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23/05/2005 | FRANCE | N°01PA03945

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation b, 23 mai 2005, 01PA03945


Vu la requête, enregistrée le 23 novembre 2001, présentée pour M. Saïd X élisant domicile ..., par Me Sauzey ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9512207 et 9516960 en date du 4 septembre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Paris, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu à statuer à concurrence du dégrèvement prononcé par l'administration, a rejeté le surplus de ses demandes en décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1989, 1990, 1991 et 1992 ;

2°) de prononcer la d

écharge sollicitée ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 90 000 F, soi...

Vu la requête, enregistrée le 23 novembre 2001, présentée pour M. Saïd X élisant domicile ..., par Me Sauzey ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9512207 et 9516960 en date du 4 septembre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Paris, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu à statuer à concurrence du dégrèvement prononcé par l'administration, a rejeté le surplus de ses demandes en décharge des cotisations à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1989, 1990, 1991 et 1992 ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 90 000 F, soit 13 720,41 euros au titre des frais irrépétibles ;

..................................................................................................................

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance du 23 décembre 2004 portant clôture de l'instruction au 25 février 2005 ;

Vu le traité du 27 mars 1957 instituant la Communauté Européenne modifié ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son protocole additionnel ;

Vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques signé à New-York le 19 décembre 1966 et publié au Journal officiel du 1er février 1981 ;

Vu la Déclaration universelle des droits de l'homme ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mai 2005 :

- le rapport de M. Pailleret, rapporteur,

- les observations de Me Philip, pour M. X,

- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation... Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort de l'examen des notifications de redressement des 11 décembre 1992 et 19 août 1994 que celles-ci indiquaient la nature et le montant des rehaussements envisagés, leur fondement légal et les années d'imposition concernées ; qu'elles précisaient, en outre, qu'à défaut d'éléments de comparaison, en ce qui concerne les appartement sis à Paris 7ème et 15ème et la villa Andalys sise à Golfe Juan, l'administration avait appliqué à la valeur vénale ressortant de la déclaration de M. X à l'impôt sur la fortune un taux de rentabilité de 5% ; que, dans ces conditions, le contribuable a été mis en mesure de présenter utilement ses observations ; que ces notifications de redressement étaient ainsi conformes aux prescriptions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, pour l'application des dispositions de l'article L.57 du livre des procédures fiscales de considérer que, sauf stipulation contraire, le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable, personne physique ou morale, pour recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition et y répondre emporte élection de domicile auprès de ce mandataire ; que lorsqu'un tel mandat a été porté à la connaissance du service en charge de cette procédure, celui-ci est, en principe, tenu d'adresser au mandataire l'ensemble des actes de cette procédure ; qu'en particulier, le mandataire doit en principe être destinataire des plis par lesquels le service notifie au contribuable, dans les conditions visées à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, les redressements qu'il entend affecter aux bases de l'imposition du contribuable et les réponses qu'il formule aux observations présentées, le cas échéant, par l'intéressé sur ces redressements ; que, par suite, la notification de redressement du 19 août 1994 concernant les années 1991 et 1992, ainsi que la réponse aux observations du contribuable du 11 octobre 1993 concernant les années 1989 et 1990 ont été régulièrement adressées au mandataire de M. X qui résidait alors à Djibouti ; qu'ainsi ce dernier, qui ne saurait utilement se prévaloir du non respect par le service des formalités non substantielles prévues par l'article 4 de loi du 6 fructidor an II, n'est pas fondé à soutenir que l'administration a méconnu les dispositions de l'article L 57 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'après avoir rappelé, d'une part, qu'en vertu de l'article 1658 du code général des impôts, les impôts directs et les taxes y assimilées sont recouvrés en vertu de rôles rendus exécutoires par arrêté du préfet et que le représentant de l'Etat dans le département peut déléguer ses pouvoirs au directeur des services fiscaux et aux collaborateurs de celui-ci ayant au moins le grade de directeur divisionnaire et, d'autre part, qu'en vertu de l'article de l'article 1659 du même code, la date de mise en recouvrement des rôles est fixée par l'autorité compétente pour les homologuer en application de l'article 1658, d'accord avec le trésorier-payeur général et que cette date doit être indiquée sur le rôle ainsi que sur les avis d'imposition délivrés aux contribuables, M. X se borne à indiquer qu'il a demandé à l'administration de justifier de l'arrêté de délégation et de l'homologation des rôles d'imposition et à alléguer que le non respect de cette procédure entraîne la décharge des impositions litigieuses ; qu'il résulte des documents produits par le ministre, à l'appui de son mémoire en réplique, que le préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris a, par arrêté du 31 janvier 1989, régulièrement publié au recueil des actes administratifs n°5 en date du 20 février 1989 donné délégation de pouvoir au directeur des services généraux et de l'informatique de Paris à l'effet de rendre exécutoires les rôles d'impôts directs conformément aux dispositions précitées de l'article 1658 du code général des impôts ; que si la décision d'homologation des rôles n'a pas été produite au dossier, M. X, qui au demeurant ne le relève pas et n'allègue pas que les rôles des impositions contestées n'auraient pas été rendus exécutoires aux dates du 30 septembre 1994 en ce qui concerne les impositions établies au titre des années 1989 et 1990 et du 31 mars 1995 en ce qui concerne celles établies au titre des années 1991 et 1992, qui sont indiquées sur les avertissements comme ayant été celles de la mise en recouvrement, ne précise pas les conséquences qu'il conviendrait de tirer de ce défaut de production ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 164 C du code général des impôts : Les personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal en France mais qui y disposent d'une ou plusieurs habitations, à quelque titre que ce soit, directement ou sous le couvert d'un tiers, sont assujetties à l'impôt sur le revenu sur une base égale à trois fois la valeur locative réelle de cette ou de ces habitations à moins que les revenus de source française des intéressés ne soient supérieurs à cette base, auquel cas le montant de ces revenus sert de base à l'impôt.. ;

Considérant que M. X, qui résidait alors à Djibouti, a été imposé au titre des années 1989 à 1992, en application des dispositions précitées de l'article 164 C du code général des impôts, sur la base d'un revenu égal à trois fois la valeur locative des appartements dont il était propriétaire à Paris et d'une villa sise à Golfe Juan ; qu'il n'est pas contesté, dans le cadre de la présente instance, que M. X avait, au cours desdites années, la disposition de ces différents biens immobiliers ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de l'article 164 C du code général des impôts ; qu'il ne soutient pas, par ailleurs, avoir disposé de revenus de source française supérieurs à cette base ;

Considérant que pour contester les impositions qui lui ont été assignées sur cette base, M. X soutient, en premier lieu, que ces impositions portent atteinte au principe d'égalité, tel qu'il est garanti par les articles 1 et 7 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et par l'article 26 du pacte international relatif aux droits civiques et politiques et, notamment au principe d'égalité devant l'impôt ; que, toutefois, les dispositions de l'article 164 C du code général des impôts qui ne visent qu'à déterminer la base de l'impôt sur le revenu prévu à l'article 1er du code général des impôts, sont applicables à toutes les personnes n'ayant pas leur domicile fiscal en France mais y disposant d'une ou plusieurs habitations ; que ces dispositions, qui complètent, sans les contredire, celles de l'article 4 du code général des impôts, ne sont, en tout état de cause, génératrices d'aucune rupture d'égalité devant les charges publiques, au regard des stipulations de l'article 26 du pacte international relatif aux droits civils et politiques et des articles 1er et 7 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, dès lors qu'elles ne réservent pas un sort fiscal différent aux contribuables qui sont dans la même situation ;

Considérant que M. X soutient, en deuxième lieu, que les dispositions de l'article 164 C du code général des impôts sont incompatibles avec les articles 6 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi qu'avec l'article 1er de son premier protocole additionnel, en ce que les impositions qui lui sont réclamées chaque année sur cette base sont d'une importance telle qu'elles équivalent à une confiscation de ses biens prohibée par les stipulations précitées et revêtent un caractère discriminatoire ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle ; que cet article ne peut être utilement invoqué devant le juge de l'impôt, qui ne statue pas en matière pénale et ne tranche pas des contestations sur des droits et obligations à caractère civil ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lequel doit, en vertu de l'article 5 du même protocole, être regardé comme un article additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes et qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la convention doit être assurée sans distinction aucune fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, l'origine nationale ou sociale ou toute autre situation ; qu'ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, les impositions de M. X, au titre des années 1989 à 1992, ont été établies sur la base d'une valeur locative de ses biens immobiliers correspondant à 5 % de leur valeur vénale ; qu'eu égard au rapport existant entre les impositions ainsi établies et la valeur vénale de ses biens immobiliers, M. X, alors même qu'il serait également assujetti, comme toutes les autres personnes physiques disposant en France d'un patrimoine comparable qu'elles y aient ou non leur domicile fiscal, à l'impôt de solidarité sur la fortune en raison de ces mêmes biens, n'est pas fondé à soutenir que ces impositions constitueraient une atteinte excessive à son droit de propriété ; que, par suite, quels que soient les objectifs poursuivis par l'institution de l'article 164 C du code général des impôts, M. X, ne saurait soutenir que les impositions dont il a fait l'objet porteraient atteinte à son droit de propriété en violation des stipulations susrappelées de l'article 1er du protocole additionnel à la convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par ailleurs, dès lors que, ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, les impositions mises à la charge de l'intéressé, résultent de l'application de l'article 164 C qui est applicable à toutes les personnes n'ayant pas leur domicile fiscal en France mais y disposant d'une ou plusieurs habitations, sous réserve de l'application éventuelle de conventions conclues entre la France et l'état de résidence des contribuables, M. X n'est pas fondé à soutenir que lesdites impositions constitueraient une discrimination dans la jouissance de son droit de propriété en violation des stipulations précitées de l'article 14 de la convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, enfin, qu'à supposer le moyen invocable par M. X, l'imposition résultant de l'article 164 C du code général des impôts n'a ni pour objet, ni pour effet de porter atteinte à la libre circulation des capitaux protégée par l'article 56 du traité instituant la communauté européenne ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de ses demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative qui se sont substituées à celle de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

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N° 01PA03945


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 01PA03945
Date de la décision : 23/05/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés SOUMET
Rapporteur ?: M. Bruno PAILLERET
Rapporteur public ?: M. ADROT
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-05-23;01pa03945 ?
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