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21/10/1997 | FRANCE | N°95PA03994;96PA00057

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 21 octobre 1997, 95PA03994 et 96PA00057


(3ème Chambre)
VU, I) enregistrée au greffe de la cour le 18 décembre 1995 sous le n 95PA03994, la requête déposée pour l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS, représentée par Me FOUSSARD, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n s 9208353/3-9308782/3 du 7 juin 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris l'a condamnée à verser à Mme X la somme de 100.000 F en réparation des préjudices subis par cette dernière du fait de sa contamination par le virus de l'hépatite

C à l'occasion de transfusions sanguines reçues en mars 1980 à l'hôpi...

(3ème Chambre)
VU, I) enregistrée au greffe de la cour le 18 décembre 1995 sous le n 95PA03994, la requête déposée pour l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS, représentée par Me FOUSSARD, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n s 9208353/3-9308782/3 du 7 juin 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris l'a condamnée à verser à Mme X la somme de 100.000 F en réparation des préjudices subis par cette dernière du fait de sa contamination par le virus de l'hépatite C à l'occasion de transfusions sanguines reçues en mars 1980 à l'hôpital Avicenne de Bobigny, et a mis à sa charge le montant des frais d'expertise fixés à hauteur des sommes respectives de 3.625 F et 7.000 F ;
2 ) très subsidiairement, de minorer les indemnités allouées ;
VU, II) enregistrée au greffe de la cour le 8 janvier 1996 sous le n 96PA00057, la requête déposée pour Mme X, demeurant 7 mail d'Angers, 37000 Tours, par Me VACCARO, avocat ; Mme X demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement n s 9208353/3-9308782/3 du 7 juin 1995, en tant que par ce jugement le tribunal administratif de Paris a limité à hauteur de la somme de 100.000 F la condamnation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à réparer les préjudices qu'elle a subis du fait de sa contamination par le virus de l'hépatite C à l'occasion de transfusions sanguines reçues en mars 1980 à l'hôpital Avicenne de Bobigny ;
2 ) de porter ladite somme à 3.000.000 F ;
3 ) de condamner l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à lui verser la somme de 30.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
4 ) d'ordonner une expertise médicale aux fins de définir le quantum de son préjudice ;
VU les autres pièces des dossiers ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 octobre 1997 :
- le rapport de M. VINCELET, conseiller,
- les observations du cabinet FOUSSARD, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS et celles de Me VACCARO, avocat, pour Mme X,
- et les conclusions de Mme HEERS, commissaire du Gouvernement ;

Sur la jonction :
Considérant que les deux requêtes de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS et de Mme X, enregistrées sous les n s 95PA03994 et 96PA00057, présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;
Au fond :
Sur la responsabilité de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS :
Considérant que le 27 mars 1980, Mme X est entrée à l'hôpital Avicenne de Bobigny, dépendant de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS, pour y subir une lobohysthmectomie droite, destinée à extraire un nodule froid thyroïdien ; que l'intéressée étant porteuse de la maladie de Willebrand, caractérisée par un important allongement du temps de saignement dû à des anomalies plasmatiques, elle reçut, tant en phase pré et post opératoire que durant l'intervention elle-même, des transfusions de produits sanguins de "facteur VIII" ; qu'un mois plus tard, à l'occasion d'une seconde intervention, elle fut trouvée porteuse d'une infection virale qui se révéla ultérieurement être due au virus de l'hépatite C ;
Considérant qu'ainsi que l'a pertinemment relevé le tribunal administratif de Paris dans le jugement querellé du 7 juin 1995, la responsabilité encourue par les établissements hospitaliers du fait d'un vice affectant un produit sanguin transfusé doit être recherchée, non sur le fondement des principes qui gouvernent la responsabilité des hôpitaux en tant que dispensateurs d'actes médicaux, mais sur la base de règles propres à son activité de gestionnaire d'un centre de transfusion sanguine ; qu'au nombre de ces règles, les centres de transfusion sanguine, et par suite les hôpitaux dont ils dépendent, sont responsables, même en l'absence de faute, des conséquences dommageables de la mauvaise qualité des produits sanguins fournis ; qu'ainsi, et contrairement aux allégations de l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS, il appartient aux parties, selon leurs possibilités respectives, d'établir l'existence d'un lien de causalité entre la contamination révélée et les transfusions de produits sanguins ;
Considérant qu'eu égard au risque postopératoire que faisait courir à Mme X la tendance hémorragique due à la maladie de Willebrand, notamment la formation d'un hématome, la transfusion de produits sanguins s'avérait indispensable, ainsi que l'ont noté les experts ; qu'il résulte notamment du rapport du docteur Garcelon que la patiente a reçu à plusieurs reprises des produits sanguins non chauffés provenant de plusieurs milliers de donneurs et dont l'origine n'a pu être établie par l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS ;

Considérant que, dans ces conditions, eu égard à l'absence de risque connu propre à la victime, ainsi qu'à la quasi-concomitance entre les transfusions et l'apparition des premiers symptômes de contamination, le tribunal administratif a, à bon droit, estimé certain le lien de causalité entre les transfusions et ladite contamination, et déclaré l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS, dont dépendait le centre fournisseur des produits incriminés, responsable des consé-quences de l'infection contractée par Mme X ; qu'ainsi, l'ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué n s 9208353/3-9308782/3 du 7 juin 1995, le tribunal administratif de Paris l'a condamnée à l'indemniser des troubles de toute nature subis du fait de la contamination, nonobstant l'absence de faute commise ;
Sur la réparation du préjudice :
Considérant qu'au soutien de ses conclusions d'appel tendant à ce que l'indemnisation du préjudice que lui a causé la contamination post-transfusionnelle par le virus de l'hépatite C en cause à laquelle les premiers juges ont procédé en lui allouant la somme de 100.000 F, soit portée à 3.000.000 F, Mme X fait principalement valoir que l'évolution de son affection virale a atteint le stade de la cirrhose du foie laissant présager lui-même une évolution cancéreuse ;
Considérant qu'il ne résulte ni des expertises auxquelles Mme X a été soumise dans le cadre de la procédure contentieuse, ni d'aucun autre document, que la phase cirrhotique serait actuellement avérée ; que, dans ces conditions, il y a lieu de faire droit à la demande de Mme X tendant à ce qu'une expertise soit ordonnée aux fins, pour l'expert, après avoir pris connaissance de l'entier dossier médical de la requérante et des expertises médicales déjà intervenues, d'examiner Mme X, de pratiquer ou de faire pratiquer sur elle tous examens et interventions exploratoires compatibles avec son état de santé, de nature à établir le stade actuel du cursus de l'affection virale, en précisant si l'arrêt de tout traitement par la volonté de Mme X est médicalement justifié, de décrire les conséquences de l'arrêt de tout traitement, de préciser si des thérapies nouvelles sont susceptibles de lui être délivrées, le cas échéant, si elles lui ont été proposées et si elle les a acceptées, d'une manière générale de décrire, en dehors de la pathologie de Willebrand dont elle est par ailleurs atteinte, les conséquences de la seule contamination virale sur son état physique et psychologique, de chiffrer son invalidité actuelle et d'apprécier si cette invalidité est compatible avec l'exercice d'une activité professionnelle, de consulter, à cette occasion, le dossier de l'intéressée détenu par la Cotorep, d'une manière générale de porter une appréciation sur l'ensemble des souffrances et désagréments dont Mme X pourra faire état devant lui ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant qu'il y a lieu de réserver cette demande pour qu'il y soit statué en fin d'instance ;
Article 1er : La requête de l' ASSISTANCE PUBLIQUE-HOPITAUX DE PARIS est rejetée.
Article 2 : Avant-dire droit sur les conclusions de Mme X sur la réparation du préjudice, il sera procédé à une nouvelle expertise aux fins définies par les motifs du présent arrêt.


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