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19/05/2004 | FRANCE | N°99PA02773

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2eme chambre - formation a, 19 mai 2004, 99PA02773


Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 16 août 1999, présentée par Mme Jeanne X et M. Christian X, demeurant ... venant aux droits de M. Georges X ; Mme Jeanne X et M. Christian X demandent à la Cour :

1) de réformer le jugement en date du 8 avril 1999, par lequel le tribunal administratif de Versailles ne leur a accordé que la substitution des intérêts de retard aux pénalités pour mauvaise foi qui leur ont été appliquées et a rejeté leur demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la pério

de du 1er janvier 1986 au 31 décembre 1988 qui leur ont été assignés mis en ...

Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 16 août 1999, présentée par Mme Jeanne X et M. Christian X, demeurant ... venant aux droits de M. Georges X ; Mme Jeanne X et M. Christian X demandent à la Cour :

1) de réformer le jugement en date du 8 avril 1999, par lequel le tribunal administratif de Versailles ne leur a accordé que la substitution des intérêts de retard aux pénalités pour mauvaise foi qui leur ont été appliquées et a rejeté leur demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période du 1er janvier 1986 au 31 décembre 1988 qui leur ont été assignés mis en recouvrement les 30 octobre 1991 et 30 novembre 1991 ;

2) de leur accorder la décharge de l'imposition restant en litige ;

3) d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution du jugement attaqué ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mai 2004 :

- le rapport de M. ALFONSI, premier conseiller,

- et les conclusions de M. MAGNARD, commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de l'entreprise individuelle de taxis exploitée par M. Georges X, l'intéressé a été assujetti suivant une procédure de redressement contradictoire par avis de mise en recouvrement du 18 juillet 1991, à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période correspondant aux années 1986,1987 et 1988 assortis de pénalités pour mauvaise foi ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a substitué des intérêts de retard aux pénalités pour mauvaise foi afférentes aux droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés et rejeté la demande tendant à la décharge de ces impositions ; que Mme X et son fils, M. Christian X, venant aux droits de M. Georges X décédé, demandent la réformation de ce jugement en ce qu'il a rejeté cette demande ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il est constant que M. Adrot, conseiller au tribunal administratif de Versailles, a présidé la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, lors de la séance du 28 janvier 1991 au cours de laquelle ont été examinés les éléments qui ont servi à déterminer les bases de l'imposition supplémentaire assignée à M. X ; que le principe d'impartialité, applicable à toutes les juridictions, faisait dès lors obstacle à ce qu'il exerçât devant le tribunal administratif les fonctions de commissaire du gouvernement à l'occasion de la demande dont M. et Mme X avaient saisi ce tribunal contre la même imposition ; que les requérants sont, par suite, fondés à soutenir que le jugement attaqué est intervenu au terme d'une procédure irrégulière et à en demander l'annulation en tant qu'il rejette la demande en décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 1986, 1987 et 1988 ;

Considérant qu'il y a lieu, dans cette mesure, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme Georges X devant le tribunal administratif de Versailles ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction issue de l'article 10-I de la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987 : Lorsque l'une des commissions visées à l'article L 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge. Elle incombe également au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu, comme en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L 16 et L 69 ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les vices de forme ou de procédure dont serait entaché l'avis de la commission n'affectent pas la régularité de la procédure d'imposition et ne sont, par suite, pas de nature à entraîner la décharge de l'imposition établie à la suite des rectifications ou redressements soumis à l'examen de la commission ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la commission aurait siégé dans une composition irrégulière lorsqu'elle a émis, le 28 janvier 1991, son avis sur l'affaire opposant M. et Mme Georges X à l'administration, est en tout état de cause sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

Considérant que l'administration a recueilli des services de la préfecture de police, dans l'exercice du droit de communication qu'elle tient des dispositions de l'article L.81 du livre des procédures fiscales des renseignements suivant lesquels le kilométrage total réalisé en 1987 et 1988 par cinq des sept véhicules de l'entreprise se situait entre 60.000 et 90.000 kilomètres par an ; qu' il résulte de l'instruction que le contribuable a été informé par la notification de redressements datée du 20 décembre 1989 et reçue le 27 décembre 1989 de l'origine, de la nature et de la teneur des renseignements obtenus par l'administration auprès de tiers et mis à même avant la mise en recouvrement des impositions en litige d'en demander la communication ; que, par suite, et sans qu'il y ait lieu pour la cour d'ordonner la production de ces documents, ce moyen doit être écarté ;

Sur la charge de la preuve :

Considérant qu'aux termes de l'article 1651 du code général des impôts : La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, présidée par le président du tribunal administratif ou par un membre du tribunal administratif délégué par lui comprend trois représentants des contribuables et deux représentants de l'administration ayant au moins le grade d'inspecteur principal... ; qu'aux termes de l'article 348-II de l'annexe III à ce code : La commission se réunit sur convocation de son président, qui arrête, pour chaque affaire sa composition ; que les requérants soutiennent que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui s'est réunie le 28 janvier 1991 était irrégulièrement composée, en l'absence de l'un des représentants des contribuables sans que l'administration ne justifie que ce dernier ait été régulièrement convoqué ; que cette irrégularité doit être tenue pour établie, l 'administration n'étant pas en mesure de produire les convocations à la séance de la commission départementale du 28 janvier 1991 qui auraient été adressées le 13 décembre 1990 aux représentants des contribuables et dont le service ne dispose plus ; que toutefois elle ne peut avoir d'autre effet que de modifier la dévolution de la charge de la preuve résultant des dispositions précitées de l'article L.192 du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, en raison de cette irrégularité, il appartient à l'administration d'établir le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige, indépendamment de la régularité de la comptabilité ;

Sur le bien fondé des impositions en litige :

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 1986 au 31 décembre 1987 :

Considérant que le vérificateur a constaté que le compte de caisse de l'entreprise de M. X a présenté à plusieurs reprises en 1986 et 1987, sans justification, plusieurs soldes créditeurs d'un montant élevé, qui laissent supposer que les recettes encaissées ont été supérieures aux recettes comptabilisées ; qu'au surplus les prélèvements en espèces de l'exploitant étaient globalisés en fin d'exercice ; que ces seules irrégularités suffisent à établir que la comptabilité de M. X pour chacun des deux exercices 1986 et 1987 était dépourvue de valeur probante ;

Considérant que, pour procéder à la reconstitution des bases imposables du contribuable, l'administration s'est fondée sur une méthode reposant sur une estimation du kilométrage moyen parcouru par an et par chauffeur, inférieure à celle résultant des renseignements obtenus des services de la préfecture de police, et du nombre de courses prises quotidiennement en charge ; que l'administration a retenu, par chauffeur, pour chacun des deux exercices vérifiés 38.625 kilomètres facturés, 220 jours travaillés par an, sur la base des constatations opérées pour l'année 1988, et seize prises en charge par jour, et évalué à 6% le montant des pourboires ; que cette méthode, qui résulte d'un examen des conditions de fonctionnement propres à l'entreprise, permet d'estimer le chiffre d'affaires réalisé par le contribuable ; que si les requérants, qui ne proposent pas une autre méthode de reconstitution des recettes, se bornent, pour contester la reconstitution de recettes effectuée par l'administration, à lui opposer une autre reconstitution réalisée selon la même méthode, mais aboutissant à des résultats différents, ils n'apportent à l'appui des hypothèses qu'ils retiennent pour se livrer à cette reconstitution aucun élément de nature à en justifier le bien-fondé ; que, dans ces circonstances, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe, eu égard à l'irrégularité entachant l'avis émis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, du bien fondé des redressements de taxe sur la valeur ajoutée assignés à M. X pour la période du 1er janvier 1986 au 31 décembre 1987 ;

Considérant enfin que l'instruction administrative n° 13 L 5-88 du 6 mai 1988, précise que la reconstitution des bases imposables doit, dans la mesure du possible, être opérée selon plusieurs méthode de reconstitution , que les reconstitutions du bénéfice brut doivent être effectuées à partir des conditions concrètes du fonctionnement de l'entreprise et non d'éléments prédéterminés ou étrangers à la gestion propre de celle-ci, même s'il s'agit de pourcentages indiqués par les monographies administratives ou tirés de statistiques professionnelles... et que les renseignements donnés par les contribuables dans le cadre du débat oral et contradictoire doivent être pris en considération s'ils sont jugés fondés, afin d'éviter les taxations exagérées ; que cette instruction ne constitue qu'une simple recommandation de l'administration à ses agents et ne peut, en conséquence, être regardée comme comportant une interprétation formelle du texte fiscal, au sens des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; qu'elle ne peut, dès lors, être utilement invoquée sur le fondement dudit article ;

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1988 :

Considérant que s'il résulte de l'instruction que la comptabilité de l'entreprise de M. X pour l'exercice 1988 ne comportait pas de factures justificatives des achats de carburant, ni l'absence de justificatifs de ces achats ni la circonstance que le chiffres d'affaires et le bénéfice ressortant de la comptabilité pour l'exercice 1988 étaient sensiblement du même ordre que ceux réalisés au cours des deux exercices précédents n'étaient par eux-mêmes de nature à justifier le rejet de la comptabilité ; que l'absence de comptabilisation quotidienne des prélèvements en espèces opérés par l'exploitant ne suffit pas, à elle seule, à faire regarder la comptabilité tenue en 1988 comme irrégulière ; que, par suite, l'administration, n'apporte pas la preuve des irrégularités dont celle-ci serait entachée, ni, par suite, du bien fondé des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée assignés à M. X pour l'année 1988 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Christian X et Mme Jeanne X sont fondés à demander la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée assignés à M. Georges X au titre de l'année 1988 ; qu'il y a lieu, par suite, de prononcer la décharge de ces droits supplémentaires et de rejeter le surplus de leur demande ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 8 avril 1999 est annulé en tant qu'il rejette la demande de M. et Mme X tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 1986, 1987 et 1988.

Article 2 : Il est accordé la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels M. Georges X a été assujetti au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1988.

Article 3 : Le surplus de la demande de M. et Mme Georges X est rejeté.

2

N° 99PA02773

Classement CNIJ : 19-04-02-01-06-01-04

C


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2eme chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 99PA02773
Date de la décision : 19/05/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés FARAGO
Rapporteur ?: M. Jean ALFONSI
Rapporteur public ?: M. MAGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2004-05-19;99pa02773 ?
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