée prévisible du traitement et si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers le pays de renvoi ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de certificats médicaux établis les 14 avril et 15 juin 2005, que M. X, de nationalité marocaine, présente depuis plusieurs années des troubles psychiatriques accompagnés de décompensations aiguës ayant justifié plusieurs hospitalisations, en particulier du 8 mai au 29 juillet 2005, et s'est vu, pour ce motif, délivrer le 15 octobre 2002 une carte de séjour valable jusqu'au 24 février 2003, date à laquelle elle a été renouvelée jusqu'au 24 février 2004 ; qu'il suit un traitement au long cours à base de neuroleptiques et de thymorégulateurs, et bénéficie d'une prise en charge psychothérapique, ainsi que de la présence à son côté de sa soeur qui constitue un élément important de stabilité ;

Considérant que pour refuser à Y, dans sa décision du 16 mars 2005, le renouvellement de son titre de séjour, le PREFET de POLICE s'est fondé sur l'avis émis le 1er décembre 2004 par le médecin-chef du service médical de la préfecture de police qui estimait que si l'état de santé du pétitionnaire nécessitait une prise en charge médicale, son séjour en France n'était plus justifié, dans la mesure où il pourrait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, toutefois, dans ledit avis du 1er décembre 2004, l'autorité médicale, qui précisait s'être prononcée sur la base du dossier de M. X, s'est bornée à affirmer que si l'état de santé de ce dernier nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, alors que l'intéressé pourrait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'il n'a assorti cet avis d'aucune précision quant au degré de gravité de l'état de santé de l'intéressé ou à la nature des traitements suivis par celui-ci alors même qu'il résultait des avis rendus les 12 septembre 2002 et 12 février 2003, que M. X ne pouvait avoir accès dans son pays d'origine à un traitement approprié ; qu'en outre, le médecin-chef n'indique pas, en méconnaissance de l'article 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers le pays de renvoi ; qu'ainsi le médecin-chef n'a pas fourni toutes les précisions qu'il lui incombait de donner, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'arrêté du 8 juillet 1999 ; que, par suite, l'avis étant incomplet, le PREFET DE POLICE n'a pu statuer au vu des informations qui lui étaient nécessaires sur la demande de titre de séjour temporaire dont il était saisi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 5 août 2005 décidant la reconduite à la frontière de M. X ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 codifiée sous l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens » ; que l'article 43 de la même loi autorise le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle à demander au juge de condamner, dans les mêmes conditions, la partie perdante « au paiement d'une somme au titre des frais qu'il a exposés » ; que l'article 37 de la même loi dispose que : « (...) l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner, dans les conditions prévues à l'article 75, la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à une somme au titre des frais que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Il peut, en cas de condamnation, renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre le recouvrement à son profit de la somme allouée par le juge » ; qu'il résulte de ces dispositions que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement à son profit de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

Considérant que Me Rochiccioli, avocat de Y, demande la condamnation de l'Etat à lui verser une somme correspondant aux frais exposés qu'elle aurait réclamés à son client si ce dernier n'avait bénéficié d'une aide juridictionnelle totale ; que, dans ces conditions, il y a lieu d'accueillir les conclusions de la requête tendant à la condamnation de l'Etat, sur le fondement de l'article 37 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à payer à Me Rochiccioli une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à Me Rochiccioli une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

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N° 05PA04149


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05PA04149
Date de la décision : 09/10/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. André-Guy BERNARDIN
Rapporteur public ?: M. COIFFET
Avocat(s) : ROCHICCIOLI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-10-09;05pa04149 ?
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