La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/12/1997 | FRANCE | N°95PA03136

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 09 décembre 1997, 95PA03136


( 2ème Chambre)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 août 1995, présentée pour la société anonyme COMPAGNIE FIVES-LILLE, venant aux droits et obligations de la société Fives Cail Babcock, représentée par son président-directeur général en exercice, dont le siège social est ..., par Me Y..., avocat ; la société COMPAGNIE FIVES-LILLE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9011370/1, n 9011371/1 , n 9011372/1 du 5 juillet 1994 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il rejette, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence

des sommes de 5.054.506 F et de 10.796.500 F au titre des exercices clos en ...

( 2ème Chambre)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 18 août 1995, présentée pour la société anonyme COMPAGNIE FIVES-LILLE, venant aux droits et obligations de la société Fives Cail Babcock, représentée par son président-directeur général en exercice, dont le siège social est ..., par Me Y..., avocat ; la société COMPAGNIE FIVES-LILLE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9011370/1, n 9011371/1 , n 9011372/1 du 5 juillet 1994 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il rejette, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des sommes de 5.054.506 F et de 10.796.500 F au titre des exercices clos en 1981 et en 1983, le surplus des conclusions de sa demande n 9011372/1 tendant à la réduction du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des exercices 1980, 1981, 1982 et 1983 dans les rôles de la ville de Paris, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2 ) de lui accorder la réduction demandée ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 1997 :
- le rapport de Mme BRIN, conseiller,
- les observations du bureau Francis LEFEBVRE, avocat, pour la COMPAGNIE DE FIVES-LILLE,
- et les conclusions de Mme MARTIN, commissaire du Gouvernement ;

Sur les amortissements :
En ce qui concerne l'amortissement dégressif des véhicules utilitaires :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 A-1 du code général des impôts : "L'amortissement des biens d'équipement, autres que les immeubles d'habitation, les chantiers et les locaux servant à l'exercice de la profession, acquis ou fabriqués à compter du 1er janvier 1960 par les entreprises industrielles, peut être calculé suivant un système d'amortissement dégressif ..." ; qu'aux termes de l'article 22 de l'annexe II au même code : "Les entreprises passibles de l'impôt sur les sociétés ... peuvent amortir suivant un système dégressif ... les immobilisations acquises ou fabriquées par elles à compter du 1er janvier 1960 et énumérées ci-après : - Matériels et outillages utilisés pour des opérations industrielles de fabrication, de transformation ou de transport" ;
Considérant qu'il résulte des termes mêmes des dispositions précitées, sur le fondement desquelles seules ont été opérés les redressements litigieux, que le bénéfice du système d'amortissement dégressif est réservé aux biens d'équipement normalement utilisés dans les entreprises industrielles au stade de la production ; que les camionnettes d'une charge utile inférieure à 2 tonnes dont disposait la société anonyme Fives Cail Babcock, qui exerçait son activité dans les secteurs de la construction mécanique et électrique et de la chaudronnerie, et dont la société anonyme COMPAGNIE FIVES- LILLE, qui vient à ses droits, n'établit pas qu'elles auraient été utilisées au stade de la production de cette entreprise n'ont pas le caractère de tels biens ; que dès lors c'est à bon droit que les sommes déduites à tort de ce chef ont été réintégrées dans les bases d'imposition pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés au titre des années 1980 à 1983 ;
En ce qui concerne l'amortissement des voitures particulières :
Considérant qu'en vertu du 4 de l'article 39, dans sa rédaction alors en vigueur, du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés selon les dispositions de l'article 209 du même code, l'amortissement des voitures de tourisme, pour la fraction de leur prix d'acquisition qui dépasse 35.000 F, est exclu, sauf justifications, des charges déductibles pour l'établissement de l'impôt ; que la société requérante, en faisant valoir que les véhicules d'un prix supérieur à 35.000 F en cause ne constituaient pas des voitures de luxe et que leur acquisition répondait aux besoins normaux de l'exploitation, ne peut être regardée comme apportant les justifications exigées par les dispositions de l'article 39-4 susindiqué du code général des impôts ; qu'eu égard aux termes mêmes de ces dispositions, l'argumentation de la requérante tirée des travaux préparatoires de la loi n 61-1396 du 21 décembre 1961 les ayant instituées ne saurait, non plus que sa critique des instructions administratives prises pour leur application, avoir d'incidence sur le bien-fondé du redressement litigieux ; qu'ainsi la réintégration des sommes de 36.536 F et 60.210 F dans les résultats des exercices clos en 1982 et 1983 doit être maintenue ;
Sur les commissions versées à des intermédiaires en vue de l'obtention de marchés à l'étranger :

Considérant que l'administration a réintégré dans les résultats des exercices clos en 1980, 1981, 1982 et 1983 la somme totale de 11.890.826 F correspondant à des commissions n'ayant pu selon elle être passées en charges pour l'intégralité de leur montant et, dans les résultats des exercices clos en 1982 et 1983, celle de 2.643.805 F qui correspond à des commissions dont l'administration a refusé d'admettre la déduction pour l'intégralité de leur montant, faute de justification de la réalité du service ;
En ce qui concerne les commissions dont le montant n'a été que partiellement admis en déduction des résultats :
Considérant que les commissions dont s'agit ont été versées à Rimaldo Assets Corporation pour les sucreries de Surac et de Zemamra ainsi que pour une usine de manutention de phosphates à Youssoufia, au Maroc, à Astarel Investisments pour la cimenterie de Cinouca implantée dans le même pays, à Technique Internationale pour la cimenterie de Badoosh en Irak, à Rocalina NV pour une usine d'enrichissement de minerais de fer installée au Mexique, enfin à M. X... pour une usine de manutention de phosphates en Tunisie ;
Considérant, d'une part, que la société requérante soutient que ces commissions, à l'exception de la dernière versée à M. X... en 1980, ne pouvaient faire l'objet des réintégrations litigieuses dès lors que les sommes correspondantes étaient comptabilisées comme des "travaux en cours" et n'avaient donc pas été déduites des résultats des exercices de leur versement ; qu'elle produit à l'appui de cette affirmation des extraits issus des relevés informatiques de la balance des travaux en cours contenue dans la comptabilité analytique de la société Fives Cail Babcock ; que l'administration, quant à elle, fait valoir que l'examen de ces documents ne la met pas en mesure d'appréhender la globalité des écritures qui ont pu être passées, notamment en matière d'opérations diverses à un stade intermédiaire ou en matière de rectifications extra-comptables ; que, par ailleurs, l'état de l'instruction ne permet pas à la cour de se déterminer sur le point de savoir si la comptabilité générale de la société corrobore la comptabilité analytique ; qu'il y a lieu, par suite, avant de statuer sur les conclusions de la requête relatives aux commissions susmentionnées exception faite de celle allouée à M. X..., d'ordonner une expertise aux fins de déterminer, à partir de l'examen de l'ensemble des documents comptables, relatifs tant à la comptabilité générale qu'à la comptabilité analytique de la société Fives Carl Babcock, et de tous documents extra-comptables utiles, si les commissions en cause ont été incluses dans les "travaux en cours" et n'ont pas été déduites des résultats des exercices de versement ;
Considérant, en second lieu, que le rehaussement de 88.326 F, relatif à la commission versée à M. X... pour l'obtention d'un marché en Tunisie, procède de la réintégration dans les résultats de l'exercice clos en 1980 d'une fraction de son montant, qui a été obtenue en lui appliquant le rapport existant entre la "part locale" du marché, convertie en francs français, et le chiffre d'affaires total généré par lui ; que la société anonyme COMPAGNIE FIVES-LILLE ne conteste pas la clé de répartition ainsi déterminée, mais seulement le principe même de l'application d'une telle ventilation à la commission litigieuse ;

Considérant qu'il résulte des dispositions du I de l'article 209 du code général des impôts que doivent être soumis à l'impôt sur les sociétés les bénéfices provenant d'opérations qui sont réalisées en France à l'exclusion de celles comportant l'exécution des prestations dans le pays étranger ; qu'alors même qu'elle constitue le prix à payer pour l'obtention du contrat, une commission versée à un intermédiaire en vue d'obtenir un marché international doit être regardée comme l'un des éléments du coût de l'ensemble de ce marché ; qu'en conséquence, et par application des dispositions susrappelées de l'article 209-I, la partie de la commission qui doit être imputée à la part des activités qui se rattache à des opérations déployées à l'étranger ne peut être déduite des résultats dégagés par l'activité exercée en France et seules sont déductibles des résultats les charges imputables à des activités françaises ; que la société FIVES-LILLE, pour prétendre à la déductibilité totale de la commission en cause, n'établit pas que l'engagement de la dépense constituée par son versement serait de nature à n'avoir généré que des résultats imposables en France ; que, par suite, c'est à bon droit que la somme de 88.326 F a été réintégrée dans les bases d'imposition pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1980 ;
En ce qui concerne les autres commissions :
Considérant qu'aux termes de l'article 238-A du code général des impôts : "Les ... redevances de cession et de concession de licence d'exploitation, de brevets d'invention, de marques de fabriques, procédés et formules de fabrication et autres droits analogues ou les rémunérations de services payés ou dus par une personne physique ou morale domiciliée ou établie en France à des personnes physiques ou morales qui sont domiciliées ou établies dans un Etat étranger ... et y sont soumises à un régime fiscal privilégié, ne sont admis comme charges déductibles pour l'établissement de l'impôt que si le débiteur apporte la preuve que les dépenses correspondent à des opérations réelles et qu'elles ne présentent pas un caractère anormal ou exagéré" ; qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "le bénéfice net imposable est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, notamment ... les frais généraux de toute nature ..." ; que l'administration entende fonder les rappels litigieux sur les dispositions de l'un ou l'autre des articles du code général des impôts suscités, il incombe au contribuable de rapporter la preuve de ce que le versement des commissions en cause a été la contrepartie de services effectivement rendus à l'entreprise ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les seuls documents produits à cet égard par la société anonyme COMPAGNIE FIVES-LILLE consistent en des lettres qui n'émanent que d'elle-même et se bornent à faire référence à des conversations relatives à des possibilités de coopération ou à divers entretiens ; que, dans ces conditions, ces documents ne sauraient, non plus qu'à elles seules les considérations générales de la requérante quant à la nécessité du versement de pareilles commissions pour permettre des opérations d'exportation, suffire à établir que les commissions en cause, versées en 1982 et 1983 par la société Fives Cail Babcock aux sociétés Halmax Company NV et Karstack AG sises en Suisse, et alors même que d'autres sommes versées aux mêmes sociétés ont été admises en déduction par l'administration, parce que justifiées au contraire par des documents probants, ont rémunéré des services effectifs ; que, par suite, c'est en tout état de cause à bon droit que le service en a réintégré les montants dans les résultats de l'entreprise, pour le calcul des bénéfices imposables des exercices clos en 1982 et 1983 ;
Sur les conclusions tendant à un dégrèvement complémentaire de 15.319.802 F :
Considérant que la vérification de comptabilité de la société Fives Cail Babcock ayant conduit à la détermination d'un bénéfice imposable au titre de l'année 1983 inférieur à celui déclaré par l'entreprise et primitivement imposé, le service a prononcé, en mars 1987, un dégrèvement d'un montant de 34.185.955 F correspondant à ce qu'il estimait être l'excédent des droits acquittés par la société ;
Considérant qu'en vertu de l'article 38 du code général des impôts selon lequel : "le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises ..." le service a régulièrement déterminé, à la suite des opérations de contrôle, le nouveau bénéfice net imposable au titre de l'exercice en question en compensant les rectifications à la baisse opérées du chef des créances acquises avec les réintégrations auxquelles il a été procédé à raison d'autres chefs de redressement ; que le dégrèvement susprécisé de 34.185.955 F procède de l'ensemble de ces modifications ; que la société n'est dès lors pas fondée à prétendre que l'administration aurait dû prononcer un dégrèvement, d'un montant supérieur, correspondant aux seules rectifications relatives aux créances acquises, quitte à mettre en recouvrement du chef des autres redressements opérés, un supplément d'imposition de 15.319.802 F, dont il lui aurait été loisible de demander le sursis de paiement ;
Article 1er : Avant de statuer sur les conclusions de la requête de la société anonyme COMPAGNIE DE FIVES-LILLE relatives aux redressements procédant de la réintégration dans les résultats des exercices clos en 1980, 1981, 1982 et 1983 de la société Fives Cail Babcock d'une fraction des commissions énumérées dans les motifs du présent arrêt, il sera procédé par un expert désigné par le président de la cour à une expertise en vue de déterminer, à partir de l'ensemble des documents comptables de la société Fives Cail Babcock et tous documents extra-comptables utiles, si les commissions dont s'agit ont été incluses dans les "travaux en cours" et n'ont pas été déduites des exercices au cours desquels elles ont été versées.
Article 2 : L'expert prêtera serment par écrit ; le rapport d'expertise sera déposé au greffe de la cour en quatre exemplaires dans un délai de six mois suivant la prestation de serment.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société anonyme COMPAGNIE DE FIVES-LILLE est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 95PA03136
Date de la décision : 09/12/1997
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - EVALUATION DE L'ACTIF - TRAVAUX EN COURS.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - AMORTISSEMENT.


Références :

CGI 39 A, 39, 209, 238, 38
CGIAN2 22
Loi 61-1396 du 21 décembre 1961


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme BRIN
Rapporteur public ?: Mme MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1997-12-09;95pa03136 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award