(3ème Chambre B)
VU la requête, enregistrée le 12 juillet 1999 au greffe de la cour administrative d'appel de Paris, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9408034/4 du 23 novembre 1998 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de Mme Z... Chen la décision en date du 19 avril 1994 par laquelle il avait procédé au retrait de la carte de résident de l'intéressée ;
2 ) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
VU l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 juin 2001 :
- le rapport de M. DIDIERJEAN, premier conseiller,
- et les conclusions de M. LAURENT, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que pour annuler la décision en date du 19 avril 1994 part la quelle le PREFET DE POLICE a retiré à Mme X... sa carte de résident et l'a invité à quitter le territoire français, le tribunal administratif s'est fondé sur le fait qu'en violation des dispositions de l'article 8 du décret du 28 novembre 1983, l'intéressée, privée de l'assistance d'un interprète, a été dans l'incapacité de présenter utilement ses observations préalablement à la décision contestée ;
Considérant, en premier lieu, que ni l'article 8 précité du décret du 28 novembre 1983, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ne font obligation à l'administration, lorsqu'elle prépare une décision concernant une personne d'origine étrangère de recourir au service d'un interprète ; que l'administration ne peut par contre s'opposer à ce que la personne concernée se fasse au besoin assister d'un interprète, en vue d'être utilement entendue ; qu'il résulte des pièces du dossier qu'en l'espèce, Mme X..., qui vit et travaille en France depuis 1987, s' y est mariée en 1989 et a demandé ensuite sa naturalisation, devait avoir normalement acquis en 1994 une connaissance suffisante de la langue française lui permettant de se prévaloir, ainsi qu'elle le fait, de sa bonne intégration dans la société française ; qu'à supposer toutefois, comme elle le soutient, qu'elle avait encore à cette époque une compréhension insuffisante du français, elle pouvait recourir au service d'une tierce personne pour présenter ses observations orales ; qu'il est constant qu'elle n'a pas eu recours à un interprète ni même demandé à l'administration la possibilité d'y recourir ; qu'il suit de là que c'est à tort que pour annuler la décision contestée du PREFET DE POLICE, le tribunal administratif s'est fondé sur le vice de procédure qu'aurait constitué l'impossibilité pour la requérante de présenter ses observations lors des entretiens qui ont précédé la décision litigieuse ;
Considérant qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel de statuer sur les autres moyens présentés par Mme X... à l'appui de sa demande ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte des pièces du dossier et qu'il n'est pas sérieusement contesté, en premier lieu qu'après le mariage de Mme X... avec M. Y..., ressortissant français, le 5 août 1989, les deux époux n'ont jamais vécu sous le même toit, en second lieu que l'enfant de Mme X... né le 13 février 1992 n'a pas été reconnu par M. Y... et qu'enfin leur mariage a été dissous par un jugement rendu le 9 novembre 1992 sans que le couple ait mené une vie commune ; qu'il résulte de ces éléments que Mme X... a contracté mariage avec M. Y... en vue seulement de réunir les conditions requises pour l'obtention d'un titre de résident en qualité de conjoint d'un ressortissant français ; que par suite c'est à bon droit que le préfet a pu considérer, sans que puisse y faire obstacle l'absence d'opposition de l'autorité judiciaire au mariage de l'intéressée, que le titre de résident de Mme X... ayant été obtenu par fraude, il y avait lieu pour lui de le retirer ;
Considérant, d'autre part, que les moyens tirés par Mme X... de ce qu'elle n'a pas fait l'objet d'une procédure judiciaire pour atteinte à l'ordre public, qu'elle travaille et qu'elle satisfait à ses obligations sociales et fiscales sont sans influence sur la légalité de la décision contestée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé sa décision en date du 19 avril 1994 retirant le titre de séjour de Mme X... ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 23 novembre 1998 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.