Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 27 juillet 2001, présentée pour M. et Mme X, demeurant ..., par Me BAULAC, avocat ; M. et Mme X demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9933985 en date du 6 juillet 2001 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune d'Herblay et de l'Etat à leur verser une indemnité de 3 500 000 F majorée des intérêts en réparation du préjudice subi par eux du fait de la délivrance, le 16 octobre 1990, d'un permis de construire illégal ;
2°) de condamner solidairement la commune d'Herblay et l'Etat à leur verser une somme de 3 000 000 F en réparation de leur préjudice matériel et une somme de 500 000 F au titre de leur préjudice moral ;
3°) à titre subsidiaire, de désigner un expert afin de chiffrer leur préjudice et, si les conclusions de l'expert indiquent qu'il est possible de procéder à la protection des personnes et des biens, de dire que l'Etat et la commune d'Herblay devront prendre à leur charge les travaux nécessaires à fin d'assurer la protection des personnes et de l'immeuble ;
Classement CNIJ : 60-02-05-01-01
C 60-02-05-01-02
60-02-05-01-03
60-04-03-02-01-04
60-05-01
4°) de condamner solidairement l'Etat et la commune d'Herblay au versement d'une somme de 20 000 F en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
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Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 84-328 du 3 mai 1984 relatif à l'élaboration des plans d'expositions aux risques naturels prévisibles ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mai 2004 :
- le rapport de M. LENOIR, premier conseiller,
- et les conclusions de M. HEU, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que M. et Mme X sont propriétaires d'un terrain situé 63 quai du Génie à Herblay (Val-d'Oise) inclus dans le périmètre de la servitude créée, pour la commune d'Herblay, par le plan d'exposition aux risques naturels approuvé par le préfet du Val-d'Oise le 22 mars 1990 ; qu'ils ont obtenu le 16 octobre 1990 un permis de construire afin d'y édifier une maison individuelle de sept pièces pour laquelle un certificat de conformité a été délivré le 2 avril 1993 ; que, toutefois, par un jugement en date du 13 février 1996 devenu définitif, le tribunal administratif de Versailles a annulé le permis susmentionné au motif que le classement du terrain d'assiette de la construction en zone bleue constructible du plan d'exposition aux risques était erroné, les critères retenus dans le rapport de présentation de ce plan devant conduire à son classement en zone rouge inconstructible ; que M. et Mme X relèvent appel du jugement en date du 6 juillet 2001 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise, qui n'a pas fait droit à leur demande tendant à la condamnation de la commune d'Herblay et de l'Etat au versement d'une indemnité de 3 500 000 F en réparation des préjudices subis par eux du fait de l'illégalité du permis de construire qui leur avait été délivré le 16 octobre 1990 ;
Sur les conclusions dirigées par M. et Mme X contre l'Etat :
Considérant que M. et Mme X avaient demandé en première instance que la commune d'Herblay et l'Etat soient condamnés à réparer leur préjudice ; que les premiers juges n'ont pas statué sur les conclusions dirigées contre l'Etat ; que, par suite, le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en date du 6 juillet 2001 doit être annulé en tant qu'il a omis de statuer sur ces conclusions ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par M. et Mme X devant le tribunal administratif et tendant à la condamnation de l'Etat ;
Considérant qu'en première instance le préfet du Val-d'Oise a soutenu, sans être contredit, que ces conclusions n'ont été précédées d'aucune demande adressée aux services de l'Etat et, par conséquent, d'aucune décision susceptible de lier le contentieux ; que, par suite, elles sont irrecevables ;
Sur les conclusions dirigées par M. et Mme X contre la commune d'Herblay :
Considérant que l'illégalité du permis de construire accordé à M. et Mme X par le maire d'Herblay le 16 octobre 1990 est constitutive d'une faute engageant la responsabilité de la commune envers les intéressés, qui sont dès lors fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande au motif qu'aucune faute ne pouvait être imputée à la commune ;
Considérant que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme X, il n'est pas établi que leur maison serait inhabitable et invendable ; qu'à supposer que leur bien ait perdu une partie de sa valeur vénale du fait de l'annulation du permis de construire du 16 octobre 1990, leur préjudice matériel ne saurait, en tout état de cause, être constitué, comme ils le soutiennent, par la valeur vénale conservée de leur propriété, chiffrée par eux à 3 000 000 F ; que leur demande relative à ce chef de préjudice ne peut, dès lors, qu'être rejetée, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée ;
Considérant qu'il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature subis par M. et Mme X dans leurs conditions d'existence en condamnant la commune d'Herblay à leur verser une indemnité de 15 000 euros ;
Sur les conclusions d'appel en garantie formées par la commune d'Herblay à l'encontre de l'Etat :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'erreur commise en ce qui concerne le classement en zone bleue constructible, par le plan d'exposition aux risques naturels établi par les services de la direction départementale de l'équipement et approuvé par le préfet du Val-d'Oise le 22 mars 1990, du périmètre à l'intérieur duquel était située la construction autorisée par le permis de construire du 16 octobre 1990 est exclusivement imputable aux services de l'Etat ; que la commune d'Herblay est, par suite, fondée à demander que l'Etat soit condamné à la garantir intégralement des condamnations prononcées contre elle par le présent arrêt ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que M. et Mme X, qui ne sont pas les parties perdantes, soient condamnés à verser à la commune d'Herblay la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, en application des mêmes dispositions, de condamner la commune d'Herblay à verser à M. et Mme X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 6 juillet 2001 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la demande de M. et Mme X présentées devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et dirigées contre l'Etat sont rejetées.
Article 3 : La commune d'Herblay est condamnée à verser à M. et Mme X une indemnité de 15 000 euros.
Article 4 : La commune d'Herblay est condamnée à verser à M. et Mme X une somme de 1 500 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : L'Etat garantira la commune d'Herblay de la totalité des condamnations prononcées à son encontre par le présent arrêt.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X et de la commune d'Herblay est rejeté.
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N° 01PA02437