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05/05/1998 | FRANCE | N°96PA02545

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 05 mai 1998, 96PA02545


(2ème chambre)
VU la décision n 142355 en date du 28 juin 1996, enregistrée au greffe de la cour le 30 août 1996, par laquelle le Conseil d'Etat a annulé l'article 1er de l'arrêt du 16 juillet 1992 de la cour administrative d'appel de Paris accordant à la société à responsabilité limitée RESIDENCE NEPTUNE GESTION la décharge des pénalités mises à sa charge au titre des années 1981 et 1982 sur le fondement de l'article 1763 A du code général des impôts et renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'elle porte sur le litige relatif auxdite

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VU la décision susvisée du 28 juin 1996 ;
VU l'arrêt de...

(2ème chambre)
VU la décision n 142355 en date du 28 juin 1996, enregistrée au greffe de la cour le 30 août 1996, par laquelle le Conseil d'Etat a annulé l'article 1er de l'arrêt du 16 juillet 1992 de la cour administrative d'appel de Paris accordant à la société à responsabilité limitée RESIDENCE NEPTUNE GESTION la décharge des pénalités mises à sa charge au titre des années 1981 et 1982 sur le fondement de l'article 1763 A du code général des impôts et renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'elle porte sur le litige relatif auxdites pénalités ;
VU la décision susvisée du 28 juin 1996 ;
VU l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 16 juillet 1992 ;
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 15 mai 1990, présentée pour la société à responsabilité limitée RESIDENCE NEPTUNE GESTION, par sa gérante en exercice, et tendant à ce que la cour :
1 ) annule le jugement en date du 13 mars 1990 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 1981 et 1982 et des pénalités y afférentes ;
2 ) prononce la décharge des impositions susvisées ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 21 avril 1998 :
- le rapport de Mme TANDONNET-TUROT, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme TRICOT, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que par décision n 142355 en date du 28 juin 1996, le Conseil d'Etat statuant en contentieux a annulé l'article 1er de l'arrêt du 16 juillet 1992 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a prononcé la décharge des pénalités assignées, sur le fondement de l'article 1763 A du code général des impôts, à la société à responsabilité limitée RESIDENCE NEPTUNE GESTION au titre des années 1981 et 1982 et renvoyé l'affaire devant la cour en tant qu'elle porte sur le litige relatif auxdites pénalités ;
Considérant qu'aux termes de l'article 109-1-1 du code général des impôts : "Sont considérés comme revenus distribués : Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital" ; qu'aux termes de l'article 117 du même code : "Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visée à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1763 A" ; qu'aux termes de l'article 1763 A dans sa rédaction issue de l'article 72 de la loi du 18 janvier 1980, alors en vigueur : "Les sociétés et autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une pénalité fiscale calculée en appliquant au montant des sommes versées ou distribuées le double du taux maximum de l'impôt sur le revenu. Lorsque l'entreprise a spontanément fait figurer dans sa déclaration de résultat le montant des sommes en cause, le taux de la pénalité est ramené à une fois et demie ce taux maximum" ;
Sur le bien-fondé des pénalités :
Considérant, en premier lieu, que dans son arrêt susvisé du 16 juillet 1992 la cour de céans a confirmé la réintégration dans les bases imposables à l'impôt sur les sociétés des exercices 1981 et 1982, au titre de recettes omises, des sommes respectives de 91.365 F et de 83.899 F, qui, seules, ont été retenues pour le calcul des pénalités fiscales contestées ; qu'ainsi, ledit arrêt ayant acquis sur ce point l'autorité de la chose jugée, la société à responsabilité limitée RESIDENCE NEPTUNE GESTION ne saurait soutenir que, les rehaussements opérés n'étant pas fondés et que ses résultats étant, par suite, restés déficitaires, il ne pouvait y avoir distribution de revenus au sens des dispositions précitées de l'article 109-1-1 du code général des impôts ;

Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que l'administration ait indiqué dans la notification de redressement du 6 novembre 1984, adressée à la société, que les propriétaires des logements pris à bail par la contribuable dans un ensemble immobilier en construction à Port Leucate avaient bénéficié, à hauteur des loyers respectivement encourus au 31 décembre 1981, des distributions pour le montant total de 161.010 F réintégré dans les résultats de l'exercice 1981, ne s'opposait pas à ce que le vérificateur inclût ledit montant dans la demande de désignation, formulée dans la même notification de redressement, et ne rendait pas ladite demande ambiguë ou difficilement compréhensible ;
Considérant, en troisième lieu, que la demande susvisée du 6 novembre 1984 se réfère expressément à l'article 117 du code général des impôts, mentionne le montant, par année, des revenus réputés distribués, en application dudit article, invite la société à responsabilité limitée RESIDENCE NEPTUNE GESTION à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications sur l'identité (noms, adresses) des bénéficiaires et informe la contribuable qu'à défaut de réponse dans le délai ainsi imparti, ou en cas de réponse imprécise ou ambigüe, elle supportera la pénalité prévue par l'article 1763 A du code général des impôts ; qu'ainsi cette demande était suffisamment motivée et de nature à permettre à la société d'y apporter une réponse précise ;
Considérant, en quatrième lieu, que si le vérificateur a également requis dans la demande du 6 novembre 1984 que la réponse soit contresignée par les personnes désignées "qui reconnaissent expressément être les bénéficiaires des distributions", il résulte de l'instruction que cette exigence, non prévue par les dispositions précitées de l'article 117 du code général des impôts, pour regrettable qu'elle soit, n'a pas empêché la société à responsabilité limitée RESIDENCE NEPTUNE GESTION de répondre dans le délai qui lui était imparti et n'est pas à l'origine du caractère imprécis de ladite réponse ;
Considérant, enfin, qu'il est constant que dans sa réponse du 6 décembre 1984, la société à responsabilité limitée RESIDENCE NEPTUNE GESTION s'est bornée à indiquer que "les bénéficiaires sont désignés comme les associés au prorata de leurs parts" ; que cette réponse imprécise, qui ne mentionnait ni les noms et adresses des associés, ni leurs parts respectives dans le capital social, ne permettait pas au service d'apprécier la vraisemblance de ces désignations et était, dès lors, assimilable à un défaut de réponse ; que, par suite, c'est par une exacte application des dispositions législatives susmentionnées que l'administration a assujetti la société à la pénalité fiscale instituée par l'article 1763 A du code général des impôts ;
Sur les années de rattachement des pénalités :

Considérant que dans sa décision susvisée du 28 juin 1996, le Conseil d'Etat a sanctionné, comme entaché d'erreur de droit, le raisonnement adopté par la cour dans son arrêt du 16 juillet 1992, qui l'avait conduite à prononcer la décharge des pénalités contestées au motif qu'elles devaient être rattachées à l'année au cours de laquelle s'était produit le fait générateur de l'infraction, lequel était, en l'espèce, l'année 1984 ; que, par suite, la société à responsabilité limitée RESIDENCE NEPTUNE GESTION ne saurait soutenir que lesdites pénalités ne pouvaient être établies au titre des années 1981 et 1982 au cours desquelles sont intervenues les distributions dont s'agit ;
Sur le taux des pénalités :
Considérant que lorsque le juge de l'impôt est saisi d'une contestation propre aux pénalités qui revêtent le caractère d'une sanction de nature pénale, il lui appartient d'examiner d'office s'il y a lieu de faire application de la loi répressive nouvelle si celle-ci est plus douce que la loi répressive en vigueur à l'époque du fait générateur de l'infraction ;
Considérant que la pénalité instituée par l'article 1763 A du code général des impôts dans sa rédaction ci-dessus rappelée issue de l'article 72 de la loi du 18 janvier 1980 n'avait pas pour seul objet, compte tenu du taux retenu, variable de surcroît selon que l'entreprise a, ou non, spontanément fait figurer le montant des sommes en cause dans sa déclaration de résultat, la simple réparation pécuniaire d'un préjudice financier subi par le Trésor mais avait pour but de sanctionner le refus par la personne morale de révéler l'identité de ces bénéficiaires ; qu'elle présentait donc le caractère d'une punition tendant à empêcher la réitération des agissements qu'elle vise ; qu'il y a lieu en conséquence de lui appliquer le principe de la loi nouvelle moins sévère ; que les dispositions de l'article 1763 A du code général des impôts, dans leur rédaction issue de la loi du 8 juillet 1987, prévoient l'application d'une amende égale à 100 % des sommes versées, au lieu et place du double du taux maximum de l'impôt sur le revenu antérieurement applicable ; qu'ainsi, et dès lors que l'assiette de la pénalité, qui était de 59.510 F en 1981 et de 45.580 F en 1982, demeure inchangée, il y a lieu de limiter le montant des pénalités assignées à la société à responsabilité limitée RESIDENCE NEPTUNE GESTION au titre des années 1981 et 1982 aux sommes respectives de 59.510 F et de 45.580 F ;
Article 1er : Les pénalités de l'article 1763 A du code général des impôts auxquelles la société à responsabilité limitée RESIDENCE NEPTUNE GESTION a été assujettie au titre des années 1981 et 1982 sont limitées aux montants respectifs de 59.510 F et de 45.580 F.
Article 2 : Décharge est accordée à la société à responsabilité limitée RESIDENCE NEPTUNE GESTION de la différence entre les pénalités mises à sa charge et celles qui résultent de l'application de l'article 1er.
Article 3 : Le jugement n 8710838 du 13 mars 1990 du tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 96PA02545
Date de la décision : 05/05/1998
Sens de l'arrêt : Réduction des pénalités
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-04-02,RJ1 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - AMENDES, PENALITES, MAJORATIONS - PENALITES POUR DISTRIBUTION OCCULTE DE REVENUS -Pénalité prévue à l'article 1763 A du code général des impôts dans sa rédaction issue de l'article 72 de la loi du 18 janvier 1980 - Caractère de sanction - Application du principe de la loi nouvelle moins sévère (1).

19-01-04-02 La pénalité instituée par l'article 1763 A du code général des impôts dans sa rédaction issue de l'article 72 de la loi du 18 janvier 1980 n'a pas pour seul objet, compte tenu du taux retenu, la simple réparation d'un préjudice financier subi par le Trésor mais a pour but de sanctionner le refus par la personne morale de révéler l'identité des bénéficiaires des distributions occultes. Elle présente donc le caractère d'une punition visant à empêcher la réitération des agissements qu'elle vise. Il y a lieu en conséquence de lui appliquer le principe de la loi nouvelle moins sévère.


Références :

CGI 1763 A, 109, 117
Loi 80-30 du 18 janvier 1980 art. 72
Loi 87-502 du 08 juillet 1987

1.

Cf. CE, 1998-07-08, Ministre de l'économie et des finances c/ S.A.R.L. clinique Mozart, n° 184214


Composition du Tribunal
Président : Mme Lefoulon
Rapporteur ?: Mme Tandonnet-Turot
Rapporteur public ?: Mme Tricot

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1998-05-05;96pa02545 ?
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