Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Classement CNIJ : 19-01-03-01-02-03
C
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 03 juillet 2003 :
- le rapport de M. VINCELET, premier conseiller,
- et les conclusions de M. PRUVOST, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE interjette appel du jugement du 20 mai 1997 par lequel le tribunal administratif de Paris a déchargé M. X des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre des années 1986 à 1988 et des pénalités y afférentes ; qu'il demande le rétablissement de M. X au rôle des impositions ainsi dégrevées par le tribunal ;
Considérant que les redressements assignés à M. X sont consécutifs aux vérifications de comptabilité des associations L'ilôt et Les frères d'espérance qu'il avait créées respectivement au cours des années 1969 et 1971 et dont il avait assuré la direction jusqu'en 1988 ; que ces vérifications, ainsi que le dossier pénal de l'intéressé, régulièrement communiqué au service, et ayant abouti au jugement du tribunal correctionnel de Paris du 15 janvier 1992, ont mis en évidence d'importants détournements de fonds opérés par le contribuable au détriment des deux associations précitées ; que les sommes ainsi détournées constituaient des revenus assimilés aux bénéfices des professions non commerciales au sens de l'article 92 du code général des impôts ;
Considérant qu'aux termes de l'articles L.73 du livre des procédures fiscales : Peuvent être évalués d'office : ...2° le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux... Lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 ou à l'article 101 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ; ... Les dispositions de l'article L.68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux..2° ; qu'aux termes de l'article L.68 du même livre : La procédure de taxation d'office prévue aux 2°... de l'article L.66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure. Toutefois, il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure si le contribuable... ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalité des entreprises... ; qu'il résulte, par ailleurs, de l'article 371 AA de l'annexe II au code général des impôts, que parmi les titulaires de bénéfices non commerciaux, seuls sont tenus de se faire connaître d'un centre de formalité des entreprises, les membres des professions libérales ; que M. X n'ayant pas cette qualité, n'était donc pas soumis à une telle obligation ; qu'en conséquence, il ne se trouvait pas en situation d'évaluation d'office de ses bénéfices non commerciaux au titre des années en litige, à raison des fonds prélevés dans les associations susvisées, sans avoir été mis en demeure de déposer les déclarations correspondantes ; que l'administration ne lui ayant pas adressé de telles mises en demeure, M. X ne pouvait être regardé comme étant placé en situation d'évaluation d'office ; qu'il pouvait donc bénéficier des garanties de la procédure contradictoire, notamment de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;
Considérant que si la réponse aux observations du contribuable du 30 novembre 1990 mentionnait page 23 que Toutefois, votre attention est appelée sur le fait que les garanties attachées à la procédure contradictoire ne sauraient être valablement demandées par vous compte tenu que vous êtes placé dans le cadre des dispositions de l'article L.73. , cette réponse précisait expressément page 1 que le litige pouvait être soumis, à la demande du contribuable, à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il est constant que, d'une part, ce dernier n'a pas demandé la saisine de cet organisme dans le délai de trente jours qui lui était imparti, que, d'autre part, et en tout état de cause, pour les années 1987 et 1988 si M. X invoque, dans ses observations en défense devant la cour, la contradiction existant entre lesdites mentions de la réponse précitée, il n'a effectué aucune démarche auprès du service pour tenter de lever l'ambiguïté dont il fait état ; qu'au surplus, pour lesdites années, il avait tacitement accepté les redressements notifiés et la commission n'avait donc pas à être saisie en l'absence de contestation ; que, dans ces conditions, l'administration n'était pas tenue de saisir la commission départementale avant de mettre en recouvrement les droits litigieux ; que le ministre appelant est donc fondé à soutenir que le tribunal a commis une erreur de droit en estimant que l'administration avait à tort refusé au contribuable la possibilité de saisir la commission précitée ; qu'il y a lieu pour la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens présentés par M. X devant le tribunal et devant la cour ;
Considérant, en premier lieu, que les rehaussements notifiés à M. X à la suite de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, découlent, ainsi qu'il a été dit, des vérifications de comptabilité des deux associations qu'il avait créées et dirigées, ainsi que des constatations de fait du juge pénal ; que le vérificateur, qui a examiné les documents comptables, a pu en tirer régulièrement toutes conséquences sur la situation personnelle du contribuable, sans lui adresser un avis de vérification de comptabilité ;
Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que le vérificateur n'ait pas remis en cause le caractère non lucratif des associations, ne le privait pas de la faculté d'assigner des redressements à leur dirigeant, dès lors qu'il avait constaté des détournements de fonds opérés par ce dernier à leur détriment ; que ni le détournement de procédure ni l'atteinte aux droits de la défense invoqués ne sont établis ;
Considérant, en troisième lieu, que contrairement aux affirmations de l'intéressé, le vérificateur n'a pas invoqué le caractère fictif des opérations effectuées par ces associations ; qu'il n'a pas davantage estimé que ces opérations avaient été inspirées par un motif exclusivement fiscal ; que le service s'est borné à constater, qu'eu égard aux clauses de certains contrats de donation, en particulier aux réserves d'usufruit dont ils étaient assortis, aux limitations apportées à la faculté d'aliénation, ainsi qu'à l'usage des propriétés non conformes aux statuts des associations, celles-ci supportaient des dépenses ne leur incombant pas normalement et qui étaient en réalité effectuées au profit de M. X ; que le service n'était donc nullement tenu de diligenter la procédure de répression des abus de droit, prévue par l'article L.64 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. X disposait de la totalité des pouvoirs de direction des associations susmentionnées ; que le service met en évidence, tant la prise en charge par celles-ci au profit de l'intéressé de dépenses somptuaires que des transferts importants de fonds, en particulier en Belgique et au Brésil, où M. X avait des intérêts ; que celui-ci possédait en outre des comptes courants débiteurs, ouverts dans la comptabilité de chacune des deux institutions ; que, compte tenu de l'absence d'argumentation contraire crédible de la part du contribuable, le service doit être regardé comme apportant la preuve de l'existence des revenus ainsi détournés par ce dernier ; que ces détournements ont d'ailleurs été confirmés par le juge pénal le 15 janvier 1992 et le 29 mars 1994 ;
Considérant, en cinquième lieu, que, contrairement aux observations de M. X, les montants de ces détournements ont, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, été à bon droit regardés comme des revenus assimilables à des bénéfices non commerciaux, nonobstant la circonstance qu'une partie de ceux-ci provenait de la prise en charge par les associations de dépenses personnelles de leur dirigeant ;
Considérant, enfin, s'agissant des pénalités, qu'au titre de l'année 1986, le service a fait application, non des pénalités de mauvaise foi, mais, outre les intérêts de retard, de la pénalité de dix pour cent prévue en cas de retard ou de défaut de souscription de la déclaration de revenu catégoriel ; que les intérêts de retard n'ayant pas le caractère d'une sanction, ils n'avaient pas à être motivés ; que le ministre reconnaît toutefois que la pénalité de dix pour cent a été motivée après l'expiration du délai de reprise ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'à l'exception de la pénalité de dix pour cent pour défaut de déclaration assignée à M. X au titre de l'année 1986, la demande présentée par ce dernier devant le tribunal administratif de Paris doit être rejetée ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 9309943/1 du tribunal administratif de Paris du 20 mai 1997 est annulé.
Article 2 : M. X est rétabli au rôle des impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des années 1986, 1987 et 1988, à l'exception de la pénalité de dix pour cent concernant l'année 1986.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de M. X devant le tribunal administratif de Paris est rejeté.
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N° 98PA0001