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11/06/1998 | FRANCE | N°96PA01356

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 11 juin 1998, 96PA01356


(3ème Chambre)
VU l'ordonnance, en date du 1er décembre 1988, par laquelle le président de la 10ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat pour le Syndicat des transports parisiens ;
VU la requête et le mémoire complémentaire, respectivement enregistrés les 16 mars et 16 juillet 1987, présentés pour le Syndicat des transports parisiens, dont le siège social se trouve ..., par la SCP J. LE

PRADO-D. LE PRADO, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassatio...

(3ème Chambre)
VU l'ordonnance, en date du 1er décembre 1988, par laquelle le président de la 10ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la cour administrative d'appel de Paris, en application de l'article 17 du décret n 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée au Conseil d'Etat pour le Syndicat des transports parisiens ;
VU la requête et le mémoire complémentaire, respectivement enregistrés les 16 mars et 16 juillet 1987, présentés pour le Syndicat des transports parisiens, dont le siège social se trouve ..., par la SCP J. LE PRADO-D. LE PRADO, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; le Syndicat des transports parisiens demande :
1 ) d'annuler le jugement en date du 4 décembre 1986 par lequel le tribunal administratif de Paris l'a condamné à verser à la société LES CARS DE LAGNY une indemnité de 1.316.752,16 F en compensation des réductions tarifaires consenties par cette entreprise aux voyageurs porteurs de cartes orange ;
2 ) de rejeter la requête présentée en première instance par la société ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des communes ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mai 1998 :
- le rapport de M. de SAINT-GUILHEM, premier conseiller,
- les observations de Me LE PRADO, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour le Syndicat des transports parisiens,
- et les conclusions de Mme HEERS, commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles L.263-5 et L.263-9 du code des communes, dans leur rédaction issue de la loi du 23 décembre 1977, que le produit du "versement transport" institué à la charge de certains employeurs de la région des transports parisiens est versé au Syndicat des transports parisiens qui doit, après déduction d'une retenue pour frais de recouvrement et de remboursement, affecter le solde aux objets mentionnés à l'article L.263-5 et notamment au "financement de la compensation intégrale des réductions de tarifs consenties au salariés par les entreprises de transport en commun de la région des transports parisiens admises au bénéfice de cette compensation par le Syndicat des transports parisiens" ;
Considérant que, par jugement du 4 décembre 1986, le tribunal admi-nistratif de Paris a estimé que les sommes qui avaient été versées à la société LES CARS DE LAGNY en application des délibérations du Syndicat des transports parisiens en date du 2 décembre 1982 et du 19 décembre 1984 pour compenser les pertes de recettes qu'elle avait subies dans la période du 1er novembre 1982 au 31 décembre 1983 en transportant des personnes munies de titres de transport dits "cartes orange" achetés aux guichets de la Société nationale des chemins de fer français ou de la Régie autonome des transports parisiens n'avaient pas couvert l'intégralité des pertes réelles, et a condamné le Syndicat des transports parisiens à payer à la société une indemnité de 1.316.752,16 F en réparation du préjudice subi ;
Considérant que l'exploitation d'un service de transports en commun de voyageurs par la société LES CARS DE LAGNY a fait l'objet de la signature entre cette entreprise et le Syndicat des transports parisiens de conventions organisant les conditions d'un concours financier du Syndicat des transports parisiens ; que s'agissant des modalités de compensation des pertes de recettes occasionnées sur les lignes de transport en cause, par l'application du régime tarifaire propre à la carte orange, la société LES CARS DE LAGNY avait, à l'égard du Syndicat des transports parisiens, non la qualité de tiers, mais celle de cocontractant, nonobstant l'intervention des délibérations en date des 2 décembre 1982 et 19 décembre 1984 fixant respectivement les modalités provisoires et les modalités définitives de compensation de l'instauration de la carte orange hebdomadaire ; que, par suite, le Syndicat des transports parisiens est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a relevé que la décision prise par lui le 19 décembre 1984 aurait causé à la société LES CARS DE LAGNY un préjudice devant donner lieu à réparation sur le fondement de la rupture d'égalité des citoyens devant les charges publiques ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par le Syndicat des transports parisiens :

Considérant, en premier lieu, que si l'Association professionnelle des transporteurs publics routiers de voyageurs de la région des transports parisiens (APTR) procède effectivement, par l'intermédiaire de la Cartrans, à la répartition entre les transporteurs agréés des sommes dues au titre de la compensation nécessitée par l'existence de la carte orange, cette circonstance ne saurait priver la société LES CARS DE LAGNY du droit, si elle s'estime lésée par le choix de la date du 1er janvier 1984 retenue par l'APTR pour procéder à la liquidation définitive de la compensation prévue par la décision en date du 2 décembre 1982 du Syndicat des transports parisiens, d'introduire un recours en indemnité devant la juridiction administrative ;
Considérant, en deuxième lieu, que si la société LES CARS DE LAGNY a renouvelé, le 5 novembre 1982, le mandat qu'elle avait donné à l'APTR pour la répartition de la compensation entraînée par la carte orange et la détermination de la part lui revenant, elle n'a pas pour autant autorisé l'APTR à renoncer en son nom à toute compensation pour la période du 1er novembre 1982 au 31 décembre 1983 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le Syndicat des transports parisiens n'est pas fondé à soutenir que la demande de la société LES CARS DE LAGNY auprès du tribunal administratif n'était pas recevable ;
Sur le fond :
Considérant que la société LES CARS DE LAGNY fait valoir qu'elle a subi un préjudice du fait de l'intervention de la délibération du Syndicat des transports parisiens en date du 19 décembre 1984 ; qu'aux termes de la délibération du 2 décembre 1982, "il est donné accord à la réalisation de nouveaux comptages carte orange fin 1983 ..." et "aux modalités décrites dans le rapport et notes annexées à la présente décision concernant le calcul et le versement de la compensation à verser ... au titre de la carte orange pendant la période transitoire à compter du 1er novembre 1982 et en attente du résultat des comptages" ; que selon la délibération du 19 décembre 1984, il était décidé que les versements effectués au titre de l'année 1983 seraient considérés comme définitifs et qu'il ne serait en conséquence pas effectué de correction des versements au titre de la période intérimaire ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le Syndicat des transports parisiens n'a pas contesté que les pertes de recettes subies par la société LES CARS DE LAGNY, pendant la période du 1er novembre 1982 au 31 décembre 1983 au cours de laquelle elle avait transporté des voyageurs munis de la carte orange, n'avaient pas été intégralement compensées par les versements effectués sur les bases de calcul arrêtées par les délibérations du 2 décembre 1982 et du 19 décembre 1984, mais avait seulement fait valoir que les pertes réellement subies par la société étaient d'un montant inférieur à l'évaluation retenue par cette société, comme pourrait l'établir, au besoin, une expertise comptable ; que la société LES CARS DE LAGNY a fourni une étude chiffrant le préjudice subi à 1.316.752,16 F à partir des comptages réalisés sous le contrôle du Syndicat des transports parisiens fin octobre 1983 sur les treize lignes exploitées par elle-même, étude fondée sur le nombre de voyageurs transportés, les sections tarifaires appliquées sur chaque ligne et la compensation provisoire versée dans l'attente des comptages définitifs ; que, toutefois, le Syndicat des transports parisiens fait valoir que la société n'est pas fondée à demander une indemnisation sur une durée de quatorze mois, mais seulement de six mois, dès lors que la décision de 1984 exclut les compensations définitives prévues par la délibération de 1982 qui, dans son dispositif, faisait référence à un document annexé aux termes duquel : "Les compensations définitives seront calculées suivant les conditions en vigueur qui prévoient une rétroactivité des comptages sur une période de six mois avec extra-polation linéaire de la différence constatée entre les résultats des comptages indexés sur le nombre de coupons vendus. La valeur origine de cette extrapolation est nulle sauf en cas de modification de la ligne où elle est prise égale à 70 % de la différence constatée" ; que le Syndicat des transports parisiens est fondé à soutenir que le calcul du préjudice subi ne peut se faire qu'en application de ces règles ainsi que de celles fixées par une délibération de 1978 relative également aux modes de calcul de la compensation ; qu'il propose le chiffre de 723.300 F comme montant de l'indem-nisation due, en retenant d'une part les lignes modifiées pour lesquelles de nouvelles dépenses avaient été engagées et les lignes à réseau constant sur lesquelles aucun moyen nouveau n'avait été mis en place ; que ce montant n'est pas utilement critiqué par la société ; que les intérêts doivent être accordés à compter du 17 mai 1985, date de la réception de la demande formée par la société LES CARS DE LAGNY auprès du Syndicat des transports parisiens ;
Considérant que la société LES CARS DE LAGNY a demandé le 5 septembre 1995 la capitalisation des intérêts ; qu'à cette date, au cas où le jugement attaqué n'aurait pas encore été exécuté, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Sur la demande de remboursement des frais :

Considérant que la société LES CARS DE LAGNY a demandé une indemnité de 20.000 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le Syndicat des transports parisiens à lui verser une somme de 10.000 F ;
Article 1er : L'indemnité que le Syndicat des transports parisiens est condamné à verser à la société LES CARS DE LAGNY est réduite à 723.300 F et assortie des intérêts de droit à compter du 17 mai 1985.
Article 2 : Les intérêts échus le 5 septembre 1995 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : Le jugement n 57072/4 du tribunal administratif de Paris en date du 4 décembre 1986 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le Syndicat des transports parisiens est condamné à verser à la société LES CARS DE LAGNY une somme de 10.000 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Le surplus des conclusions du Syndicat des transports parisiens est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 96PA01356
Date de la décision : 11/06/1998
Type d'affaire : Administrative

Analyses

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - NOTION DE CONTRAT ADMINISTRATIF - EXISTENCE D'UN CONTRAT.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - EXECUTION FINANCIERE DU CONTRAT - REMUNERATION DU CO-CONTRACTANT.


Références :

Code civil 1154
Code des communes L263-5, L263-9
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Loi 77-1410 du 23 décembre 1977


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. de SAINT-GUILHEM
Rapporteur public ?: Mme HEERS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1998-06-11;96pa01356 ?
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