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20/12/2001 | FRANCE | N°98PA00536

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1e chambre, 20 décembre 2001, 98PA00536


VU, enregistrée au greffe de la cour le 19 février 1998, la requête présentée pour M. et Mme X..., Mme Marie Y... et Mme Geneviève Y..., par Me AZAN, avocat ; les requérants demandent à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9700495/7 en date du 11 décembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation ainsi qu'au sursis à l'exécution de l'arrêté en date du 5 novembre 1996 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a déclaré d'utilité publique l'acquisition par la commune de Courbevoie de parcelles de terrains sises 3 et 5,

square Watteau et déclaré les parcelles immédiatement cessibles ;
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VU, enregistrée au greffe de la cour le 19 février 1998, la requête présentée pour M. et Mme X..., Mme Marie Y... et Mme Geneviève Y..., par Me AZAN, avocat ; les requérants demandent à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9700495/7 en date du 11 décembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation ainsi qu'au sursis à l'exécution de l'arrêté en date du 5 novembre 1996 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a déclaré d'utilité publique l'acquisition par la commune de Courbevoie de parcelles de terrains sises 3 et 5, square Watteau et déclaré les parcelles immédiatement cessibles ;
2 ) d'annuler ledit arrêté ;
3 ) de condamner la commune de Courbevoie à leur verser une somme de 20.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 décembre 2001 :
- le rapport de M. LEVASSEUR, premier conseiller,
- les observations de la SCP HUGLO, LEPAGE et associés, avocat, pour M. et Mme X...,
- et les conclusions de Mme MASSIAS, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que, par un arrêté du 5 novembre 1996, le préfet des Hauts-de-Seine a déclaré d'utilité publique l'acquisition par la commune de Courbevoie des parcelles de terrain sises 3 et 5, square Watteau et 180 bis, rue Armand Silvestre à Courbevoie et a déclaré immédiatement cessibles lesdites parcelles ; que M. et Mme X... ainsi que Mmes Y... font appel du jugement du 11 décembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation et au sursis à l'exécution dudit arrêté préfectoral ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que, par le jugement attaqué, les premiers juges se sont bornés à rejeter le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact figurant dans le dossier de déclaration d'utilité publique au motif que "ladite étude d'impact satisfait aux exigences des textes législatifs réglementaires en vigueur" alors que ce moyen était étayé de faits précis et d'une argumentation détaillée ; qu'ils ont ainsi insuffisamment motivé leur décision ; qu'il s'ensuit que le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 11 décembre 1997 doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par M. et Mme X... ainsi que par Mmes Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Sur la demande à fin d'annulation de l'arrêté du 5 novembre 1996 :
Sur la légalité externe de l'arrêté :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article L.300-2 du code de l'urbanisme : "Le conseil municipal délibère sur les objectifs poursuivis et sur les modalités d'une concertation associant, pendant toute la durée de l'élaboration du projet, les habitants, les associations locales et les autres personnes concernées dont les représentants de la profession agricole avant : a) Toute modification ou révision du plan d'occupation des sols ... b) Toute création, à son initiative, d'une zone d'aménagement concerté ; c) Toute opération d'aménagement réalisée par la commune ou pour son compte lorsque, par son importance ou sa nature, cette opération modifie de manière substantielle le cadre de vie ou l'activité économique de la commune ..." ; que l'opération déclarée d'utilité publique par l'arrêté litigieux, qui comportait l'extension d'un parking souterrain déjà existant, la réalisation d'un gymnase et la construction de seize classes élémentaires, n'entre dans aucune des catégories énumérées par les dispositions précitées de l'article L.300-2 du code de l'urbanisme et, notamment, ne constitue pas une opération d'aménagement au sens de ces dispositions ; qu'en conséquence, elle n'avait pas à être soumise à la procédure de concertation prévue par ces dispositions ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R.11-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : "Un avis au public faisant connaître l'ouverture de l'enquête est, par les soins du commissaire de la République, publié en caractères apparents huit jours au moins avant le début de l'enquête et rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans tout le département ou tous les départements intéressés. Pour les opérations d'importance nationale, ledit avis est, en outre, publié dans deux journaux à diffusion nationale huit jours au moins avant le début de l'enquête" ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'un avis a fait l'objet d'une publication dans le journal La Croix et dans l'édition des Hauts-de-Seine du journal Le Parisien les 29 août et 11 septembre 1996 ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R.11-4 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique doit être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, que la circonstance que le projet soumis à enquête publique a progessivement évolué depuis le début de sa conception pour prendre en compte plusieurs réalisations d'intérêt général ne saurait, ainsi que l'allèguent les requérants, le faire regarder comme ayant fait l'objet d'un fractionnement entachant d'irrégularité la procédure de déclaration d'utilité publique ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article R.11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : "L'expropriant adresse au préfet pour être soumis à l'enquête un dossier qui comprend obligatoirement : I. - Lorsque la déclaration d'utilité publique est demandée en vue de la réalisation de travaux ou d'ouvrages : ...5 l'appréciation sommaire des dépenses ; 6 l'étude d'impact définie à l'article 2 du décret n 77-1141 du 12 octobre 1977, lorsque les ouvrages ou travaux n'en sont pas dispensés ou, s'il y a lieu, la notice exigée en vertu de l'article 4 du même décret ..." ;
Considérant, d'une part, que si, en application des dispositons précitées de l'article R.11-3-I 50 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, le dossier d'enquête doit mettre le public en mesure de connaître le coût réel de l'opération tel qu'il peut être raisonnablement apprécié à la date de l'enquête, les requérants ne justifient pas que l'estimation sommaire des dépenses à un coût de 141.979.300 F ait été entachée d'inexactitudes de nature à induire en erreur le public et à vicier ainsi la procédure ;

Considérant, d'autre part, que si M. et Mme X... soutiennent que l'étude d'impact jointe au dossier ne fait pas état des effets indirects du projet sur l'environnement, ils n'assortissent ce moyen d'aucune précision ; que, contrairement à ce qu'ils affirment, les données géologiques ne sont pas indiquées par référence à un rapport de la société Géotechnique appliquée, qui n'avait donc pas à être annexé à l'étude d'impact, mais sont explicitement mentionnées dans ladite étude ; que le projet soumis à enquête comportait en lui-même des mesures destinées à remédier aux atteintes portées à l'air, au bruit et à la protection des biens et des personnes, notamment en recourant à des normes de construction susceptibles de limiter ces atteintes telles que l'amélioration de l'isolation extérieure, la pose de doubles vitrages ou de faux plafonds acoustiques ou en assurant l'évacuation des rejets d'air vicié provenant des parkings ou la mesure des niveaux sonores au droit des extractions ; qu'ainsi, l'absence dans l'étude d'impact de l'estimation, prévue par le 4 ) de l'article 2 du décret du 12 octobre 1977, des dépenses correspondant aux mesures envisagées pour supprimer, réduire ou compenser les conséquences dommageables du projet sur l'environnement n'entache pas d'irrégularité la déclaration d'utilité publique litigieuse ;
Sur la légalité interne de l'arrêté :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, notamment, de la notice explicative du dossier de déclaration d'utilité publique, que le quartier de Bécon-Est dans lequel doivent être implantés les ouvrages en cause comportant l'extension d'un parking souterrain, un gymnase et seize classes élémentaires, souffre d'un équipement insuffisant au regard des autres quartiers de la commune ; que, notamment, il ne comporte aucun équipement sportif, que le ratio de parcs de stationnement pour 1000 habitants y est de 0,095 alors qu'il est de 0,27 pour l'ensemble de la commune et que le ratio des équipements scolaire ne se situe qu'à 0,47 alors qu'il est de 0,58 pour l'ensemble de la commune ; que la circonstance que la population scolaire serait en diminution dans l'ensemble du département est sans incidence sur l'utilité de la construction de classes élémentaires dans ce quartier ; qu'ainsi, les requérants ne sont pas fondés à contester l'utilité publique de cette opération ; qu'il n'apparaît pas que les atteintes à la propriété privée ainsi que le coût financier de l'opération seraient excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;
Considérant que si les requérants soutiennent que la décision attaquée est entachée de détournement de pouvoir et que, notamment, l'opération projetée dissimulerait un projet immobilier de nature privée et spéculative, ils ne l'établissent pas ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter la demande à fin d'annulation présentée par M. et Mme X..., Mme Marie Y... et Mme Geneviève Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Sur la demande de sursis à exécution :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande des requérants tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de l'arrêté du 5 novembre 1996 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Courbevoie, qui n'est pas la partie perdante dans le cadre de la présente instance, soit condamnée sur leur fondement ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner M. et Mme X..., Mme Marie Y... et Mme Geneviève Y... à payer à la commune de Courbevoie la somme globale de 9.000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Paris en date du 11 décembre 1997 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. et Mme X..., Mme Marie Y... et Mme Geneviève Y... devant le tribunal administratif de Paris, tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 novembre 1996, est rejetée.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de M. et Mme X..., Mme Marie Y... et Mme Genevière Y... tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de l'arrêté du 5 novembre 1996.
Article 4 : M. et Mme X..., Mme Marie Y... et Mme Geneviève Y... sont condamnés à verser la somme globale de 9.000 F à la commune de Courbevoie au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 98PA00536
Date de la décision : 20/12/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - REGLES GENERALES DE LA PROCEDURE NORMALE - ENQUETES - ENQUETE PREALABLE - DOSSIER D'ENQUETE - ETUDE D'IMPACT.

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - REGLES GENERALES DE LA PROCEDURE NORMALE - ENQUETES - ENQUETE PREALABLE - DOSSIER D'ENQUETE - APPRECIATION SOMMAIRE DES DEPENSES.


Références :

Code de justice administrative L761-1
Code de l'expropriation pour cause d'utilité publique R11-4, R11-3
Code de l'urbanisme L300-2
Décret du 12 octobre 1977 art. 2


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. LEVASSEUR
Rapporteur public ?: Mme MASSIAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2001-12-20;98pa00536 ?
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