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17/04/2001 | FRANCE | N°99PA03838

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5e chambre, 17 avril 2001, 99PA03838


(5ème Chambre )
VU la requête enregistrée le 21 novembre 1999 au greffe de la cour présentée pour M. Gérald Y..., demeurant ... FL 33102 - 5292 U.S.A. par Me Robert X..., avocat ; M. Y... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 971760/1 - 9803670/1, en date du 2 juillet 1999, par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté les contestations qu'il a formées à la suite de deux commandements décernés à son encontre, le 14 mars 1996 et le 25 mars 1997, par le comptable du Trésor de Sèvres pour avoir paiement d'une somme de 9.828.591 F due au titre de l'impôt

sur le revenu et des pénalités des années 1987, 1988 et 1989 ;
2 ) d...

(5ème Chambre )
VU la requête enregistrée le 21 novembre 1999 au greffe de la cour présentée pour M. Gérald Y..., demeurant ... FL 33102 - 5292 U.S.A. par Me Robert X..., avocat ; M. Y... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 971760/1 - 9803670/1, en date du 2 juillet 1999, par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté les contestations qu'il a formées à la suite de deux commandements décernés à son encontre, le 14 mars 1996 et le 25 mars 1997, par le comptable du Trésor de Sèvres pour avoir paiement d'une somme de 9.828.591 F due au titre de l'impôt sur le revenu et des pénalités des années 1987, 1988 et 1989 ;
2 ) de le décharger de l'obligation de payer cet impôt et ces pénalités ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 février 2001 :
- le rapport de M. PRUVOST, premier conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour M. Y...,
- et les conclusions de M. BOSSUROY, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que M. Y... a fait l'objet d'un commandement décerné le 25 mars 1997 par le comptable du Trésor de Sèvres pour avoir paiement d'une somme de 9.828.591 F relative à des cotisations d'impôt sur le revenu mises en recouvrement le 30 avril 1992 assorties de la majoration de retard de 10 %, dont l'intéressé était redevable au titre des années 1987, 1988, et 1989 ; qu'il a saisi le tribunal administratif de Paris de deux demandes enregistrées respectivement le 23 décembre 1997 et le 22 mars 1998 et dirigées, la première, contre le commandement du 25 mars 1997 et, la seconde, contre un précédent commandement émis le 14 mars 1996 par le même comptable pour le recouvrement de ladite somme ; qu'il a contesté son obligation de payer par les moyens que la prescription de l'article L.274 du livre des procédures fiscales lui était acquise et que la lettre de rappel prévue à l'article L.255 du même livre ne lui avait pas été préalablement notifiée ; que, par le jugement attaqué du 2 juillet 1999 dont M. Y... relève appel, le tribunal administratif de Paris, ayant joint les demandes qui lui étaient soumises, a rejeté les contestations par les motifs que le cours du délai de prescription de l'action en recouvrement avait été interrompu par la notification du commandement du 14 mars 1996, que le comptable n'était pas tenu d'envoyer la lettre de rappel en application de l'article L.260 du livre des procédures fiscales avant l'envoi de ce commandement et que la demande dirigée contre le commandement du 25 mars 1997 était irrecevable pour avoir été présentée après l'expiration du délai imparti par l'article R.281-4 du livre des procédures fiscales ;
Sur les conclusions de M. Y... dirigées contre le commandement du 25 mars 1997 :
En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant qu'en vertu des articles L.281, R.281-1 et R.281-2 du livre des procédures fiscales, les contestations relatives au recouvrement des impôts dont la perception incombe aux comptables du Trésor font l'objet d'une demande qui doit être adressée, appuyée de toutes justifications utiles dans un délai de deux mois à partir de la notification de l'acte de poursuites au trésorier-payeur général territorialement compétent ; qu'aux termes de l'article R.281-4 du même livre, ce "chef de service se prononce dans un délai de deux mois à partir du dépôt de la demande, dont il accuse réception. Si aucune décision n'a été prise dans ce délai ou si la décision rendue ne lui donne pas satisfaction, le redevable doit, à peine de forclusion, porter l'affaire devant le tribunal compétent ... Il dispose pour cela de deux mois à partir : a) Soit de la notification de la décision du chef de service, b) Soit de l'expiration du délai de deux mois accordé au chef de service pour prendre sa décision" ; et qu'aux termes de l'article R.281-5 de ce livre : "Le juge se prononce exclusivement au vu des justifications qui ont été présentées au chef de service. Les redevables qui l'ont saisi ne peuvent ni lui soumettre des pièces justificatives autres que celles qu'ils ont déjà produites à l'appui de leurs mémoires, ni invoquer des faits autres que ceux exposés dans ces mémoires" ;

Considérant que la décision du 22 octobre 1997, par laquelle le trésorier-payeur général des Hauts-de-Seine a rejeté l'opposition formée par M. Y... contre le commandement du 25 mars 1997, a été notifiée à l'intéressé le 24 octobre 1997 ; qu'il résulte de l'instruction que M. Y... a saisi le tribunal administratif de conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer les impositions visées par cet acte de poursuites dans sa demande enregistrée au greffe du tribunal, le 23 décembre 1997, soit avant l'expiration du délai fixé par les dispositions précitées de l'article R.281-4 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que ces conclusions avaient été présentées seulement dans un mémoire du 22 mai 1998 et a, en conséquence, rejeté cette demande comme irrecevable ; que le jugement attaqué doit, dès lors, être annulé en tant qu'il a rejeté la contestation formée à la suite du commandement du 25 mars 1997 décerné par le comptable du Trésor de Sèvres ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer directement sur la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la réclamation par laquelle M. Y... a contesté son obligation de payer la somme comprise dans le commandement du 25 mars 1997 a été présentée au trésorier-payeur général, le 4 septembre 1997, dans le délai de deux mois de la notification de cet acte de poursuites à l'intéressé, effectuée par lettre du 8 août 1997 du Consulat général de France à Montréal ; que M. Y... a expressément invoqué dans sa réclamation le moyen tiré de la prescription de l'action en recouvrement ; qu'il est constant que l'intéressé n'a eu connaissance du commandement du 14 mars 1996 que par la décision du trésorier-payeur général du 22 octobre 1997 rejetant sa réclamation à l'encontre du commandement du 25 mars 1997 ; que le ministre ne saurait dès lors soutenir que les dispositions de l'article R.281-5 du livre des procédures fiscales s'opposaient à ce que l'intéressé contestât directement devant le tribunal la régularité de la notification du commandement du 14 mars 1996 à l'appui du moyen tiré de la prescription ; que le commandement du 25 mars 1997 étant le premier acte lui permettant d'invoquer ce motif, le ministre n'est pas davantage fondé à soutenir que la demande de M. Y... au tribunal administratif serait irrecevable faute que l'intéressé se soit prévalu de la prescription dans une réclamation formulée dans le délai de deux mois imparti par les dispositions précitées de l'article R.281-2 du livre des procédures fiscales ;
En ce qui concerne la prescription de l'action en recouvrement :
Considérant qu'aux termes de l'article L.274 du livre des procédures fiscales : "Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle, perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription" ;

Considérant que M. Y... soutient, à l'appui de sa demande de décharge de son obligation de payer, que les impositions dont s'agit étaient couvertes par la prescription, celle-ci n'ayant pas été interrompue par le commandement du 14 mars 1996 notifié dans des conditions irrégulières à une adresse qui n'était pas celle de son domicile ;
Considérant que les cotisations d'impôt sur le revenu des années 1987, 1988 et 1989 ont été mises en recouvrement le 30 avril 1992 ; que la lettre recommandée contenant le commandement du 14 mars 1996 décerné à l'encontre de M. Y... pour avoir paiement de ces impositions a été présentée, le 18 mars 1996, à l'adresse du ... qui avait été celle du domicile de la mère de l'intéressé d'où elle a été retournée au service revêtue de la mention "non réclamée" ; que, si l'administration soutient qu'à l'époque de l'envoi du commandement, M. Y... était, en réalité, domicilié chez sa mère, à Nice, elle ne l'établit pas en se bornant à faire état de la mention "non réclamée" portée sur l'accusé de réception du courrier, à faire valoir que l'intéressé n'avait pas réclamé divers courriers qui lui avaient été envoyés à l'étranger entre 1992 et 1996 et à soutenir, qu'il aurait donné procuration à sa mère en 1991 pour recevoir les objets recommandés ; qu'il résulte de l'instruction que M. Y... a résidé en Nouvelle-Calédonie de mars 1990 à février 1991 avant de s'établir en Grande-Bretagne puis au Canada ; que, s'il n'a pas signalé à l'administration fiscale ses différentes adresses à l'étranger, il a déposé, le 15 juin 1992, une réclamation d'assiette relative à ces impositions auprès du centre des impôts de Sèvres-Nord par l'intermédiaire d'un avocat ; qu'en application des dispositions de l'article R.197-5 du livre des procédures fiscales prescrivant aux réclamants domiciliés hors de France de faire élection de domicile en France, M. Y... doit être ainsi réputé avoir implicitement élu domicile chez ce mandataire établi en France ; que cette adresse seule officiellement communiquée au service par l'intéressé doit être regardée comme celle où le comptable du Trésor devait notifier les actes de poursuites propres à assurer le recouvrement de sa dette fiscale ; que l'administration ne saurait utilement se prévaloir de ce que cette adresse n'a pas été portée à la connaissance du comptable du Trésor dès lors qu'elle était connue des services d'assiette et que les services chargés du recouvrement pouvaient en obtenir la communication auprès du centre des impôts ; qu'il résulte de ce qui précède que le commandement du 14 mars 1996 expédié à Nice n'a pas été notifié dans des conditions régulières à M. Y... et n'a pu, par suite, avoir pour effet d'interrompre le cours de la prescription de l'action en recouvrement des impositions dont s'agit ;

Considérant qu'en l'absence de tout autre acte interruptif de prescription dans le délai de quatre ans à compter de la mise en recouvrement, M. Y... soutient, à bon droit, que la prescription lui était acquise le 1er mai 1996 ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande, M. Y... est recevable et fondé à se prévaloir de la prescription prévue à l'article L.274 du livre des procédures fiscales en ce qui concerne la somme de 9.828.591 F dont le recouvrement a été poursuivi au moyen du commandement du 25 mars 1997 ; qu'il y a lieu de le décharger de l'obligation de payer ladite somme de 9.828.591 F ;
Sur les conclusions de M. Y... dirigées contre le commandement du 14 mars 1996 :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les moyens de M. Y... :
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M. Y... est déchargé de l'obligation de payer la somme de 9.828.591 F ; que, dès lors, ses conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer cette même somme visée par le commandement du 14 mars 1996 sont devenues sans objet ;
Sur les conclusions de M. Y... tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à M. Y... une somme de 10.000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris, en date du 2 juillet 1999, est annulé en tant qu'il a rejeté la contestation de M. Y... formée à la suite du commandement du 25 mars 1997 décerné à son encontre par le comptable du Trésor de Sèvres.
Article 2 : M. Y... est déchargé de l'obligation de payer la somme de 9.828.591 F qui lui a été réclamée à raison de l'impôt sur le revenu et de la majoration de retard de 10 % établis au titre des années 1987, 1988 et 1989.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris, en date du 2 juillet 1999, est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 9.828.591 F visée par le commandement du 14 mars 1996.
Article 5 : L'Etat versera à M. Y... une somme de 10.000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 99PA03838
Date de la décision : 17/04/2001
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-05-01-005 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - RECOUVREMENT - ACTION EN RECOUVREMENT - PRESCRIPTION


Références :

CGI Livre des procédures fiscales L274, L255, L260, R281-4, L281, R281-1, R281-2, R281-5, R197-5
Code de justice administrative L761-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. PRUVOST
Rapporteur public ?: M. BOSSUROY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2001-04-17;99pa03838 ?
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