VU, enregistrée le 19 avril 2000 au greffe de la cour, la requête présentée pour la SARL IFGEC dont le siège social est Créteil Parc 16, rue Séjourné 94000 Créteil, par Me LE BOULC'H, avocat ; la SARL IFGEC demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9900134-3 en date du 24 février 2000 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1994 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de lui rembourser les dépens ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 25 000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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Classement CNIJ : 19-01-03-04
C 19-04-02-03-01-01-01
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2004 :
- le rapport de M. ALFONSI, premier conseiller,
- les observations de Me LE BOULC'H, avocat, pour la SARL IFGEC,
- et les conclusions de M. MAGNARD, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que l'administration a réintégré dans les résultats de l'exercice clos le 30 juin 1994, premier exercice non prescrit, la somme de 729 049 F inscrite par la SARL IFGEC au passif du bilan de clôture de cet exercice, au crédit d'un compte-courant d'un associé, M. Avram, et trouvant son origine dans le virement, au cours de l'exercice précédent, d'une dette prescrite de taxe sur la valeur ajoutée au crédit de ce compte-courant ; que la SARL IFGEC fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre de l'année 1994 et résultant de ce redressement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce que les pénalités de mauvaise foi ne sauraient être maintenues, aucun acte constitutif de mauvaise foi n'ayant été commis au cours d'une période non prescrite ; qu'il convient d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun en date du 24 février 2000 ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SARL IFGEC devant le tribunal administratif de Melun ;
Sur le bien-fondé de l'imposition en principal :
Considérant qu'aux termes de l'article 38-2 du code général des impôts : « Le bénéfice net imposable est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt… L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiées » ;
Considérant qu'il appartient toujours à un contribuable de justifier l'inscription d'une dette au passif du bilan de son entreprise, alors même que cette dette a été portée en comptabilité au cours d'un exercice prescrit ; qu'en l'absence d'une telle justification, l'administration est en droit de réintégrer les sommes correspondantes au bilan de clôture du premier exercice non prescrit ; qu'il suit de là que la SARL IFGEC ne saurait soutenir que l'intangibilité du bilan d'ouverture de l'exercice clos en 1994 ferait obstacle à la réintégration au bilan de clôture de cet exercice des éléments de passif injustifiés trouvant leur origine dans des écritures constatées au cours de l'exercice clos en 1993 et que le redressement en litige méconnaîtrait les règles de prescription figurant à l'article L.169 du livre des procédures fiscales ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient la société requérante, la seule circonstance que la somme de 729 049 F ait été inscrite au cours de l'exercice clos en 1993 au crédit du compte-courant de M. Avram ne saurait suffire à justifier de la dette ainsi constatée dans les écritures comptables de la SARL IFGEC alors même que ces écritures auraient été régulièrement approuvées par les organes sociaux et que la société se serait en conséquence reconnue débitrice de cette somme ; que le montant de dette de taxe sur la valeur ajoutée prescrite n'ayant donné lieu à la constatation d'aucun profit correspondant, la SARL IFGEC ne saurait valablement soutenir que le passif litigieux résulterait d'une distribution de ce profit au bénéfice de M. Avram ; que la circonstance que le virement au crédit du compte-courant de M. Avram de la dette de taxe sur la valeur ajoutée prescrite puisse être qualifié de revenu distribué au sens de l'article 109-1-1° du code général des impôts est sans influence sur l'issue du présent litige ; qu'il suit de là que la SARL IFGEC, qui ne peut se prévaloir utilement de l'autorité de la chose jugée qui serait attachée à un jugement du tribunal administratif de Grenoble statuant sur la demande d'une autre contribuable et concernant un autre impôt, ne saurait être regardée comme établissant l'existence d'une créance de tiers au sens des dispositions précitées de l'article 38-2 du code général des impôts ;
Sur les pénalités de mauvaise foi :
Considérant que le redressement constaté trouve son origine dans le virement non justifié au profit d'un associé d'une dette de taxe sur la valeur ajoutée dont la prescription n'a donné lieu à la constatation d'aucun profit ; que la mauvaise foi de la SARL IFGEC, qui exerçait l'activité d'expert-comptable doit donc être regardée comme étant établie ; que la circonstance que le virement à l'origine de l'écriture redressée ait été effectué au cours d'une période prescrite, ne fait pas obstacle à ce que le redressement, qui porte sur une écriture maintenue au bilan de clôture d'un exercice non prescrit et résultant de ce virement, soit assorti de pénalités pour mauvaise foi ;
Considérant qu'en faisant valoir, dans la notification de redressements en date du 28 juillet 1997 l'importance des redressements constatés, leur répétition dans le temps, ainsi que le retraitement par virement de compte à compte du solde d'une taxe sur la valeur ajoutée due et non reversée, l'administration a suffisamment motivé les pénalités de mauvaise foi mises à la charge de la SARL IFGEC ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions présentées par la SARL IFGEC devant le tribunal administratif de Melun ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans le dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser à la SARL IFGEC la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Melun en date du 24 février 2000 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la demande de la SARL IFGEC ainsi que le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
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N° 00PA01193