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08/04/1999 | FRANCE | N°97PA01812

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 08 avril 1999, 97PA01812


VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 11 juillet 1997, présentée pour M. Bernard A..., demeurant ..., par Me Y..., avocat ; M. A... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n 954896 en date du 10 janvier 1997 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 août 1995 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement ;
2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code du travail ;
VU la loi n 95-884 du 3 août 1995 ;


VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel...

VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 11 juillet 1997, présentée pour M. Bernard A..., demeurant ..., par Me Y..., avocat ; M. A... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n 954896 en date du 10 janvier 1997 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 août 1995 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement ;
2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code du travail ;
VU la loi n 95-884 du 3 août 1995 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 1999 :
- le rapport de M. BATAILLE, premier conseiller,
- les observations de Me X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la Caisse d'Epargne Ile-de-France Ouest,
- et les conclusions de Mme PHEMOLANT, commissaire du Gouver-nement ;

Considérant qu'en vertu de l'article L.425-1 du code du travail, les délégués du personnel bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;
Sur le caractère fautif des faits reprochés :
Considérant que la décision du 2 août 1995 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé le licenciement de M. A..., attaché commercial de la Caisse d'Epargne Ile-de-France Ouest, affecté à l'agence de Bois-d'Arcy, délégué du personnel, est fondée sur les motifs que M. A... a obtenu au cours de l'année 1994 une libéralité d'un montant de 70.000 F d'une de ses clientes, Mme Z..., alors âgée de 91 ans, a géré ses comptes et lui a ouvert deux plans d'épargne populaire, l'un le 10 décembre 1990 et l'autre le 19 mai 1995, en violation de la réglementation bancaire et du règlement intérieur de l'entreprise, pris en son article 10-5 prévoyant une obligation de neutralité dans le service rendu aux clients ;
Considérant que la circonstance que ladite décision ne précise pas que les comptes gérés directement par M. A... sont ceux que Mme Z... détenait dans un autre établissement bancaire et non à la Caisse d'Epargne, est sans influence sur la légalité de ladite décision ; qu'à cette réserve inopérante près, l'ensemble des faits susrappelés est constant ; qu'il résulte des circonstances de l'espèce que c'est en vain que l'intéressé prétend avoir ouvert les deux comptes précités par simple erreur ; que, dans ces conditions, M. A... doit être regardé comme ayant abusé de sa position professionnelle auprès de Mme Z... par des agissements fautifs présentant un caractère de gravité suffisante à justifier l'autorisation de licenciement contestée ;
Considérant que la demande d'autorisation de licenciement ne peut être regardée comme étant en rapport avec les fonctions représentatives de M. A... ;
Sur la procédure :
Considérant qu'aux termes de l'article L.122-44 du code du travail : "Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ..." ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que si la Caisse d'Epargne a eu un entretien avec Mme Z... dès le début du mois de janvier 1995, cet établissement a décidé d'ouvrir une enquête interne dont M. A... a été informé par courrier du 17 janvier 1995 ; que cette enquête peut en l'espèce être regardée comme close le 17 février 1995, date du courrier adressé à M. A... l'avertissant que son employeur envisageait des poursuites disciplinaires ; que, dans ces conditions, l'engagement des poursuites disciplinaires, par la lettre du 6 mars 1995 le convoquant à un entretien préalable, a eu lieu avant l'expiration du délai de deux mois prévu par les dispositions précitées de l'article L.122-44 du code du travail ;
Considérant que si le comité d'entreprise a été consulté le 5 avril 1995, soit au-delà du délai de dix jours prévu par les dispositions de l'article R.436-8 du code du travail et courant à compter de la mise à pied de M. A... prononcée le 21 mars 1995, ce dépassement n'est pas de nature à vicier la procédure ;
Considérant que le moyen soulevé par le requérant et tiré de ce que la saisine en date du 5 mai 1995 du conseil de discipline national aurait été postérieure à la demande d'autorisation de licenciement en date du 15 avril 1995 est inopérant ;
Sur le bénéfice de l'amnistie :
Considérant qu'aux termes de la loi susvisée du 3 août 1995 portant amnistie : "Sont amnistiés les faits commis avant le 18 mai 1995 en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles ... Sauf mesure individuelle accordée par décret du Président de la République, sont exceptés du bénéfice de l'amnistie prévue par le présent article les faits constituant des manquements à la probité, aux bonnes moeurs ou à l'honneur ..." et qu'aux termes de l'article 15 de la même loi : "Sont amnistiés dans les conditions prévues à l'article 14, les faits retenus ou susceptibles d'être retenus comme motifs de sanctions prononcées par un employeur ..." ;
Considérant que les faits susrappelés ayant motivé l'autorisation adminis-trative de licenciement constituent des manquements à l'honneur et à la probité et sont, en application des dispositions précitées de la loi du 3 août 1995 portant amnistie, exclus de cette dernière ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 août 1995 par laquelle l'inspectrice du travail a autorisé son licenciement ;
Sur les conclusions de la Caisse d'Epargne Ile-de-France Ouest tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux admi-nistratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner M. A... à verser à la Caisse d'Epargne Ile-de-France Ouest la somme de 20.000 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : M. A... est condamné à verser à la Caisse d'Epargne Ile-de-France Ouest la somme de 20.000 F en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 97PA01812
Date de la décision : 08/04/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-02-02,RJ1 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - PROCEDURE PREALABLE A L'AUTORISATION ADMINISTRATIVE - CONSULTATION DU COMITE D'ENTREPRISE -Délai de dix jours prévu par les dispositions de l'article R. 436-8 du code du travail non prescrit à peine de nullité de la procédure (1).

66-07-01-02-02 L'article R. 436-8 du code du travail prévoit qu'en cas de mise à pied du salarié, la consultation du comité d'entreprise a lieu dans un délai de dix jours à compter de la mise à pied. Ce délai n'étant pas prescrit à peine de nullité, son dépassement, le comité ayant été consulté le 5 avril 1995 alors que la mise à pied avait eu lieu le 21 mars 1995, n'est pas de nature à vicier la procédure.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Code du travail L425-1, L122-44, R436-8
Loi 95-884 du 03 août 1995 art. 15

1.

Cf. CE, 1993-06-02, Sawadogo, T. p. 1068


Composition du Tribunal
Président : M. Fournier de Laurière
Rapporteur ?: M. Bataille
Rapporteur public ?: Mme Phemolant

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1999-04-08;97pa01812 ?
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