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04/11/1999 | FRANCE | N°97PA00767

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5e chambre, 04 novembre 1999, 97PA00767


VU, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel le 25 mars 1997, la requête présentée pour M. Yves Joël X..., domicilié ..., par la société ABAQUE et PARTNERS ; M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler l'article 2 du jugement n 9314796/1 en date du 22 octobre 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté la contestation qu'il a forméecontre l'avis à tiers détenteur décerné à son encontre le 30 juin 1993 auprès du centre des chèques postaux de Paris par le trésorier principal de Paris (18ème arrondissement ; 1ère division) pour avoir paiement

d'une somme de 672.702 F correspondant à des pénalités fiscales établie...

VU, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel le 25 mars 1997, la requête présentée pour M. Yves Joël X..., domicilié ..., par la société ABAQUE et PARTNERS ; M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler l'article 2 du jugement n 9314796/1 en date du 22 octobre 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté la contestation qu'il a forméecontre l'avis à tiers détenteur décerné à son encontre le 30 juin 1993 auprès du centre des chèques postaux de Paris par le trésorier principal de Paris (18ème arrondissement ; 1ère division) pour avoir paiement d'une somme de 672.702 F correspondant à des pénalités fiscales établies, en application de l'article 1763 A du code général des impôts, au nom de la société à responsabilité limitée Sadima au titre des années 1979, 1980 et 1981 ;
2 ) de le décharger de ces pénalités ainsi que de l'obligation de les payer ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 15.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 1999 :
- le rapport de M. BOSSUROY, premier conseiller,
- les observations de la SCP GUIGUET, BACHELLIER, DE LA VARDE, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour M. X...,
- et les conclusions de M. HAIM, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que M. X... a été recherché par le trésorier principal du 18ème arrondissement de Paris - 1ère division en paiement d'une somme de 672.702 F correspondant aux pénalités pour distributions occultes auxquelles la société à responsabilité limitée Sadima, dont il était le dirigeant, a été assujettie, en application des dispositions de l'article 1763 A du code général des impôts, au titre des années 1979, 1980 et 1981 ; qu'à cette fin un commandement de payer lui a été décerné le 13 avril 1989 ; qu'à la suite d'une saisie mobilière, un procès-verbal de carence a été dressé par l'huissier du Trésor public le 4 avril 1990 ; qu'enfin, un avis à tiers détenteur a été délivré à son encontre le 30 juin 1993 auprès du centre des chèques postaux de Paris ; que M. X... demande à être déchargé de ces pénalités, ainsi que de l'obligation de les payer ;
Sur les conclusions tendant à la décharge des pénalités :
Considérant que si un contribuable est recevable, dès lors que le paiement de la pénalité prévue par l'article 1763 A du code général des impôts lui est réclamé du seul fait de sa responsabilité solidaire, à en demander la décharge et à en contester, à cette occasion, l'exigibilité à son égard, il résulte de l'instruction que le requérant, dans le présent litige, n'a contesté que l'obligation de payer résultant de l'avis à tiers détenteur attaqué, une réclamation d'assiette ayant par ailleurs été présentée au directeur des services fiscaux afin d'obtenir décharge de cette pénalité ; que les conclusions à fin de décharge, présentées directement devant la cour, sont en conséquence irrecevables ;
Sur les conclusions tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant de l'avis à tiers détenteur du 30 juin 1993 :
Sur le terrain de la loi :
En ce qui concerne le moyen tiré de la prescription de l'action en recouvrement :
Considérant qu'aux termes de l'article L.274 du livre des procédures fiscales : "Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle, perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription" ;
Considérant , en premier lieu , que si M. X... allègue que des irrégularités ont entaché la forme tant du commandement qui lui a été décerné le 13 avril 1989 que celle du procès-verbal de carence du 4 avril 1990, il n'appartient qu'au juge judiciaire, devant être saisi dans les conditions fixées par les articles L.281 et R.281-1 à R.281-4 du livre des procédures fiscales, d'apprécier la validité en la forme de ces actes de poursuites ; qu'il n'est ni établi, ni même allégué que M. X... aurait fait opposition à ce commandement et à ce procès-verbal de carence de saisie devant le juge judiciaire ;

Considérant, en deuxième lieu, que s'il appartient au juge administratif, seul compétent en vertu de l'article L.281 du livre des procédures fiscales pour connaître des contestations portant sur l'exigibilité des sommes réclamées, d'apprécier si un acte de poursuites antérieur à celui qui a provoqué la réclamation du contribuable a pu, eu égard aux conditions dans lesquelles il a été signifié ou notifié à ce dernier, interrompre le cours de la prescription prévue par les dispositions précitées de l'article L.274 du livre des procédures fiscales, M. X... se borne, à cet égard, à faire valoir que le commandement dont s'agit "n'indique ni la date, ni la forme de sa signification ou de sa notification" et que le constat de carence "ne porte aucune mention de sa signification ou de sa notification", sans formuler à l'encontre de ces actes, qu'il ne conteste pas avoir reçus, de grief précis de nature à établir qu'ils ne lui auraient pas été régulièrement décernés ; que ces divers moyens doivent, en conséquence, être écartés ;
Considérant, enfin que, contrairement à ce que soutient l'intéressé, la saisie mobilière diligentée le 18 janvier 1990 à son encontre a valablement interrompu le cours de la prescription, la circonstance qu'elle se soit traduite par un procès-verbal de carence étant, à cet égard, indifférente ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, tant le commandement que le procès-verbal de carence ayant régulièrement interrompu la prescription, M. X... n'est pas fondé à soutenir qu'à la date du 30 juin 1993 à laquelle l'avis à tiers détenteur délivré auprès du centre des chèques postaux de Paris a été notifié, l'action en recouvrement des pénalités en litige était prescrite ;
En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de lettre de rappel :
Considérant qu'aux termes de l'article L.255 du livre des procédures fiscales : "Lorsque l'impôt n'a pas été payé à la date limite de paiement et à défaut d'une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement avec constitution de garanties dans les conditions prévues par l'article L.277, le comptable du Trésor chargé du recouvrement doit envoyer au contribuable une lettre de rappel avant la notification du premier acte de poursuites devant donner lieu à des frais" ; qu'aux termes de l'article R. 281-2 du même livre : "La demande prévue par l'article R.281-1 doit, sous peine de nullité, être présentée au trésorier-payeur général dans un délai de deux mois à partir de la notification de l'acte si le motif invoqué est un vice de forme ou, s'il s'agit de tout autre motif, dans un délai de deux mois après le premier acte qui permet d'invoquer ce motif" ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la contestation par un redevable de l'exigibilité d'un impôt pour le motif tiré de l'absence d'envoi d'une lettre de rappel préalablement aux poursuites ne peut être formée que dans le délai de deux mois après le premier acte qui permet de soulever ce motif ;

Considérant que le premier acte de poursuite permettant à M. X... d'invoquer le défaut de notification de la lettre de rappel prévue à l'article L.255 du livre des procédures fiscales est le commandement qui lui a été adressé le 13 avril 1989 ; que M. X... n'a pas invoqué le défaut de lettre de rappel dans la contestation qu'il a soulevée contre cet acte ; que, dès lors, en application des dispositions précitées de l'article R.281-2 du même livre, celui-ci n'est plus recevable à faire valoir ce même moyen à l'encontre de l'avis à tiers détenteur du 30 juin 1993 ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la production tardive de la créance auprès du syndic chargé du règlement judiciaire de la société à responsabilité limitée Sadima :
Considérant qu'aux termes de l'article 1763 A du code général des impôts : "Les sociétés et autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une pénalité fiscale calculée en appliquant au montant des sommes versées ou distribuées le double du taux maximum de l'impôt sur le revenu. Lorsque l'entreprise a spontanément fait figurer dans sa déclaration de résultat le montant des sommes en cause, le taux de la pénalité est ramené à une fois et demie ce taux maximum. Les dirigeants sociaux mentionnés aux articles 62 et 80 ter b-1 , 2 et 3 , ainsi que les dirigeants de fait sont solidairement responsables du paiement de cette pénalité, qui est établie et recouvrée comme en matière d'impôt sur le revenu" ;
Considérant que la société à responsabilité limitée Sadima, dont M. X... était le dirigeant, a été déclarée en règlement judiciaire par le tribunal de commerce de Paris le 14 janvier 1985 ; que les circonstances que le comptable du Trésor ait produit tardivement la créance relative aux pénalités fiscales en litige auprès du syndic chargé du règlement judiciaire et que la clôture des opérations d'apurement collectif ait été ensuite prononcée ne font pas obstacle à ce que le comptable du Trésor puisse poursuivre le recouvrement des pénalités en cause auprès de M. X... dès lors que l'extinction de la créance à l'égard du débiteur faisant l'objet d'une procédure collective laisse subsister l'obligation distincte à la charge du codébiteur solidaire ; que M. X... demeure donc, en sa qualité de dirigeant de la société, solidairement responsable du paiement des pénalités en application des dispositions précitées de l'article 1763 A du code général des impôts ;
En ce qui concerne les autres moyens invoqués sur le terrain de la loi :

Considérant qu'aux termes de l'article L.281 du livre des procédures fiscales : "Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L.252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. Les contestations ne peuvent porter que : 1 Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; 2 Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L.199." ;
Considérant que M. X... fait valoir, d'une part, qu'aucune demande régulière de désignation des bénéficiaires des distributions de bénéfices n'a été adressée à la société à responsabilité limitée Sadima, d'autre part, que la procédure de motivation des pénalités fiscales en litige est irrégulière et, enfin, que les pénalités fiscales appliquées étaient prescrites à la date de la notification de redressements adressée à la société ; que de tels moyens sont relatifs à l'assiette des pénalités en litige ; que, dès lors, en application des dispositions précitées de l'article L.281 du livre des procédures fiscales, ils ne sont pas recevables à l'appui d'une contestation relevant du contentieux du recouvrement desdites pénalités ;
Sur le terrain de la doctrine administrative :
Considérant que M. X... fait valoir qu'en méconnaissance d'une instruction administrative du 6 septembre 1988, référencée 12-C-20-88, le comptable du Trésor n'a pas obtenu l'autorisation de son supérieur hiérarchique préalablement à l'engagement des poursuites à son encontre ; que cette instruction concerne exclusivement la mise en oeuvre des actions en responsabilité solidaire prévues par les articles L.266 et L.267 du livre des procédures fiscales ; que la responsabilité de M. X... ayant été mise en cause sur le fondement de l'article 1763 A du code général des impôts, le requérant ne peut utilement, en tout état de cause, invoquer la doctrine administrative résultant de cette instruction ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 97PA00767
Date de la décision : 04/11/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-05-02,RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - RECOUVREMENT - PAIEMENT DE L'IMPOT -Solidarité - Extinction de la créance du Trésor sur la société redevable de pénalités pour distributions occultes du fait de sa production tardive au passif de la procédure collective - Influence sur l'obligation du dirigeant, débiteur solidaire - Absence.

19-01-05-02 La tardiveté de la déclaration de la créance du Trésor (pénalité de l'article 1763 A) lors de la procédure de redressement judiciaire de la société, entraîne l'extinction de cette créance à l'égard de la société, mais cette extinction laisse subsister l'obligation distincte du dirigeant solidaire.


Références :

CGI 1763 A
CGI Livre des procédures fiscales L274, L281, R281-1 à R281-4, L255, R281-2, L266, L267
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Instruction du 06 septembre 1988 12C-20-88

1. Comp. Cass. Com., 1993-01-19, Bonfanti et Soinne, Bull. civ IV, n° 25


Composition du Tribunal
Président : Mme Camguilhem
Rapporteur ?: M. Bossuroy
Rapporteur public ?: M. Haim

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1999-11-04;97pa00767 ?
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