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05/07/2006 | FRANCE | N°04PA03229

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3eme chambre - formation a, 05 juillet 2006, 04PA03229


Vu, I, sous le n° 04PA3229, la requête enregistrée le 31 août 2004, présentée pour

M. et Mme X, demeurant ..., par la SCP Huglo Lepage et associés ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0307708/6 en date du 29 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris, d'une part, a rejeté la demande de Mme X tendant à l'indemnisation du préjudice financier qu'elle a subi du fait de l'arrêt de toute activité professionnelle et d'autre part, a alloué à Mme X une indemnité de 20 000 euros au titre de la réparation des troubles dans les con

ditions d'existence et une indemnité de 2 000 euros à M. X en réparation de so...

Vu, I, sous le n° 04PA3229, la requête enregistrée le 31 août 2004, présentée pour

M. et Mme X, demeurant ..., par la SCP Huglo Lepage et associés ; M. et Mme X demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0307708/6 en date du 29 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris, d'une part, a rejeté la demande de Mme X tendant à l'indemnisation du préjudice financier qu'elle a subi du fait de l'arrêt de toute activité professionnelle et d'autre part, a alloué à Mme X une indemnité de 20 000 euros au titre de la réparation des troubles dans les conditions d'existence et une indemnité de 2 000 euros à M. X en réparation de son préjudice moral ;

2°) de condamner l'Etablissement français du sang à verser à Mme X en réparation des préjudices subis, toutes causes confondues, la somme de 554 363, 25 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 11 décembre 2002, date du recours préalable ;

3°) de condamner l'Etablissement français du sang à verser à M. X en réparation de son préjudice moral la somme de 44 000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 11 décembre 2002 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etablissement français du sang la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu, II, sous le n° 04PA03267, la requête enregistrée le 2 septembre 2004, présentée pour l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG, dont le siège est ... par Me Houdart ; l'ETABLISSEMENT FRANCAIS DU SANG demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0307708/6 en date du 29 juin 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris a condamné à verser à Mme X la somme de 20 000 euros ;

2°) de procéder à une juste évaluation des préjudices résultant pour Mme X de sa contamination par le virus de l'hépatite C ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n°52-854 du 21 janvier 1952 modifiée relative aux établissements agréés en vue de la préparation des produits sanguins ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, notamment son article 102 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2006 :

- le rapport de Mme Pierart, rapporteur,

- les observations de Me Soummer, pour M. et Mme X, et celles de

Me Perinetti, pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG,

- et les conclusions de Mme Folscheid, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes enregistrées sous les numéros 04PA03229 et 04PA03267 sont dirigées contre le même jugement du Tribunal administratif de Paris du 29 juin 2004 ; qu'il y a donc lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;

Sur les préjudices de Mme X :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que Mme X, qui exerçait le métier de secrétaire de direction jusqu'en 1982 n'a pas repris son activité professionnelle après l'opération de colectomie totale qu'elle a subie le 27 juin 1982 ; que, si Mme X soutient que cette intervention n'est pas la cause directe de la cessation de son activité mais est imputable à une asthénie particulièrement invalidante et à une très grande fatigue, caractéristiques de l'hépatite C dont elle est atteinte, il ressort du rapport de l'expert désigné par ordonnance du président du Tribunal administratif de Paris du 24 mai 2000, que Mme X, qui a été examinée le 19 avril 2001, se plaint non seulement de fatigue mais de troubles digestifs ; que, si la fatigue peut être imputée, ainsi que le soutient la requérante, à sa contamination par le virus de

l'hépatite C, les troubles digestifs dont elle souffre se rapportent à sa pathologie colique qui nécessite depuis l'intervention chirurgicale de 1982 un suivi et un traitement régulier ; que l'expert, qui a constaté à l'examen un état général conservé, n'a observé, en outre, aucune évolution de l'hépatite chronique dont la contamination remonte à près de vingt ans ; que l'attestation du docteur Y, datée du 27 juillet 2004, selon laquelle Mme X aurait dû pouvoir, après l'opération du 20 mars 1984 pour rétablissement de la continuité à la suite de la colectomie, reprendre une vie normale, ne suffit pas à établir que la cessation de son activité professionnelle trouverait sa cause directe et exclusive dans la contamination par le virus de l'hépatite C ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges, par les motifs qu'ils ont retenu, ont rejeté la demande de Mme X tendant au versement d'une indemnité réparant un préjudice professionnel ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que Mme X, née le 13 octobre 1931, est porteuse du virus de l'hépatite C depuis 1982 ; qu'elle a subi une ponction biopsie hépatique en 1984 qui n'a pas été douloureuse ; que, l'expert relève un bon état général apparent de l'intéressée ; qu'elle présente toutefois une asthénie et un état légèrement dépressif qui s'accompagnent d'une grande anxiété et sont à l'origine d'un préjudice d'agrément certain ; que, si la requérante se prévaut de l'influence de cette contamination sur la qualité de sa vie familiale, sociale et personnelle et des inquiétudes légitimes qu'elle éprouve quant à l'évolution de son hépatite, il ressort du rapport d'expertise que Mme X, qui se plaint essentiellement de fatigue et de troubles digestifs, est également atteinte d'une maladie de Crohn nécessitant un traitement suivi ; qu'ainsi, compte tenu de ces circonstances, il sera fait une juste appréciation de l'ensemble des préjudices subis par Mme X, lesquels comprennent les troubles dans les conditions d'existence, y compris le préjudice d'agrément et les souffrances psychiques, en lui accordant la somme de 10 000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 décembre 2002 ; qu'il y a lieu, par suite, de réformer le jugement attaqué en ce sens et de rejeter les conclusions de Mme X tendant à la réévaluation de cette indemnité ;

Sur le préjudice de M. X :

Considérant que les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation du préjudice moral subi par M. X du fait de la contamination de son épouse par le virus de l'hépatite C en fixant à la somme de 2 000 euros l'indemnité qui doit lui être allouée à ce titre ;

Sur les droits de la caisse de Mutualité Sociale Agricole de l'Aisne :

Considérant que les premiers juges, qui ont condamné l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG à rembourser à la caisse de Mutualité Sociale Agricole de l'Aisne les frais qu'elle engagera à l'avenir dans l'intérêt de Mme X en lien direct et exclusif avec l'hépatite dont elle est atteinte, au fur et à mesure de ses débours dans la limite d'une somme de 49 980, 12 euros, ont rejeté la demande de la caisse tendant au remboursement de la pension d'invalidité qu'elle a servie à Mme X entre le 12 juin 1985 et le 31 octobre 1991 au motif que ladite pension n'était pas directement et exclusivement liée aux conséquences de la contamination de l'assurée par le virus de l'hépatite C ; que, si la caisse présente à nouveau cette demande en appel, elle se borne à produire un document établi par les médecins conseils de la caisse attestant que « les frais mentionnés et la pension d'invalidité sont en rapport avec la pathologie en cause » ; que cette seule attestation, eu égard aux termes peu précis dans lesquels elle est rédigée, alors que Mme X est atteinte d'une maladie de Crohn, diagnostiquée en 1982, et souffre d'une pathologie colique qui a entraîné plusieurs interventions chirurgicales depuis cette date (colectomie en 1982 et rétablissement de continuité en 1984), n'est pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par les premiers juges ; qu'il y a lieu en conséquence de rejeter, pour le même motif, les conclusions de la caisse de Mutualité Sociale Agricole de l'Aisne aux fins de remboursement des arrérages de rente servis à son assurée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant, d'une part, que ces dispositions font obstacle à ce que l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M et Mme X, d'une part, et à la caisse de Mutualité sociale agricole de l'Aisne, d'autre part, les sommes qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, d'autre part, en application de ces mêmes dispositions, de condamner la caisse de Mutualité sociale agricole de l'Aisne, à payer à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG une somme de 1 000 euros au titre des frais de même nature exposés par eux ; qu'enfin il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. et Mme X à payer à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG la somme qu'il demande au même titre ;

D É C I D E :

Article 1er : La somme de 20 000 euros que l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG a été condamné à verser à Mme X par le jugement du Tribunal administratif de Paris du 29 juin 2004 est ramenée à une somme de 10 000 euros.

Article 2 : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Paris du 29 juin 2004 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : La requête de M. et Mme X et les conclusions de la caisse de Mutualité Sociale Agricole de l'Aisne sont rejetées.

Article 4 : La caisse de Mutualité Sociale Agricole de l'Aisne versera à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG tendant à la condamnation de M. et Mme X à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

2

N° 04PA03229, 04PA03267


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3eme chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 04PA03229
Date de la décision : 05/07/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme CARTAL
Rapporteur ?: Mme Odile PIERART
Rapporteur public ?: Mme FOLSCHEID
Avocat(s) : SCP HUGLO LEPAGE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-07-05;04pa03229 ?
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