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14/12/1999 | FRANCE | N°97PA02120

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 14 décembre 1999, 97PA02120


(3ème Chambre A)
VU l'arrêt en date du 22 septembre 1998 par lequel la cour, sur la requête du CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE, enregistrée sous le n 97PA02120 et tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris n 9416437/6 du 22 avril 1997, a ordonné une expertise aux fins de déterminer, au vu du dossier de M. Patrick X... : 1 ) si l'état de santé de celui-ci justifiait qu'il fut placé le 19 juin 1991 sous le régime de l'hospitalisation de nuit ; 2 ) si le suivi médical dont l'intéressé a fait l'objet entre le 19 juin et le 28 août 1991

était adapté à son état ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU ...

(3ème Chambre A)
VU l'arrêt en date du 22 septembre 1998 par lequel la cour, sur la requête du CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE, enregistrée sous le n 97PA02120 et tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris n 9416437/6 du 22 avril 1997, a ordonné une expertise aux fins de déterminer, au vu du dossier de M. Patrick X... : 1 ) si l'état de santé de celui-ci justifiait qu'il fut placé le 19 juin 1991 sous le régime de l'hospitalisation de nuit ; 2 ) si le suivi médical dont l'intéressé a fait l'objet entre le 19 juin et le 28 août 1991 était adapté à son état ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 novembre 1999 :
- le rapport de M. RATOULY, président,
- les observations de la SCP CELICE-BLANCPAIN, avocat au Conseil d'Etat et la Cour de cassation, pour le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE et celles de Me E..., avocat, pour les consorts C... et autres,
- et les conclusions de Mme HEERS, commissaire du Gouvernement ;

Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par le président de la cour, que M. X... a fait l'objet de plusieurs placements d'office de longue durée auprès du CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE de 1981 à 1986 ; que, dès 1981, année au cours de laquelle il a blessé grièvement deux infirmiers et a dû être transféré à l'unité pour malades difficiles du centre spécialisé de Cadillac (Gironde), M. X..., atteint d'un délire de persécution, était considéré comme un malade dangereux ; qu'apr s 1986 et jusqu'en 1991, M. X... a effectué, au titre de l'hospitalisation volontaire, dix-huit séjours aupr s du CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE ; que le dernier de ces séjours a eu lieu du 19 juin au 28 août 1991, date à laquelle M. X... s'est rendu au domicile de sa mère et, armé d'une carabine qu'il venait d'acheter, a tiré à travers la porte de l'appartement voisin occupé par la famille C..., tuant trois personnes adultes dont Mme Claudine C..., avant de pénétrer de force dans l'appartement, d'y retenir en otages plusieurs personnes et d'être finalement abattu par les forces de police, le 29 août au matin ;
Considérant qu'il ressort encore du rapport d'expertise que si l'état clinique de M. X... pouvait, le 19 juin 1991, justifier son admission au régime de l'hospitalisation de nuit en vue de faciliter une éventuelle réinsertion sociale par les sorties autorisées dans la journée, une brusque aggravation de son état mental avait été signalée au soir du 24 ao t 1991 par l'interne de garde qui notait, chez l'intéressé, les manifestations d'une forte angoisse et la reprise de ses délires ; qu'une telle observation, dont il ne résulte pas des pi ces du dossier qu'elle ait été portée la connaissance du médecin référent de M. X..., n'a donné lieu aucune suite de la part des responsables de l'unité de soins, alors qu'elle aurait d , selon l'expert, provoquer un renforcement tant du traitement médical que des conditions de surveillance appliqués au malade ; que l'abstention ainsi caractérisée doit tre regardée, eu égard aux antécédents médicaux de M. X..., comme ayant favorisé le passage l'acte auquel s'est livré le malade le 28 ao t 1991 ; que, dès lors, le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard des consorts C... et autres ;
Sur la réparation :
Considérant qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par Mme Henriette C..., mère de Mme Claudine C... et par Mlle Alexandra C..., fille de la victime, âgée de neuf ans au moment des faits, en condamnant le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE à payer à Mme Henriette C... les sommes de 70.000 F pour elle-même et 60.000 F en sa qualité de tutrice de sa petite fille ; que, compte tenu des revenus de la victime, le préjudice matériel d'Alexandra C... doit être évalué à 100.000 F ; qu'il y a également lieu de rembourser Mme Henriette C... de frais d'obs ques qui s'él vent 12.266 F ;

Considérant qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par le père de la victime, M. Claude C..., en condamnant le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE à lui payer la somme de 70.000 F ; qu'il y a lieu de fixer 20.000 F le préjudice moral de Mmes Martine F... et Jacqueline C..., B... Cécile Gautier et M. Serge Z..., Mme Dominique C... et M. Gérard C... ainsi que Mme Aurélia C... épouse Y... et Melle Angélique C..., fr res et soeurs de Mme Claudine C... ;
Considérant que M. Pascal A... vivait maritalement avec Mme Claudine C..., dont il a eu un enfant, Romain D..., aujourd'hui sa charge ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi par lui-même et son fils en condamnant le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE à lui payer les sommes de 70.000 F pour lui-même et 60.000 F en sa qualité de représentant légal de son fils ; que, compte tenu des revenus de la victime, le préjudice matériel subi par le jeune Romain D... doit être évalué à 100.000 F ;
Considérant qu'outre le préjudice moral ci-dessus mentionné, Mme Dominique C..., blessée puis retenue en otage par M. X..., a subi un dommage corporel et un traumatisme psychologique qui justifient l'attribution supplémentaire d'une somme de 250.000 F ; que le préjudice de caract re psychologique également éprouvé par M. Gérard C... et Mme Céline C..., eux aussi retenus en otages dans la nuit du 28 au 29 ao t 1991, sera réparé par l'attribution chacun d'une somme de 200.000 F qui, pour M. Gérard C... viendra s'ajouter aux 20.000 F, accordés au titre du préjudice moral ;
Sur les intérêts et leur capitalisation :
Considérant que les requérants ont droit aux intérêts sur les sommes fixées ainsi qu'il est dit ci-dessus à compter du 13 juillet 1994, date de réception de leur demande préalable ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 14 décembre 1995 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Sur les conclusions des consorts C... et autres tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE à payer aux consorts C... et autres la somme de 25.000 F au titre des frais exposés par eux en première instance et en appel et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE est condamné à payer à Mme Henriette C... les sommes de 82.266 F pour elle-même et 160.000 F en sa qualité de tutrice de sa petite fille, Alexandra C..., et à M. Claude C... la somme de 70.000 F. Le m me centre hospitalier est condamné verser M. Pascal A... les sommes de 70.000 F pour lui-même et 160.000 F en sa qualité de représentant légal de son fils Romain D.... Il versera également à Mmes Aurélia C... épouse Y..., Martine F... et Jacqueline C..., Melles Angélique C... et Cécile Z... et M. Serge Z..., la somme de 20.000 F chacun.
Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE est condamné à payer à Mme Dominique C... la somme de 270.000 F, M. Gérard C... la somme de 220.000 F et Mme Céline C... la somme de 200.000 F.
Article 3 : Le CENTRE HOSPITALIER SPECIALISE DE MAISON BLANCHE est condamné payer aux consorts C... la somme de 25.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Les sommes mentionnées aux articles 1 et 2 ci-dessus porteront intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 1994. Les intérêts échus le 14 décembre 1995 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts
Article 5 : Le surplus des conclusions des consorts C... est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 97PA02120
Date de la décision : 14/12/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-02-01-01-005-01 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION - RESPONSABILITE SANS FAUTE - SORTIES D'ESSAI DES MALADES MENTAUX


Références :

Code civil 1154
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. RATOULY
Rapporteur public ?: Mme HEERS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1999-12-14;97pa02120 ?
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