(1ère Chambre)
VU les requêtes enregistrées au greffe de la cour le 12 juin 1995, présentées pour Mme X... et la société AUTO SERVICE FRANCE représentée par son gérant M. X..., par Me Y..., avocat ; Mme X... et la société AUTO SERVICE FRANCE demandent à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9206696/7 du 9 février 1995 du tribunal administratif de Paris rejetant l'intervention de la société AUTO SERVICE FRANCE, ordonnant l'expulsion sous astreinte de Mme X... du domaine public ferroviaire qu'elle occupe sans titre, au ... à Saint-Ouen, et condamnant Mme X... à verser à la SNCF une somme de 192.435,38 F au titre de redevances d'occupation impayées avec les intérêts légaux ;
2 ) subsidiairement, d'une part, de condamner la SNCF, au cas où l'expulsion serait confirmée, à verser à la société AUTO SERVICE FRANCE une somme de 918.867,08 F représentant les frais engagés par elle pour commercialiser son activité, d'autre part, d'accorder à la société AUTO SERVICE FRANCE de plus larges délais pour régler la somme de 192.435,38 F ;
3 ) d'ordonner le sursis à exécution du jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 juin 1997 :
- le rapport de M. LIEVRE, conseiller,
- les observations de la SCP LUSSAN-BROUILLAUD, avocat, pour la SNCF,
- et les conclusions de Mme HEERS, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que la société nationale des chemins de fer français (SNCF) a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer l'expulsion de Mme X..., ainsi que celle de tous occupants de son chef et en particulier de la société AUTO SERVICE FRANCE, des locaux occupés par elle sur le domaine public ferroviaire dans les dépendances de la gare de Saint-Ouen-les-Docks à Saint-Ouen, en vertu d'autorisations d'occupation délivrées les 23 juin et 26 août 1982 ; que, devant le tribunal administratif, la société AUTO SERVICE FRANCE est intervenue volontairement ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté l'intervention de ladite société, enjoint à Mme X... et à tous occupants de son chef de libérer les locaux en cause et condamné Mme X... à verser à la SNCF le montant des redevances dues au 14 septembre 1993 ; que, par la requête susvisée, M. X... et la société AUTO SERVICE FRANCE font appel dudit jugement et que la SNCF a présenté des conclusions incidentes ;
Sur les conclusions de la requête en tant qu'elles émanent de Mme X... :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 des conditions générales d'occupation d'immeubles bâtis ou non bâtis dépendant du domaine public du chemin de fer concédés à des commerçants ou des industriels, applicable en l'espèce en vertu de l'article 1er des autorisations d'occupation délivrées le 23 juin et 26 août 1982 à Mme X... : "L'autorisation est consentie à titre précaire et révocable pour un an à compter de la date fixée dans l'acte. Elle se continuera d'année en année, par tacite reconduction, avec faculté pour chacune des parties d'y mettre fin à l'expiration de chaque période annale, en prévenant l'autre partie au moins trois mois à l'avance par lettre recommandée" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de la lettre recommandée en date du 19 mars 1990 adressée par la SNCF à Mme X... et reçue par cette dernière le 20 mars 1990, que la SNCF doit être regardée comme ayant mis fin aux autorisations d'occupation à l'expiration de la période annale s'achevant en 1990 fixée par les conventions en précisant que la libération des lieux devait être effective au 31 août 1990 ; que ce non-renouvellement dont Mme X... a été prévenue plus de trois mois à l'avance, est ainsi intervenu conformément aux dispositions précitées et n'est par suite, entaché d'aucune irrégularité ; qu'enfin, Mme X... ne saurait utilement soutenir qu'il ne pouvait être mis fin aux autorisations d'occupation en faisant valoir que ses droits avaient été transférés à la société AUTO SERVICE FRANCE en l'absence au dossier de toute convention passée en ce sens entre la SNCF et ladite société, nonobstant la circonstance qu'une autorisation de travaux aurait été délivrée à cette dernière le 5 octobre 1988 et alors même que ladite société aurait payé des redevances d'occupation ; que, par suite Mme X..., occupante sans titre du domaine public ferroviaire n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a ordonné son expulsion sous astreinte de 1.000 F par jour de retard à l'expiration du délai d'un mois suivant la notification dudit jugement ;
Sur les conclusions de la requête en tant qu'elles émanent de la société AUTO SERVICE FRANCE :
Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la société AUTO SERVICE FRANCE ne peut se prévaloir d'une convention d'occupation du domaine public ferroviaire passée entre la SNCF et elle-même et qu'ainsi, elle ne détenait aucun droit propre lui permettant d'occuper ce domaine alors même qu'elle aurait réglé des redevances d'occupation dues par Mme X... et qu'un projet de convention d'occupation, qu'elle a d'ailleurs refusé, lui avait été soumis ; qu'ainsi d'une part, la société AUTO SERVICE FRANCE n'est pas fondée à soutenir que c'et à tort que le tribunal administratif, par l'article 1er du jugement attaqué, n'a pas admis son intervention, et d'autre part, que les conclusions de ladite société dirigées contre les articles 2, 3 et 5 du même jugement ne sont pas recevables ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions tendant à obtenir le versement d'une somme représentative des frais qu'elle aurait engagés pour commercialiser son activité ;
Sur l'appel incident de la SNCF :
En ce qui concerne les conclusions tendant à la capitalisation des intérêts sur les redevances dues par Mme X... :
Considérant que par l'article 3 du jugement attaqué, le tribunal administratif a condamné Mme X... à verser à la SNCF une somme de 192.435,38 F au titre de redevances d'occupation impayées à la date du 14 septembre 1993, ladite somme portant intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 1993 ; que la SNCF demande la capitalisation des intérêts le 11 septembre 1995, qu'à cette date, au cas ou le jugement attaqué n'aurait pas été exécuté il était dû plus d'une année d'intérêts ; que dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
En ce qui concerne les conclusions tendant au paiement d'un complément de redevances d'occupation pour la période ultérieure au 14 septembre 1993 :
Considérant que devant la cour, la SNCF justifie d'un arriéré de redevances dues pour la période du 14 septembre 1993 au 31 août 1995 s'élevant à la somme de 139.644,48 F ; que cette somme n'est pas contestée par Mme X... et qu'il y a lieu de condamner cette dernière à payer ladite somme à la SNCF ; qu'en revanche, si la SNCF a fait état, le jour de l'audience d'une arriéré de redevances dues pour la période du 1er septembre 1995 au 31 mai 1997, et a produit en délibéré des documents y afférents, il lui appartiendra, si elle s'y croit recevable et fondée, de saisir les premiers juges de cette nouvelle demande ;
Considérant que le présent arrêt, portant intérêts du jour de son prononcé jusqu'à son exécution au taux légal, puis au taux majoré s'il n'est pas exécuté dans les deux mois de sa notification, il n'y a lieu de statuer sur les conclusions de la SNCF tendant à obtenir les intérêts au taux légal à compter de la notification de l'arrêt ;
En ce qui concerne les conclusions tendant à la condamnation des requérants au versement d'une somme de 100.000 F au titre de dommages et intérêts :
Considérant que si la SNCF soutient que le présent appel est abusif et de nature à lui causer un préjudice de 100.000 F, elle n'apporte aucune justification à l'appui de ses allégations qui doivent, par suite, être rejetées ;
Sur les conclusions de la SNCF tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de condamner solidairement Mme X... et la société AUTO SERVICE FRANCE à verser à la SNCF une somme de 8.000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de Mme X... et de la société AUTO SERVICE FRANCE est rejetée.
Article 2 : Mme X... paiera à la SNCF une somme de 139.644,48 F.
Article 3 : Au cas où le jugement attaqué n'aurait pas été exécuté, les intérêts de la somme de 192.435,38 F échus le 11 septembre 1995, seront capitalisés à cette date pour produire eux-même intérêts.
Article 4 : Mme X... et la société AUTO SERVICE FRANCE paieront solidairement à la SNCF une somme de 8.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Le surplus des conclusions de l'appel incident de la SNCF est rejeté.