(2ème chambre A)
VU, enregistré le 30 janvier 1998 au greffe de la cour, le recours présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement n s 9317262/1 et 9317248/1 en date du 5 juin 1997 en tant que le tribunal administratif de Paris a accordé à la société à responsabilité limitée Institut supérieur d'informatique et de management à l'informatique (IMI) la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1986 au 30 juin 1988 ainsi que des pénalités afférentes ;
2 ) de remettre intégralement l'imposition contestée à la charge de la société à responsabilité limitée IMI ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2000 :
- le rapport de M. MAGNARD, premier conseiller,
- les observations de la SCP DELPEYROUX, avocat, pour la société à responsabilité limitée IMI,
- et les conclusions de M. MORTELECQ, commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont la société à responsabilité limitée Institut supérieur d'informatique et de management de l'information (IMI) a fait l'objet au cours de l'année 1989, l'administration a remis en cause l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée à laquelle prétendait ladite société pour la période allant du 1er janvier 1986 au 30 juin 1988 et lui a notifié les rappels de taxes correspondants ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE fait appel du jugement du tribunal administratif de Paris qui, pour décharger la SARL IMI desdits rappels, s'est fondé sur le motif "qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire, et notamment du décret du 14 septembre 1956, que les établissements d'enseignement technique privé devraient être déclarés auprès du rectorat pour dispenser une formation initiale" ;
Considérant qu'aux termes de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition litigieuses : "Sont exonérés de taxe sur la valeur ajoutée - 4 ( ...) 4 a. Les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées, effectuées dans le cadre : ... de l'enseignement technique ou professionnel réglementé par la loi du 25 juillet 1919 et le décret du 14 septembre 1956" ; qu'aux termes de l'article 68 du décret du 14 septembre 1956 : "Toute personne qui veut ouvrir une école technique privée doit préalablement déclarer son intention au maire de la commune où elle veut s'établir et lui désigner le local. Le postulant adresse la même déclaration au préfet, au procureur de la République et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports" ; que ces dispositions font obligation aux établissements privés d'enseignement technique d'adresser une déclaration d'ouverture au ministre de l'éducation nationale, lequel est représenté, au sein de chaque académie, par le recteur ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a accordé à la société requérante la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au motif que l'administration ne pouvait légalement se fonder sur l'absence de déclaration auprès du rectorat pour refuser à la SARL IMI le bénéfice des dispositions précitées de l'article 261 du code général des impôts ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par la SARL IMI tant devant la cour que devant le tribunal administratif ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales : "L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation" ; que la notification de redressement adressée le 11 juillet 1989 à la SARL IMI mentionnait les motifs de droit et de fait justifiant la remise en cause de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée dont se prévalait la société ; qu'elle indiquait le mode de calcul et le montant des encaissements taxables d'une part au cours de l'exercice clos le 30 juin 1987, d'autre part, au cours de l'exercice clos le 30 juin 1988 ; qu'ainsi, la motivation permettait au contribuable de présenter ses observations, nonobstant la circonstance que le montant des encaissements taxables n'était pas déterminé année par année ; que la SARL IMI n'est, par suite, pas fondée à soutenir que la notification des redressements aurait été insuffisamment motivée ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.59 A du livre des procédures fiscales : "La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient : 1 ) Lorsque le désaccord porte soit sur le montant du bénéfice industriel et commercial, du bénéfice non commercial, du bénéfice agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition, soit sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application du 6 et du 1 du 7 de l'article 257 du code général des impôts ( ...)" ; que le différend qui opposait la société IMI et l'administration portait exclusivement sur la remise en cause du régime d'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'ainsi, il n'entrait pas dans le champ de la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires tel que définie par les dispositions précitées de l'article L.59 A du livre des procédures fiscales ; que, dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le refus de l'administration de saisir la commission méconnaîtrait les dispositions de l'article L.59 du même livre et porterait atteinte au caractère contradictoire de la procédure de redressement suivie à son encontre ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, si par courrier du 20 mars 1984, la SARL IMI a informé le recteur de l'académie de Paris de son intention d'ouvrir au mois de septembre suivant l'Institut supérieur d'informatique et de management de l'information, elle a averti le recteur par lettre du 10 avril 1986 qu'elle ne se consacrait plus à la formation première depuis juin 1985 et lui a demandé sa radiation de la liste des établissements supérieurs privés ; qu'ainsi, au cours de la période d'imposition litigieuse comprise entre le 1er janvier 1986 et le 30 juin 1988, elle n'avait déclaré aucune activité de formation initiale auprès des services du ministre chargé de l'éducation nationale ; que, par suite, ladite société ne saurait être regardée comme exerçant au cours des années en litige une activité réglementée par le décret du 14 septembre 1956 pour l'application des dispositions précitées de l'article 261-4-4 du code général des impôts concernant les établissements d'enseignement technique et professionnel ;
Considérant toutefois que la société IMI qui soutenait devant le tribunal administratif qu'elle assurait exclusivement des prestations de formation initiale, fait valoir pour la première fois en appel qu'elle devait être exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée en raison des prestations de formation professionnelle continue qu'elle dispensait au cours des années d'imposition litigieuses ;
Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : "I - Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ..." ; et qu'aux termes de l'article 261-4-4 a du même code, dans sa rédaction issue de la loi n 82-1126 du 29 décembre 1982, sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée "les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées, effectuées dans le cadre ... de la formation professionnelle continue assurée par les personnes morales de droit public, dans les conditions prévues par les articles L.900-1 et suivants du code du travail (livre IX) relatifs à la formation professionnelle continue dans le cadre de l'éducation permanente ..." ; que la société IMI, qui n'est pas une personne morale de droit public, ne peut prétendre bénéficier des dispositions précitées de l'article 261-4-4 ;
Considérant il est vrai que la société IMI fait valoir que les dispositions susrappelées de l'article 261-4-4 a du code général des impôts ne seraient pas compatibles avec les objectifs définis par l'article 13 de la 6ème directive n 77-388 du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 en tant qu'elles réservent aux organismes de droit public le bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée des prestations réalisées dans le cadre de la formation professionnelle continue ;
Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la 6ème directive précitée : "A - Exonérations en faveur de certaines activités d'intérêt général - 1 - Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : ... i) l'éducation de l'enfance et de la jeunesse, l'enseignement scolaire et universitaire, la formation ou le recyclage professionnel, ainsi que les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées, effectués par des organismes de droit public de même objet ou par d'autres organismes reconnus comme ayant des fins comparables par l'Etat membre concerné" ;
Considérant que les articles 256 et 261-4-4 du code général des impôts, en tant qu'ils prévoyaient l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des prestations de formation professionnelle continue assurées par tout organisme privé, même si les prestations délivrées étaient reconnues par l'Etat membre concerné, n'étaient pas conformes aux objectifs des dispositions du I) de l'article 13 A de la 6ème directive ;
Mais considérant qu'aux termes de l'article 920-4 du code du travail : "Toute personne physique et morale de droit privé qui entend diriger un organisme de formation ou prendre part à la direction d'un tel organisme en souscrivant des conventions ou des contrats de prestations de service ayant pour objet la formation professionnelle continue doit adresser aux services compétents de l'Etat et de la région une déclaration préalable" ; qu'il est constant qu'au cours des années d'imposition, les prestations de formation professionnelle continue réalisées par la société IMI n'avaient fait l'objet d'aucune déclaration à l'autorité administrative, sous quelque forme que ce soit ; que, notamment, la déclaration mentionnée à l'article 920-4 précité du code du travail n'avait pas été adressée aux services compétents de l'Etat et de la région ; qu'ainsi la SARL IMI ne saurait être regardée comme un organisme privé reconnu par l'Etat pour assurer des prestations de formation profesionnelle continue comparables à celles réalisées par les organismes de droit public ; que, par suite, la société IMI n'est en tout état de cause, pas fondée à se prévaloir des dispositions précitées de l'article 13 de la 6ème directive ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a accordé à la SARL IMI la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux ;
Article 1er : La taxe sur la valeur ajoutée à laquelle la société à responsabilité limitée IMI a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1986 au 30 juin 1988 et dont la décharge a été accordée par le tribunal administratif de Paris est remise intégralement à sa charge.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 5 juin 1997 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.