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28/09/2000 | FRANCE | N°99PA00937

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4e chambre, 28 septembre 2000, 99PA00937


recours, enregistré au greffe de la cour le 2 avril 1999 sous le n 99PA00937, présenté au nom de l'Etat par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement du tribunal administratif de Paris n 9412597/4 en date du 4 décembre 1998 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Paris, faisant partiellement droit à la demande de la compagnie Air France, a ramené le montant de l'amende infligée par décision du MINISTRE DE L'INTERIEUR en date du 29 juillet 1994 de 10.000 F à 5.000 F ;
2 ) de rejeter la demande de

la compagnie Air France ;
VU les autres pièces du dossier ;
V...

recours, enregistré au greffe de la cour le 2 avril 1999 sous le n 99PA00937, présenté au nom de l'Etat par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement du tribunal administratif de Paris n 9412597/4 en date du 4 décembre 1998 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Paris, faisant partiellement droit à la demande de la compagnie Air France, a ramené le montant de l'amende infligée par décision du MINISTRE DE L'INTERIEUR en date du 29 juillet 1994 de 10.000 F à 5.000 F ;
2 ) de rejeter la demande de la compagnie Air France ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la convention relative à l'aviation civile internationale signée à Chicago le 7 décembre 1944 ;
VU la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des Etats de l'Union économique Bénélux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990 ;
VU le code de l'aviation civile ;
VU l'ordonnance n 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, relative à l'entrée et au séjour des étrangers en France ;
VU le décret n 93-180 du 8 février 1993 ;
VU la décision du conseil constitutionnel n 92-307 DC du 25 février 1992 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 septembre 2000 :
- le rapport de Mme de SALINS, premier conseiller,
- et les conclusions de M. HAIM, commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 8 septembre 1993, la compagnie Air France a embarqué à bord du vol AF 7200 en provenance d'Abidjan pour Roissy-Charles de Gaulle un ressortissant zaïrois se nommant Nzewa X... dont la destination finale était le Canada ; que les agents d'escale de la compagnie à Roissy découvrant que l'intéressé n'était pas titulaire d'un visa lui permettant de se rendre dans ce pays et confronté au refus de l'intéressé d'embarquer à destination de son pays d'origine, l'ont présenté aux services de police de l'aéroport ; que, par décision en date 29 juillet 1994, le MINISTRE DE L'INTERIEUR a, sur le fondement des dispositions de l'article 20 bis de l'ordonnance modifiée du 2 novembre 1945, infligé à la compagnie Air France une amende d'un montant de 10.000 F pour avoir débarqué sur le territoire français ce passager démuni de visa lui permettant d'être admis en France ; que, par jugement en date du 4 décembre 1998, le tribunal administratif de Paris, après avoir écarté l'ensemble des moyens développés par la compagnie contre le bien-fondé de cette amende ainsi que celui relatif à l'insuffisante motivation de son montant, a réduit ce montant à la somme de 5.000 F pour tenir compte du comportement des agents de la compagnie en service à Roissy ; que le MINISTRE DE L'INTERIEUR fait appel de ce jugement et demande à la cour de rétablir le montant initial de cette amende ; que, par la voie de l'appel incident, la société Air France conclut à l'annulation de la décision et du jugement au motif que le ministre et les premiers juges ont commis une erreur de droit en considérant que les dispositions de l'article 20 bis de l'ordonnance modifiée du 2 novembre 1945 étaient applicable au cas d'espèce d'un passager en transit pour un Etat tiers ;

Considérant qu'aux termes de l'article 20 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, dans sa rédaction issue de la loi du 26 février 1992 : "I - Est punie d'une amende d'un montant maximum de 10.000 F l'entreprise de transport aérien ou maritime qui débarque sur le territoire français, en provenance d'un autre Etat, un étranger non ressortissant d'un Etat membre de la Communauté économique européenne et démuni d'un document de voyage et, le cas échéant, du visa requis par la loi ou l'accord international qui lui est applicable à raison de sa nationalité. /Le manquement est constaté par un procès-verbal établi par un fonctionnaire appartenant à l'un des corps dont la liste est définie par décret en Conseil d'Etat. Copie du procès-verbal est remise à l'entreprise de transport intéressée. Le manquement ainsi relevé donne lieu à une amende prononcée par le ministre de l'intérieur. L'amende peut être prononcée autant de fois qu'il y a de passagers concernés. Son montant est versé au Trésor public par l'entreprise de transport. /L'entreprise de transport a accès au dossier et est mise à même de présenter ses observations écrites dans un délai de un mois sur le projet de sanction de l'administration. La décision du ministre, qui est motivée, est susceptible d'un recours de pleine juridiction. Le ministre ne peut infliger une amende à raison de faits remontant à plus d'un an. /II - L'amende prévue au premier alinéa du présent article n'est pas infligée : /1 ) lorsque l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de la Communauté économique européenne qui demande l'asile a été admis sur le territoire français ou lorsque la demande d'asile n'était pas manifestement infondée ; /2 ) lorsque l'entreprise de transport établit que les documents requis lui ont été présentés au moment de l'embarquement ou lorsque les éléments présentés ne présentent pas un élément d'irrégularité manifeste" ;
Considérant, en premier lieu, que si ces dispositions ne s'appliquent qu'aux cas de passagers débarqués sur le territoire français, il ressort des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas contesté par la société Air France que M. Nzewa X..., bien qu'ayant pour destination finale le Canada, a dû être présenté à l'admission sur le territoire français en raison de la double circonstance qu'il n'était pas muni d'un visa lui permettant d'embarquer sur un vol à destination de ce pays et de son refus d'être embarqué sur un vol à destination de son pays d'origine ; que, dans ces conditions et quelle que soit la destination finale de l'intéressé prévue initialement au départ du vol à Abidjan, la compagnie doit être regardée comme ayant débarqué l'intéressé sur le territoire français, au sens des dispositions précitées de l'article 20 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, alors qu'il n'était pas muni du visa requis pour ce faire ; que, dès lors, le MINISTRE DE L'INTERIEUR et les premiers juges n'ont commis aucune erreur de droit en faisant application de ces dispositions au cas d'espèce ; que si la société indique également, dans le cadre de son appel incident, qu'elle reprend l'ensemble des moyens développés en première instance, elle ne les a pas exposés devant la cour, et n'a pas annexé à son mémoire de copie de ses écritures devant le tribunal ; qu'enfin, elle n'a pas davantage critiqué le raisonnement suivi par les premiers juges pour rejeter ces moyens ;

Considérant, en second lieu, que si la compagnie a failli aux obligations qui découlent pour elles des dispositions précitées de l'article 20 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 en ne s'assurant pas, au départ du vol à Abidjan, que le passager était en possession du visa lui permettant de se rendre au lieu de destination finale de son voyage, à savoir le Canada, elle a en revanche coopéré avec les autorités de police en leur remettant ce passager après avoir elle-même décelé l'absence de visa à l'escale de Roissy ; que, dans ces conditions, le MINISTRE DE L'INTERIEUR n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris, tenant compte de ce comportement de la compagnie, a réduit de 10.000 F à 5.000 F le montant de l'amende qui lui a été infligée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de rejeter tant le recours principal du ministre que l'appel incident de la société Air France ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le MINISTRE DE L'INTERIEUR à verser à la société Air France, en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la somme de 5.000 F au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR et l'appel incident de la société Air France sont rejetés.
Article 2 : L'Etat (MINISTRE DE L'INTERIEUR) versera à la société Air France la somme de 5.000 F (cinq mille francs) en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 99PA00937
Date de la décision : 28/09/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335 ETRANGERS - CADispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée (article 20 bis) permettant d'infliger une amende à un transporteur aérien débarquant sur le territoire français un ressortissant étranger non ressortissant d'un pays de la Communauté européenne - dépourvu de document de voyage et - le cas échéant - de visa - Champ d'application - Inclusion - Passager en transit en France en direction d'un Etat tiers.

335, 65-03 Le fait de débarquer sur le territoire français, en provenance d'un autre Etat, un étranger non ressortissant d'un Etat membre de la Communauté économique européenne, au sens de l'article 20 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, s'entend de l'action matérielle consistant, pour ce passager, à descendre de l'avion sur le territoire français, que cette action soit motivée par la volonté d'entrer, au sens juridique du terme, sur le territoire français ou simplement de transiter dans l'aéroport concerné pour prendre un autre vol vers un pays tiers, quel qu'il soit.

TRANSPORTS - TRANSPORTS AERIENS - CADispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée (article 20 bis) permettant d'infliger une amende à un transporteur aérien débarquant sur le territoire français un ressortissant étranger non ressortissant d'un pays de la Communauté européenne - dépourvu de document de voyage et - le cas échéant - de visa - Champ d'application - Inclusion - Passager en transit en France en direction d'un Etat tiers.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Loi du 26 février 1992
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 20 bis


Composition du Tribunal
Président : M. Merloz
Rapporteur ?: Mme de Salins
Rapporteur public ?: M. Haïm

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2000-09-28;99pa00937 ?
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