(3ème Chambre A)
VU la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés au greffe de la cour les 14 décembre 1998, 2 et 22 septembre 1999, présentés pour Mme Corinne Y..., demeurant ... 97, 92240 Malakoff, par Me X..., avocat ; Mme Y... demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement n 96-2508 du tribunal administratif de Versailles en date du 24 septembre 1998 en tant que ce jugement a fait une évaluation insuffisante de son préjudice occasionné par l'accident de la route dont elle a été victime le 30 décembre 1993 ;
2 ) de condamner l'Etat à lui payer les sommes ci-après, avec les intérêts légaux à compter de sa demande présentée le 15 mai 1996 :
- 112.000 F, au titre de l'incapacité permanente partielle de 14 % ;
- 47.485,77 F, au titre de l'incapacité temporaire totale du 15 février au 24 août 1994 et du 26 juillet au 30 septembre 1995 ;
- 200.000 F en réparation du préjudice résultant de son changement de poste de travail ;
- 30.000 F pour le préjudice d'agrément ;
- 15.000 F pour le préjudice esthétique ;
- et 40.000 F en réparation des douleurs qu'elle a endurées ;
3 ) de dire que les intérêts seront capitalisés une fois l'an, au 1er janvier de chaque année, jusqu'au complet paiement ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mars 2001 :
- le rapport de M. RATOULY, président,
- les observations de Maître X..., avocat, pour Mme Y...,
- et les conclusions de M. DE SAINT-GUILHEM, commissaire du Gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant, d'une part, que contrairement à ce que soutient Mme Y..., les jugements des tribunaux administratifs emportent de plein droit intérêts à compter de la date à laquelle ils sont rendus ; que, dès lors, les premiers juges n'avaient pas à préciser dans leur jugement que les intérêts couraient à partir de la date de celui-ci ;
Considérant, d'autre part, que le tribunal administratif de Versailles n'avait pas à inviter la requérante à chiffrer ses pertes de salaires, dès lors qu'une expertise avait été ordonnée à la demande de celle-ci et que la mission de l'expert n'était pas de chiffrer ce chef de préjudice mais "d'évaluer la durée de l'incapacité temporaire totale" ; que, par suite, et contrairement à ce que soutient Mme Y..., elle n'est pas recevable à chiffrer pour la première fois en appel ce chef de préjudice et l'ensemble de ses conclusions n'est recevable que dans la limite de sa demande initiale, soit 143.000 F ;
Sur le préjudice :
Considérant qu'il ressort de l'instruction et notamment du rapport de l'expert que Mme Y... reste atteinte d'une incapacité permanente partielle de 11 % et qu'elle a dû renoncer à la pratique de certains sports ; qu'il y a lieu de réparer ces chefs de préjudice en accordant à l'intéressée une indemnité de 80.000 F; qu'il convient, compte tenu des souffrances endurées à l'occasion de deux interventions chirurgicales et évaluées à 4,5/7, de porter l'indemnisation accordée à ce titre de 20.000 à 45.000 F et de porter de 6000 à 15.000 F le montant de la réparation du préjudice esthétique de Mme Y... qui conserve dans la région de la nuque une cicatrice nettement visible ; qu'en revanche, Mme Y... n'établit pas qu'elle ait dû modifier son activité professionnelle en raison des conséquences de l'accident ; que le jugement n 96-2508 du 24 septembre 1998 du tribunal administratif de Versailles doit être réformé pour tenir compte des modifications ci-dessus apportées aux indemnisations ;
Sur les intérêts :
Considérant que Mme Y... peut, ainsi qu'elle le demande en appel, prétendre aux intérêts sur le montant de son préjudice, ainsi fixé à la somme de 140.000 F, à compter du 15 mai 1996, date d'enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif de Versailles ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 14 décembre 1998 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Article 1er : La somme que l'Etat a été condamné à payer à Mme Y... par le jugement n 96-2508 du 24 septembre 1998 du tribunal administratif de Versailles est portée de 106.000 à 140.000 F. Cette dernière somme portera intérêts au taux légal à compter du 15 mai 1996. Les intérêts échus le 14 décembre 1998 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 24 septembre 1998 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme Y... est rejeté.