(3ème chambre A)
VU la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés au greffe de la cour les 15 mai et 27 juillet 1998, présentés pour la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME, dont le siège est au 5, rue de Rome, 93561 Rosny-sous-Bois Cedex, par Me ODENT, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n s 9702280/6 et 9702281/6 du 9 décembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé la décision en date du 24 septembre 1996 du conseil fédéral d'appel de la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME ayant suspendu M. X... pour une durée de trois ans ;
2 ) de rejeter la demande présentée au tribunal administratif de Paris par M. X... ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n 84-610 du 16 juillet 1984 ;
VU la loi n 89-432 du 28 juin 1989 ;
VU le décret n 92-381 du 1er avril 1992 ;
VU l'arrêté interministériel du 7 octobre 1994 ;
VU le règlement intérieur de la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 septembre 1999 :
- le rapport de M. RATOULY, président,
- les observations de Me ODENT, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME, celles de la SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour M. X... et celles de Me CHIRON, avocat, pour la ministre de la jeunesse et des sports,
- et les conclusions de Mme HEERS, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que, par la décision contestée en date du 24 septembre 1996, le conseil fédéral d'appel de la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME (FFC) a prononcé, à l'encontre de M. X..., médecin licencié de la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME et membre du comité directeur de cette fédération, la sanction de suspension pour trois ans ferme au motif qu'il aurait prescrit des produits dopants à deux coureurs cyclistes professionnels ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er-I de la loi du 28 juin 1989 susvisée : "Il est interdit à toute personne d'utiliser, au cours des compétitions et manifestations sportives organisées ou agréées par les fédérations sportives ou en vue d'y participer, les substances et les procédés qui, de nature à modifier artificiellement les capacités ou à masquer l'emploi de substances ou de procédés ayant cette propriété, sont déterminés par arrêté conjoint des ministres chargés des sports et de la santé. Dans les mêmes conditions, il est interdit, sans préjudice du principe de la liberté de prescription à des fins thérapeutiques, d'administrer les substances définies au précédent alinéa ou d'appliquer les procédés visés à cet alinéa, d'inciter à l'usage de telles substances ou de tels procédés ou de faciliter leur utilisation. Le médecin qui, à des fins thérapeutiques, prescrit un traitement à une personne est tenu, à la demande de celle-ci, de lui indiquer si ce traitement fait appel à des substances ou des procédés interdits en vertu du premier alinéa du présent article" ; que selon l'article 16 du même texte : "Les fédérations sportives visées au troisième alinéa de l'article 16 de la loi n 84-610 du 16 juillet 1984 doivent adopter dans leur règlement des dispositions définies par décret en Conseil d'Etat et relatives aux contrôles organisés en application de l'article 4 de la présente loi et aux sanctions disciplinaires infligées, individuellement ou collectivement, aux membres licenciés des fédérations ou aux membres licenciés des groupements sportifs affiliés aux fédérations qui ont contrevenu aux dispositions de l'article 1er de la présente loi" ;
Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret susvisé du 1er avril 1992 : "Le règlement institue une commission d'interprétation médicale composée de trois médecins choisis par la fédération, sous réserve qu'ils n'aient aucune responsabilité au sein de celle-ci, sur une liste nationale arrêtée par le ministre chargé des sports et le ministre chargé de la santé. Il précise que cette commission donne son avis sur les justifications thérapeutiques invoquées ..." et qu'aux termes de l'article 148 du règlement intérieur de la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME " ... Lorsque l'intéressé a fait valoir des justifications thérapeutiques, le représentant de la fédération chargé de l'instruction saisit sans délai la commission médicale d'interprétation ..." ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que, par deux ordonnances en date des 26 octobre et 14 novembre 1995, le docteur X..., médecin licencié de la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME, a prescrit à deux coureurs cyclistes professionnels des substances dont l'administration est interdite dans les conditions fixées par les dispositions précitées de l'article 1er-I de la loi du 28 juin 1989 ; que, toutefois, M. X... ayant fait valoir que ces substances avaient été prescrites à des fins thérapeutiques, il appartenait, en application des dispositions législatives et réglementaires ci-dessus rappelées, à la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME, avant toute décision de sanction, de saisir la commission médicale d'interprétation prévue à l'article 7 précité du décret du 1er avril 1992, sans que puisse faire échec à cette obligation le fait que l'arrêté du 7 octobre 1994 relatif aux substances et aux procédés mentionnés à l'article 1er-I de la loi du 28 juin 1989 ait, en méconnaissance du principe de la liberté de prescriptions à des fins thérapeutiques, déterminé une catégorie de substances dont l'utilisation ne pourrait pas faire l'objet de justifications thérapeutiques ; qu'il est constant que l'avis de la commission médicale d'interprétation n'a pas été recueilli en l'espèce ; qu'ainsi, la sanction prise à l'encontre de M. X..., intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière, est illégale ; que, par suite, la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision susmentionnée du 24 septembre 1996 ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME à payer à M. X... la somme de 10.000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME est rejetée.
Article 2 : La FEDERATION FRANCAISE DE CYCLISME versera la somme de 10.000 F à M. X... au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.