(5ème chambre)
VU le recours, enregistré au greffe de la cour le 23 mai 2000, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement n 9511605/1 du tribunal administratif de Paris du 1er mars 2000 en tant qu'il a accordé à Mlle Sophie X... la décharge partielle, à concurrence de 5.510 F, de l'obligation de payer la somme visée par l'avis à tiers détenteur délivré le 28 février 1995 par le comptable du Trésor de Grandvilliers à l'encontre de M. Charles X... pour avoir paiement de cotisations de taxe foncière et de taxe d'habitation augmentées de majorations de retard de 10% et des frais de poursuites mises à la charge de celui-ci au titre des années 1988, 1989, 1990 et 1991 ;
2 ) de remettre à la charge de Mlle Sophie X... l'obligation de payer ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2001 :
- le rapport de M. PRUVOST, premier conseiller,
- les observations de Me FOUREL, avocat, pour Mlle X...,
- et les conclusions de M. BOSSUROY, commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'afin d'assurer le recouvrement d'une somme de 6.493 F correspondant à des cotisations de taxe foncière et de taxe d'habitation établies au titre des années 1988, 1989, 1990 et 1991 au nom de M. Charles X... augmentées des majorations de retard de 10% et des frais de poursuites, le comptable du Trésor de Grandvilliers a, le 28 février 1995, émis un avis à tiers détenteur au nom de ce dernier qu'il a adressé à Me Y..., administrateur judiciaire de la succession de M. Charles X... ; que, par le jugement attaqué du 1er mars 2000, le tribunal administratif de Paris a, d'une part, accordé à Mlle Sophie X..., fille de M. Charles X... en sa qualité d'héritière du contribuable décédé en 1988, la décharge, à concurrence de 5.510 F, de l'obligation de payer la somme visée par cet acte de poursuites au motif que les impositions des années 1988, 1989 et 1990 étaient atteintes par la prescription de l'action en recouvrement et, d'autre part, rejeté sa demande de remboursement de ladite somme versée au Trésor par Me Y... en exécution de l'avis à tiers détenteur susmentionné ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE relève appel dudit jugement en tant qu'il a accordé à Mlle Sophie X... la décharge partielle de son obligation de paiement dont procède cet acte de poursuites en faisant valoir que la prescription a été retenue à tort par le tribunal administratif ; que, par la voie du recours incident, Mlle Sophie X... demande la réformation de ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande de remboursement ;
Sur l'appel principal du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE :
Considérant qu'aux termes de l'article L.274 du livre des procédures fiscales : "Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle, perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription" ;
Considérant que les cotisations de taxe foncière et de taxe d'habitation visées par l'avis à tiers détenteur litigieux ont été mises en recouvrement au cours de chacune des années au titre desquelles elles ont été établies ; qu'il résulte de l'instruction que, par lettre du 4 avril 1990, Me Y..., désigné comme administrateur judiciaire provisoire de la succession de M. Charles X..., par ordonnance de référé du tribunal de grande instance de Nanterre du 8 mars 1999, a informé le comptable du Trésor de Grandvilliers du décès du contribuable et l'a invité à lui transmettre le courrier destiné au contribuable ; que l'administration ayant été ainsi officiellement informée de l'adresse où devaient être envoyés les courriers concernant M. Charles X..., les commandements des 21 et 26 mars 1991 expédiés à Puteaux à l'adresse de l'appartement occupé par l'intéressé avant son décès n'ont pas été notifiés dans des conditions régulières et n'ont pu, par suite, avoir pour effet d'interrompre le cours de la prescription de l'action en recouvrement ; que, si le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE se prévaut d'une lettre émanant de Me Y... du 10 avril 1991 et d'un commandement de payer adressé le 5 octobre 1993, il n'établit pas, comme il en a la charge en tant que tiers au contrat de mandat invoqué, que l'administrateur de la succession de M. Charles X..., dont la mission expirait le 8 mars 1991 selon l'ordonnance susmentionnée, aurait agi en qualité de mandataire de la succession après cette date en se bornant à faire valoir, d'une part, que ledit commandement n'a pas été contesté et, d'autre part, que Me Y... détenait encore en 1995 des fonds appartenant la succession ;
Considérant qu'en l'absence de tout autre acte interruptif de prescription dans le délai de quatre ans à compter de la mise en recouvrement, la prescription prévue à l'article L.274 du livre des procédures fiscales était acquise en ce qui concerne les cotisations de taxe foncière et de taxe d'habitation des années 1988, 1989 et 1990 ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a accordé à Mlle Sophie X... la décharge de l'obligation de payer la somme mentionnée par l'avis à tiers détenteur du 28 février 1995 à concurrence de 5.510 F ;
Sur l'appel incident de Mlle Sophie X... :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle Sophie X... est fondée à demander que la somme de 5.510 F appréhendée par le Trésor soit remboursée à la succession de M. Charles X... ; que le jugement attaqué doit être réformé sur ce point ;
Sur les conclusions de Mlle Sophie X... tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à Mlle Sophie X... la somme de 5.000 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.
Article 2 : L'Etat est condamné à rembourser à la succession de M. Charles X... une somme de 5.510 F.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris, en date du 1er mars 2000, est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Mlle Sophie X... une somme de 5.000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.