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25/01/2000 | FRANCE | N°95PA00148

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 25 janvier 2000, 95PA00148


(3ème Chambre A)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 2 février 1995, présentée pour Mme Danielle Y..., Mlles Virginie et Sandrine Y..., demeurant ..., par Me X..., avocat ; les consorts Y... demandent à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9108220/3 du 28 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à payer à Mme Y... la somme de 120.000 F et à chacune de ses filles la somme de 80.000 F, ces sommes devant être augmentées des intérêts au taux légal

et de la capitalisation de ceux-ci ;
2 ) de faire droit à leur demande...

(3ème Chambre A)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 2 février 1995, présentée pour Mme Danielle Y..., Mlles Virginie et Sandrine Y..., demeurant ..., par Me X..., avocat ; les consorts Y... demandent à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9108220/3 du 28 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à payer à Mme Y... la somme de 120.000 F et à chacune de ses filles la somme de 80.000 F, ces sommes devant être augmentées des intérêts au taux légal et de la capitalisation de ceux-ci ;
2 ) de faire droit à leur demande de première instance ;
3 ) de condamner l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris au paiement d'une somme de 15.000 F, en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 11 janvier 2000 :
- le rapport de M. DEMOUVEAUX, premier conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour les consorts Y... et celles du cabinet FOUSSARD, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris,
- et les conclusions de M. DE SAINT-GUILHEM, commissaire du Gouvernement ;

Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du professeur Z..., que M. Francis Y... a été admis à l'hôpital Raymond-Poincaré de Garches le 14 juin 1987 en raison d'une tuméfaction très importante de la cuisse droite rendant impossible l'exercice de la marche ; que le patient, qui présentait, en raison d'une cirrhose, d'importantes perturbations de la fonction hépatique, reçut un traitement par antibiotiques, interrompu pendant la période du 22 juin au 4 juillet 1987 ; que devant l'aggravation de l'hématome et une élévation thermique, il a été décidé, le 6 juillet 1987, de pratiquer une intervention chirurgicale afin de drainer l'hématome ; qu'à l'issue de cette opération, réalisée le 7 juillet 1987, se produisirent d'abondants saignements nécessitant une seconde opération, réalisée le même jour et au cours de laquelle M. Y... décéda d'un arrêt cardiaque ;
Considérant que si, en raison des problèmes de coagulation liés à la pathologie que présentait M. Y..., le service hospitalier n'a pas commis de faute en décidant de ne pas pratiquer immédiatement une intervention pour évacuer l'hématome dont souffrait le patient, l'interruption du traitement antibiotique qui a été décidée le 22 juin 1987, sans la moindre justification, alors que le malade restait fébrile et que son hématome persistait, est constitutive d'une faute ; qu'il était possible selon l'expert d'espérer la résorption de l'hématome par la poursuite du traitement par antibiotiques ; que la faute ainsi commise a été de nature à compromettre les chances que M. Y... pouvait avoir d'éviter l'intervention chirurgicale dont il a fait l'objet, intervention qui, en raison des troubles hépatiques dont était atteint le patient, présentait pour lui, et quelle que fût la manière dont elle pût être menée, des risques mortels ; que le lien de causalité entre cette faute et la perte pour M. Y... d'une chance d'éviter le risque qui s'est finalement réalisé étant ainsi établi, la responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris est engagée à l'égard des requérantes ;
Sur le préjudice :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation de la douleur morale éprouvée par la veuve et les filles de M. Y... en accordant une indemnité de 50.000 F à Mme Y... et de 25.000 F à chacune de ses filles ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérantes sont fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
Considérant que les consorts Y... ont droit aux intérêts sur les sommes précitées à compter du 23 mai 1991, jour de la réception par l'administration de leur réclamation préalable ; que la capitalisation de ces intérêts a été demandée les 7 août 1991, 28 juillet 1994 et 2 février 1995 ; qu'à la première et à la troisième de ces dates, il n'était pas dû une année d'intérêts ; que dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il n'y a lieu de faire droit qu'à la demande de capitalisation des intérêts présentée le 28 juillet 1994 ;
Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il convient de mettre à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris les frais d'expertise, arrêtés devant le tribunal administratif à la somme de 5.800 F ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à payer aux requérantes la somme de 15.000 F qu'elles demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 28 décembre 1994 est annulé.
Article 2 : L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris est condamnée à payer à Mme Danielle Y... la somme de 50.000 F, à Mlle Sandrine Y... la somme de 25.000 F, à Mlle Virginie Y... la somme de 25.000 F, chacune de ces sommes devant porter intérêts à compter du 23 mai 1991. Les intérêts échus le 28 juillet 1994 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Les frais d'expertise, d'un montant de 5.800 F sont mis à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.
Article 4 : L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris versera à Mme Danielle Y..., Mlles Sandrine et Virginie Y..., prises conjointement, la somme de 15.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 95PA00148
Date de la décision : 25/01/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-02-01-01-02-01-03 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITE POUR FAUTE MEDICALE : ACTES MEDICAUX - EXISTENCE D'UNE FAUTE MEDICALE DE NATURE A ENGAGER LA RESPONSABILITE DU SERVICE PUBLIC - CHOIX THERAPEUTIQUE


Références :

Code civil 1154
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. DEMOUVEAUX
Rapporteur public ?: M. DE SAINT-GUILHEM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2000-01-25;95pa00148 ?
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