Vu la requête, enregistrée le 16 février 1999 au greffe de la cour, présentée pour M. Jean-Claude X demeurant ..., par Me BOURNILHAS, avocat ; M. X demande à la cour :
1°' d'annuler le jugement n° 876-894193 en date du 15 octobre 1998 par lequel le tribunal administratif de Versailles a, d'une part, rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et des intérêts de retard auxquels il a été assujetti au titre des années 1977, 1978, 1979 et 1980 dans les rôles de la commune de Gif-sur-Yvette ainsi que des pénalités y afférentes et, d'autre part, rejeté sa demande tendant à la décharge du complément d'impôt sur le revenu et des intérêts de retard auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1984 dans les rôles de la commune de Janville-sur-Juine ;
2°) de lui accorder la décharge des impositions contestées ;
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Classement CNIJ : 19-04-02-05-02
C
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu à l'audience publique du 16 janvier 2004 :
- le rapport de M. LE GOFF, premier conseiller,
- les observations de Me BOURNILHAS, avocat, pour M. X,
- et les conclusions de M. BATAILLE, commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de la vérification de comptabilité et de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble portant toutes deux sur les années 1977 à 1980, dont a fait l'objet M. X, qui a exercé l'activité de médecin-anesthésiste-réanimateur à la clinique des Ulis à Bures-sur-Yvette jusqu'en septembre 1977 et à la clinique du Mousseau à Evry à partir du mois de mars 1977, et relève à ce titre de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, il a été assujetti à des compléments l'impôt sur le revenu au titre des années 1977 à 1980 et à des intérêts de retard, qui ont été mis en recouvrement le 31 mai 1984 ; qu'il a fait l'objet d'une nouvelle vérification de comptabilité qui a porté sur l'année 1984, à la suite de laquelle des redressements au titre de ladite année lui ont été notifiés ; que le complément d'impôt et les intérêts de retard correspondants ont été mis en recouvrement le 31 août 1988 ; qu'il demande l'annulation du jugement en date du 15 octobre 1998 en tant que le tribunal administratif de Versailles, d'une part, a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et des intérêts de retard auxquels il a été assujetti au titre des années 1977 à 1980 et, d'autre part, a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément d'impôt sur le revenu et des intérêts de retard auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1984 ;
Sur la recevabilité des conclusions portant sur le complément d'impôt sur le revenu au titre de l'année 1977 :
Considérant que le complément d'impôt sur le revenu assigné à M. X au titre de l'année 1977 a été entièrement dégrevé en première instance ; que, dès lors, comme le soutient l'administration, les conclusions tendant à la décharge dudit complément sont sans objet et par suite irrecevables ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne la reconstitution des recettes des années 1978, 1979 et 1980 :
Considérant que les bases d'imposition relatives aux recettes des années 1978, 1979 et 1980 ont été établies conformément à l'avis émis le 27 juin 1983 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il appartient, dès lors, à M. X, en application des dispositions des articles L 192 et R* 192-1 du livre des procédures fiscales, dans leur rédaction en vigueur à la date à laquelle la commission a émis son avis, d'apporter la preuve de leur exagération ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 99 du code général des impôts : Les contribuables soumis obligatoirement au régime de la déclaration contrôlée sont tenus d'avoir un livre-journal tenu au jour le jour et présentant le détail de leurs recettes et de leurs dépenses professionnelles... ; qu'il résulte de l'instruction qu'au cours des années 1978, 1979 et 1980, les recettes et les dépenses n'étaient pas enregistrées sur le livre journal dans l'ordre chronologique ; que les honoraires provenant de tiers-payant, des consultations et des interruptions volontaires de grossesse étaient enregistrés globalement et mensuellement, et même annuellement seulement en ce qui concerne les honoraires provenant des consultations et des interruptions volontaires de grossesse au cours des années 1979 et 1980 ; que, pour l'année 1978, les recettes inscrites dans le livre annexe n'étaient reportées dans le livre journal qu'avec décalage ; que le livre annexe de l'année 1979 comporte des ratures ; que celui de l'année 1980 ne comporte pas de recettes réglées par chèque alors que des recettes de cette nature sont inscrites dans le livre journal ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient M. X, sa comptabilité ne répondait pas aux conditions posées par l'article précité ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que l'administration l'a déclarée non probante ; que, par suite, le requérant ne peut utilement se fonder sur sa comptabilité pour soutenir que seules les recettes correspondant aux sommes enregistrées en comptabilité qu'il a déclarées au titre des années 1978 à 1980 pouvaient être soumises à imposition ;
Considérant, en second lieu, qu'en se bornant à soutenir que l'évaluation des recettes par le montant des honoraires figurant sur les relevés individuels de sécurité sociale n'est qu'une méthode secondaire, alors qu'eu égard au caractère non probant de la comptabilité, l'administration s'est référée à bon droit à ces documents pour procéder à l'évaluation des recettes des années en litige, le requérant n'apporte aucun élément susceptible d'établir l'exagération des bases d'imposition ;
En ce qui concerne les intérêts d'emprunt, l'engagement de caution et les frais d'avocat :
Sur le terrain de la loi fiscale :
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 93 du code général des impôts : Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X a, en 1975, souscrit un emprunt en vue de financer un apport en compte-courant à la société anonyme Centre médico-chirurgico-obstétrical Les Ulis et qu'à la suite de la liquidation judiciaire de cette société, il a été conduit, en 1984, à payer, au titre de l'engagement de caution qu'il avait souscrit auprès de la société bailleresse des locaux de la clinique, une partie des loyers restant dus par celle-ci et a souscrit à cette fin des emprunts ; qu'il conteste la réintégration dans ses bases d'imposition à l'impôt sur le revenu des intérêts du premier emprunt, des sommes payées au titre de son engagement de caution et des intérêts de l'emprunt destiné à leur financement, ainsi que des frais d'avocat exposés dans le cadre des procédures consécutives à la liquidation judiciaire de la clinique ;
Considérant que si M. X a subi, en 1978, la perte de la somme qu'il avait placée en compte courant dans la société Centre médico-chirurgico-obstétrical Les Ulis, dont la liquidation de biens a été prononcée le 26 mai 1978 par le tribunal de commerce de Paris, les sommes dont il conteste la réintégration dans les bénéfices imposables sont les intérêts de l'emprunt souscrit en 1975 en vue de financer cet apport ; qu'ainsi les intérêts payés en 1978, 1979 et 1980, qui ne sont en relation qu'avec le financement de l'apport initial, ne sont pas liés à la perte de la somme placée en compte courant dans la société ; qu'ils ne peuvent donc être regardés comme des dépenses nécessitées par l'exercice de la profession au sens des dispositions précitées du 1 de l'article 93 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 1er septembre 1975, M. X a, par contrat avec la société Centre médico-chirurgico-obstétrical Les Ulis, conclu en contrepartie des avantages et garanties consentis par le contrat du même jour lui assurant le droit d'exclusivité dans l'exercice de sa profession à la clinique, souscrit un engagement de caution à hauteur de 193.000 F ; que le montant de cet engagement de caution n'était pas hors de proportion avec les revenus qu'il retirait de son activité au sein de la clinique ; qu'ainsi la perte de la somme de 185.370 F qu'il a été appelé à verser en 1984 à la société Locafinancière en exécution de cet engagement et de la somme de 2.240 F réglée au titre des intérêts de l'emprunt destiné à financer cette somme doit être regardée comme une dépense nécessitée par l'exercice de la profession au sens des dispositions précitées du 1 de l'article 93 du code général des impôts ;
Considérant que les frais d'avocat que M. X a exposés au cours des années 1978 à 1980, soit respectivement les sommes de 4.500 F, 3.400 F et 2.000 F et dont il demande la déduction des bénéfices imposables se rattachent aux instances liées aux conséquences de l'engagement de caution qu'il avait souscrit ; qu'il suit de là qu'ils doivent également être regardés comme des dépenses nécessitées par l'exercice de la profession ;
Sur le terrain de la doctrine administrative :
Considérant, en premier lieu, que le paragraphe 111.2 de l'instruction administrative du 30 décembre 1976 publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôt sous la référence n° 8 M-1-76 portant sur les modalités de détermination des biens pour le calcul des plus-values provenant de la vente d'un bien affecté à l'exercice de la profession, dont le requérant se prévaut, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, s'applique aux professions non commerciales placées sous le régime de l'évaluation administrative ; que M. X, soumis au régime de la déclaration contrôlée, n'entre pas dans les prévisions de cette doctrine ;
Considérant, en second lieu, que l'instruction administrative du 23 juin 1978 publiée au bulletin officiel de la direction générale des impôt sous la référence n° 5 G-6-78 qu'invoque M. X prévoit l'application du régime des plus-values aux cessions d'éléments affectés à l'exercice de la profession que ces éléments aient été ou non inscrits sur le registre des immobilisations ; que M. X n'entrant pas dans les conditions prévues par cette interprétation ne peut s'en prévaloir ;
Sur les intérêts de retard :
Considérant que, sous réserve du cas où l'insuffisance ne serait pas du dixième au moins et du cas prévu au premier alinéa de l'article 1729, dans sa rédaction alors en vigueur, les intérêts de retard sont dus même lorsque le contribuable est de bonne foi ; que, par suite, le requérant ne peut utilement se prévaloir de sa bonne foi ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à demander la réduction de ses bases d'imposition à hauteur respectivement de 4.500 F, 3.400 F, 2.000 F et 187.610 F au titre des années 1978, 1979, 1980 et 1984, la décharge des droits et pénalités correspondants ainsi que la réformation, dans cette mesure, du jugement attaqué ;
D E C I D E :
Article 1er : Les bases d'impôt sur le revenu assignées à M. X au titre des années 1978, 1979, 1980 et 1984 sont réduites respectivement des sommes de 4.500 F, 3.400 F, 2.000 F et 187.610 F.
Article 2 : M. X est déchargé des droits et pénalités correspondant à la réduction des bases d'imposition définie à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 15 octobre 1998 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
N° 99PA00392 2