Vu la requête, enregistrée le 20 novembre 2001, présentée par la société EAU ET FORCE, dont le siège est ..., succédant aux droits et obligations de la société générale des Eaux de Calais ; la société EAU ET FORCE demande à la cour :
1) d'annuler le jugement n° 9518824 en date du 10 juillet 2001 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à laquelle la société générale des Eaux de Calais été assujettie au titre de l'exercice clos en 1988 et des pénalités y afférentes ;
2) de prononcer la décharge de l'imposition litigieuse et, à titre subsidiaire, des pénalités pour mauvaise foi ;
3) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 50 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que la procédure d'imposition est irrégulière, la notification de redressement ne comportant ni la signature, ni le nom, dans la case prévue à cet effet, de l'agent ayant qualité pour mettre en oeuvre la procédure de répression des abus de droit ; que la substitution de base légale opérée par l'administration a privé la société contribuable de la possibilité d'être informée des documents obtenus par celle-ci dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès des gérants et dépositaires des fonds, en vue de vérifier leur fonctionnement régulier ; que la substitution des pénalités de mauvaise foi aux pénalités pour abus de droit ne saurait être admise dès lors que les conditions posées par la jurisprudence à une telle substitution ne sont pas remplies ; qu'elle ne serait pas compatible avec l'article 6-3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 79-594 du 13 juillet 1979 relative aux fonds communs de placement modifiée notamment par la loi n° 85-1321 du 14 décembre 1985 et par la loi n° 87-416 du 17 juin 1987 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2005 :
- le rapport de Mme Helmlinger, rapporteur,
- et les conclusions de M. Bataille, commissaire du gouvernement ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par décision en date du 10 février 2003 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des vérifications nationales et internationales a prononcé le dégrèvement des pénalités pour mauvaise foi mises à la charge de la société générale des Eaux de Calais, au titre de l'exercice clos en 1988 ; que les conclusions de la requête la société EAU ET FORCE qui succède aux droits et obligations de la société générale des Eaux de Calais, relatives à ces pénalités sont donc devenues sans objet ;
Sur le surplus des conclusions :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a refusé à la société générale des Eaux de Calais l'imputation des crédits d'impôt afférents aux dividendes distribués à cette société le 15 décembre 1988 par le fonds commun de placement Ndv rendement, au motif que les opérations ainsi réalisées n'avaient eu d'autre objet que d'éluder l'impôt et étaient dès lors constitutives d'un abus de droit ; que, devant le Tribunal administratif de Paris, l'administration a renoncé à se prévaloir de la procédure d'abus de droit et, par voie de substitution de base légale, a fondé l'imposition litigieuse sur les dispositions de l'article 199 ter A du code général des impôts en vertu desquelles le gérant d'un fonds commun de placement ne peut délivrer de certificats de crédit d'impôt aux porteurs de parts que dans la limite de la somme totale des crédits attachés aux revenus perçus par le fonds ; que la société EAU ET FORCE s'est prévalue, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction 4 K-1-83 du 13 janvier 1983 qui autorise, par dérogation à la règle légale susmentionnée, une bonification ou revalorisation de la masse des avoirs fiscaux ou crédits d'impôt figurant sur les certificats délivrés au fonds commun à raison des revenus mobiliers qu'il a effectivement encaissés au cours de l'exercice considéré ... par application d'un coefficient déterminé en fonction de l'accroissement du nombre de parts du fonds au cours de la période qui sépare la date de l'encaissement des produits ouvrant droit à un crédit d'impôt de la clôture de l'exercice ainsi que l'attribution aux parts supplémentaires créées entre la clôture de l'exercice et la date de mise en paiement des produits, d'un crédit d'impôt unitaire de même montant que celui alloué aux parts existantes à la clôture de l'exercice ; que le tribunal ayant estimé que les conditions prévues par ladite doctrine n'étaient pas remplies dès lors que ce fonds n'avait pas respecté les dispositions prévues par l'article 7 du décret du 2 mars 1983 susvisé, il a rejeté les conclusions de la société EAU ET FORCE tendant à la décharge de l'imposition litigieuse ;
Considérant que l'administration est en droit d'invoquer, à un moment quelconque de la procédure contentieuse, tout moyen nouveau propre à donner un fondement légal à une imposition contestée devant le juge de l'impôt, sous réserve de ne pas priver le contribuable des garanties de procédure prévues par la loi dont il aurait pu bénéficier si ce nouveau fondement avait été initialement retenu par l'administration fiscale ;
Considérant que la société requérante ne peut utilement faire valoir que la société générale des Eaux de Calais n'a pas été mise à même, lors de la procédure d'imposition, de contester les éléments recueillis par l'administration, dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès des gérant et dépositaire du fonds, sur les conditions de fonctionnement de ce dernier, dès lors que l'utilisation de ces documents n'a pas eu pour objet de fonder les impositions litigieuses au regard de la nouvelle base légale, constituée par l'article 199 ter A du code général des impôts, mais de vérifier si les conditions posées par l'instruction du 13 janvier 1983 invoquée par la société, en application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, étaient remplies ;
Considérant que la société requérante ne peut davantage utilement soutenir que la notification de redressement adressée à la société générale des Eaux de Calais le 13 décembre 1991 était irrégulière faute de comporter le visa d'un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal , ainsi que l'exigeaient les dispositions de l'article R.* 64-1 du livre des procédures fiscales, en cas de mise en oeuvre de la procédure de répression des abus de droit, dès lors que cette procédure ne fonde plus désormais l'imposition litigieuse ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société EAU ET FORCE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés à laquelle la société générale des Eaux de Calais a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1988 et des intérêts de retard y afférents ;
Sur les conclusions de la société EAU ET FORCE tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de condamner l'Etat à payer à la société EAU ET FORCE la somme qu'elle demande, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société EAU ET FORCE, en ce qui concerne les pénalités pour mauvaise foi mises à sa charge au titre de l'exercice clos en 1988.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société EAU ET FORCE est rejeté.
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N°01PA03893