Vu le recours, enregistré au greffe de la cour les 14 août et 21 août 1996, présenté par le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n 9600891/7 du 29 mai 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa tierce opposition formée contre les jugements des 15 novembre et 13 décembre 1995 rendus par ce même tribunal à la demande de Mlle Z..., d'une part, et de Mlle Le Lorc'h, Mlle X... et M. Y..., d'autre part ;
2°) de déclarer nuls et non avenus les jugements des 15 novembre et 13 décembre 1995 ;
3°) de rejeter les demandes présentées devant le tribunal administratif par Mlle Z... et par Mlle Le Lorc'h, Mlle X... et M. Y... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n 84-52 du 26 janvier 1984 pour l'enseignement supérieur ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu l'arrêté du 18 mars 1992 du ministre de l'éducation nationale et du ministre délégué à la santé ;
Vu l'arrêté du 11 janvier 1995 du ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche et du ministre délégué à la santé ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 novembre 1996 :
- le rapport de Mme Mille, conseiller,
- et les conclusions de Mme Phemolant, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que, par des jugements en date des 15 novembre et 13 décembre 1995, le tribunal administratif de Paris a annulé les décisions du recteur de l'académie de Paris, chancelier des Universités, refusant d'une part d'autoriser Mlle Z..., au terme de l'année universitaire 1994/1995, à poursuivre des études médicales en deuxième année du premier cycle dans l'unité de formation et de recherche Broussais et, d'autre part, d'admettre Melle Le Lorc'h, Mlle X... et M. Y... sur la liste des étudiants autorisés, au terme de la même année universitaire, à suivre des études d'odontologie en deuxième année dans la même unité ; que ces annulations ont été prononcées au motif qu'une place supplémentaire en deuxième année du premier cycle des études médicales devait être pourvue par application des dispositions de l'arrêté interministériel du 11 janvier 1995 susvisé ; que le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche demande l'annulation du jugement du 29 mai 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté la tierce opposition qu'il a formée contre les jugements précités ;
Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par Mlle Le Lorc'h, Mlle X... et M. Y... tant en appel qu'en première instance :
Considérant, d'une part, qu'aux termes du 4ème alinéa de l'article 14, de la loi susvisée du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur dans sa rédaction applicable à la date de la décision attaquée : "... le nombre des étudiants admis, ainsi que les modalités de leur admission, à la fin de la première année du premier cycle, à poursuivre des études médicales, odontologiques ou pharmaceutiques, est fixé, chaque année, compte tenu des besoins de la population, de la nécessité de remédier aux inégalités géographiques et des capacités de formation des établissements concernés, par le ministre de la santé et le ministre de l'éducation nationale" ; qu'il résulte de ces dispositions que si le législateur a imparti aux ministres concernés la mission de fixer, compte tenu des critères qu'il définit, le nombre des étudiants admis à poursuivre leurs études en deuxième année du premier cycle des études médicales, la référence aux besoins de la population implique que soit pris en compte le nombre des seuls étudiants susceptibles, de plein droit, de s'installer en France, c'est à dire des étudiants de nationalité française ou ressortissants d'Etats appartenant à la Communauté économique européenne ou de la principauté d'Andorre ; que ne peuvent figurer parmi ceux-ci, contrairement à ce que soutient le ministre, les étudiants marocains et tunisiens qui sont soumis au régime de l'autorisation de séjour ;
Considérant, d'autre part, que l'arrêté du 11 janvier 1995, pris par les ministres concernés pour l'application de la disposition législative précitée, qui fixe le nombre des étudiants de première année du premier cycle des études médicales autorisés à poursuivre leurs études en médecine à la suite des épreuves terminales de l'année universitaire 1994-1995, précise que : "Lorsque, dans la limite du contingent attribué à chaque unité de formation et de recherche, se trouvent classés en rang utile des étudiants étrangers autres que les ressortissants d'Etats appartenant à la Communauté économique européenne ou de la principauté d'Andorre, une majoration égale au nombre d'étudiants étrangers classés en rang utile peut être effectuée, sans que cette majoration puisse excéder 8 % du contingent initialement fixé" ; qu'afin de respecter les critères définis par l'article 14 précité de la loi du 26 janvier 1984, les dispositions précitées de l'arrêté doivent être regardées comme imposant à l'administration concernée d'ajouter à la liste des étudiants admis à poursuivre leur études dans chaque unité de formation et de recherche un nombre égal à celui des étudiants étrangers non ressortissants d'Etats appartenant à la Communauté économique européenne ou de la principauté d'Andorre qui se trouvent classés tant dans le contingent initial que dans la majoration résultant de l'application de l'arrêté, et ce, dans la limite de cette majoration, fixée compte tenu des capacités de formation des établissements concernés ;
Considérant que l'arrêté du 11 janvier 1995 précité a fixé à 66 le nombre d'étudiants de première année du premier cycle d'études médicales autorisés à poursuivre leur études en médecine, à la suite des épreuves terminales de l'année universitaire 1994/1995, à l'unité de formation et de recherche Broussais ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'après avoir affiché la liste des 134 étudiants classés dans l'ordre de mérite à l'issue desdites épreuves terminales, l'administration a invité les intéressés à exprimer leur choix entre les disciplines de médecine et d'odontologie ; que, sur les 66 étudiants ayant opté pour la médecine, figuraient deux étudiants étrangers non ressortissants d'Etats appartenant à la Communauté économique européenne, ou de la principauté d'Andorre ; qu'en application des dispositions précitées de l'arrêté du 11 janvier 1995, deux nouveaux étudiants ont été inscrits sur la liste des admis ;
Considérant, toutefois, que l'étudiant admis 68ème au terme de cette procédure était lui-même étranger au sens de l'arrêté du 11 janvier 1995 ; que cette circonstance imposait à l'administration de porter à 69 le nombre d'étudiants autorisés à poursuivre leurs études médicales en seconde année ; qu'en ne procédant pas à cette majoration qui restait dans la limite des 8 % autorisés par l'arrêté, le recteur a illégalement restreint le nombre d'étudiants admis à s'inscrire en deuxième année du premier cycle des études médicales ; que, dès lors, c'est à bon droit que le tribunal administratif a estimé, par ses jugements en date des 15 novembre et 13 décembre 1995, qu'il avait été fait une application inexacte dudit arrêté ;
Considérant que le moyen tiré par le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche de ce que les jugements contestés seraient à l'origine d'inégalités entre les étudiants de l'unité de formation et de recherche concernée et ceux des autres unités de formation et de recherche est inopérant ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté la tierce opposition qu'il aurait formée contre les jugements susanalysés ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions dudit article, de condamner l'Etat à verser les sommes de 2.000 F à Mlle Le Lorc'h, 2.000 F à Mlle X... et 2.000 F à M. Y... ;
Article 1er : Le recours du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera les sommes de 2.000 F à Mlle Le Lorc'h, 2.000 F à Mlle X... et 2.000 F à M. Y... au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.