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18/11/1999 | FRANCE | N°97PA00790

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4e chambre, 18 novembre 1999, 97PA00790


VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 27 mars 1997 sous le n 97PA00790, présentée pour la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE (SAE), venant aux droits de la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE (SAEP), dont le siège est ..., représentée par son directeur général, par la SCP NABA et associés, avocats ; la Société SAE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 852589 en date du 20 décembre 1996 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de recettes émis à son encontre par la trésor

erie générale des Yvelines le 11 octobre 1985 à fin de recouvrement d...

VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 27 mars 1997 sous le n 97PA00790, présentée pour la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE (SAE), venant aux droits de la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE (SAEP), dont le siège est ..., représentée par son directeur général, par la SCP NABA et associés, avocats ; la Société SAE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 852589 en date du 20 décembre 1996 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de recettes émis à son encontre par la trésorerie générale des Yvelines le 11 octobre 1985 à fin de recouvrement d'une somme de 1.085.189,85 F et à ce que la société Petit et Lenat soit déclarée seule responsable du sinistre survenu au lycée Jules Y... de Versailles et soit condamnée à garantir la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE de toutes sommes mises à sa charge ;
2 ) d'annuler le titre de recettes émis par l'administration à l'encontre de la SOCIETE AUXILAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE et débouter l'administration de toutes ses demandes en la renvoyant à mieux se pourvoir à l'encontre de la société Petit et Lenat ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des marchés publics ;
VU le cahier des clauses administratives générales ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 novembre 1999 :
- le rapport de Mme de SALINS, premier conseiller,
- les observations de la SCP NABA et associés, avocat, pour la société SAE et celles de Me X..., avocat, pour la société Petit et Lenat,
- et les conclusions de M. LAMBERT, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que par acte d'engagement du 9 août 1978, le ministère de l'éducation nationale, agissant en qualité de maître d'ouvrage délégué par la commune de Versailles, a confié à un groupement d'entreprises conjoint ayant pour mandataire la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE, des travaux de reconstruction et d'extension du lycée technique Jules Y... à Versailles ; qu'à la suite d'un incendie survenu dans la nuit du 5 au 6 novembre 1981 dans le lycée technique Jules Y... pendant l'exécution de ce marché, des travaux supplémentaires ont dû être effectués et ont été confiés au groupement d'entreprises chargé des travaux de rénovation ; qu'ils se sont élevés à un coût de 1.085.189,85 F avancés par la commune de Versailles ; que, dans le décompte général du marché de travaux conclu le 9 août 1978 qui a été notifié le 10 septembre 1984 à la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE, mandataire commun du groupement d'entreprises, le maître d'ouvrage délégué par la commune a imputé au groupement le montant desdits travaux ; que, par lettre en date du 18 octobre 1984, la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE a indiqué former une réclamation concernant l'imputation desdits travaux au motif qu'ils auraient dû être imputés à la seule entreprise responsable du sinistre ; que la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE ayant à deux reprises refusé de désigner la ou les entreprises entre lesquelles il convenait de répartir cette somme, le ministre de l'éducation nationale a rejeté sa réclamation par lettre du 14 juin 1985, un titre de recettes portant recouvrement de la somme de 1.085.189,85 F étant émis le 11 octobre 1985 ; que la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE, venant aux droits de la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE, fait appel du jugement en date du 20 décembre 1996 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE tendant à l'annulation de ce titre de recettes ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que, pour rejeter les conclusions dirigées contre l'imputation à la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE de la totalité des travaux supplémentaires liés à la remise en état du lycée à la suite de l'incendie survenu dans la nuit du 5 au 6 novembre 1981, les premiers juges se sont fondés sur le refus de la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE de procéder à la répartition du montant desdits travaux entre les entreprises du groupement et non sur l'absence de réclamation dans les formes prévues à l'article 13-44 précité du cahier des clauses administratives générales ; que ce n'est qu'en tant que la demande de première instance comportait, à titre subsidiaire, une contestation du montant des travaux imputés qu'ils ont opposé l'absence d'une telle réclamation portant sur ledit montant ; qu'en appel, la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE ne conteste plus que le principe de l'imputation sans présenter de conclusions incidentes relatives à son montant ; que, dans ces conditions, elle ne peut utilement faire grief aux premiers juges de lui avoir opposé l'absence de réclamation dans les délais à sa contestation du montant des sommes mises à sa charge ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'aux termes de l'article 13-44 du cahier des clauses administratives générales : "L'entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d' uvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. Ce délai est de ... quarante-cinq jours dans le cas où le délai d'exécution du marché est supérieur à six mois. ../ Si la signature du décompte général est refusée ou donnée avec réserves les motifs de ce refus ou des réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant, sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas fait l'objet d'un règlement définitif. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50 ..." ;
Considérant que si, en appel, les défendeurs soutiennent que l'ensemble de la demande de première instance était irrecevable faute d'une réclamation conforme aux prescriptions de l'article 13-44 du cahier des clauses administratives générales, il convient de relever qu'eu égard aux particularités de l'élément du décompte général contesté et au motif de cette contestation, la lettre en date du 18 octobre 1984 constitue bien une réclamation au sens de l'article 13-44 susmentionné du cahier des clauses administratives générales ; que cette fin de non recevoir doit, par suite, être rejetée ;
Sur le principe de l'imputation à la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE des travaux liés à la remise en état du lycée :

Considérant que l'article 18.1 du cahier des clauses administratives générales prévoit qu'il n'est alloué à l'entrepreneur aucune indemnité au titre des pertes, avaries ou dommages causés par sa négligence, son imprévoyance, son défaut de moyens ou ses fausses manoeuvres ; qu'aux termes de l'article 35 du cahier des clauses administratives générales : "L'entrepreneur a, à l'égard du maître de l'ouvrage, la responsabilité pécuniaire des dommages causés aux personnes et aux biens par la conduite des travaux ou les modalités de leur exécution, sauf s'il établit que cette conduite ou ces modalités résultent nécessairement de stipulations du marché ou de prescriptions d'ordre de service, ou sauf si le maître de l'ouvrage, poursuivi par le tiers victime de tels dommages, a été condamné sans avoir appelé l'entrepreneur en garantie devant la juridiction saisie ... " ; qu'en vertu de l'article 2, paragraphe 31, du même cahier : " ...Les entrepreneurs groupés sont conjoints lorsque, les travaux étant divisés par lots dont chacun est assigné à l'un des entrepreneurs, chacun d'eux est engagé par le ou les lots qui lui sont assignés ; l'un d'entre eux, désignés dans l'acte d'engagement comme mandataire, est solidaire de chacun des autres dans les obligations contractuelle de celui-ci à l'égard du maître de l'ouvrage jusqu'à la date définie au 1 de l'article 44, à laquelle ces obligations prennent fin. Le mandataire représente, jusqu'à la date ci-dessus, l'ensemble des entrepreneurs conjoints, vis à vis du maître de l'ouvrage, de la personne responsable du marché et du maître d' uvre pour l'exécution du marché. Il assure sous sa responsabilité la coordination de ces entrepreneurs en assurant les tâches d'ordonnancement et de pilotage des travaux ..." ; qu'il résulte de ces dispositions que, dans le cadre d'un groupement d'entrepreneurs conjoints, le mandataire des entrepreneurs demeure solidairement responsable de l'ensemble des entreprises du groupement jusqu'à la date définie au 1 de l'article 44 ; que, toutefois, cette solidarité du mandataire ne porte que sur les obligations contractuelles des entreprises du groupement ;
Considérant qu'en l'espèce, la réparation des conséquences du sinistre lié à l'incendie qui s'est déclenché pendant la durée des travaux de rénovation n'est, en tout état de cause, pas susceptible de se rattacher à la responsabilité contractuelle de l'une des entreprises du groupement dans l'exécution du marché ; que, dans ces conditions, le ministre de l'éducation nationale ne pouvait pas poursuivre auprès de la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE le recouvrement desdites sommes en sa qualité de mandataire ; qu'en conséquence, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, le titre de recettes en date du 11 octobre 1985 doit être annulé ; que, dès lors et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'appel en garantie qu'elle a formé à titre subsidiaire contre l'entreprise Petit et Lenat, la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en tant qu'elle était dirigée contre ce titre de recettes ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que la commune de Versailles se retourne contre l'entreprise Petit et Lenat ; que, par suite, les conclusions de la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE tendant à ce qu'il soit enjoint au maître d'ouvrage de se retourner contre l'entreprise Petit et Lenat ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur l'appel incident de la commune :
Considérant que, dès lors qu'il est fait droit à la requête de la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE tendant à l'annulation du titre de recettes en date du 11 octobre 1983, les conclusions présentées à titre incident par la commune de Versailles et tendant à ce que soit mis à la charge de la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE les sommes correspondant à la capitalisation des intérêts dus par la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE depuis le 10 septembre 1984 ne peuvent qu'être rejetées ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles en date du 20 décembre 1996 est annulé.
Article 2 : Le titre de recettes émis le 11 octobre 1985 par le trésorier général des Yvelines à l'encontre de la SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE DE LA REGION PARISIENNE est annulé.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et l'appel incident de la commune de Versailles sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 97PA00790
Date de la décision : 18/11/1999
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-02 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE, L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE CONTRACTUELLE -Réparation d'un sinistre survenu lors du déroulement des travaux objet du marché - Possibilité de mettre en cause le mandataire commun du groupement d'entreprises conjoint - Absence dès lors que la réparation du sinistre n'est pas susceptible de se rattacher aux obligations contractuelles d'un membre du groupement.

39-06-01-02 La réparation d'un sinistre qui est survenu lors de l'exécution d'un marché de rénovation du lycée technique Jules Ferry à Versailles n'est pas susceptible de se rattacher aux obligations contractuelles de l'une quelconque des entreprises qui ont participé à ce marché. Or la solidarité du mandataire commun d'un groupement d'entreprises conjoint ne porte que sur les obligations contractuelles des entreprises membres du groupement. En conséquence, le maître d'ouvrage ne peut pas légalement se fonder sur la responsabilité solidaire qui pèse sur l'entreprise mandataire commun du groupement conjoint d'entreprises qui a réalisé les travaux de rénovation pour la poursuivre en vue d'obtenir le remboursement des frais de réparation du sinistre.


Composition du Tribunal
Président : M. Merloz
Rapporteur ?: Mme de Salins
Rapporteur public ?: M. Lambert

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1999-11-18;97pa00790 ?
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