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12/09/1996 | FRANCE | N°95PA00651

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1e chambre, 12 septembre 1996, 95PA00651


(1ère Chambre)
VU la décision n° 141134-141183, en date du 24 février 1995, ainsi que les documents visés par celle-ci, enregistrés au greffe de la cour le 15 mars 1995, décision par laquelle le Conseil d'Etat, saisi de deux pourvois en cassation présentés, d'une part, pour M. René Y..., d'autre part pour Mlle X... Tome, a annulé l'arrêt n° 91LY1052-91LY1062 de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 9 juillet 1992 et renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Paris ;
VU I) la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au gref

fe de la cour de Lyon les 4 décembre 1991 et 14 février 1992, puis au g...

(1ère Chambre)
VU la décision n° 141134-141183, en date du 24 février 1995, ainsi que les documents visés par celle-ci, enregistrés au greffe de la cour le 15 mars 1995, décision par laquelle le Conseil d'Etat, saisi de deux pourvois en cassation présentés, d'une part, pour M. René Y..., d'autre part pour Mlle X... Tome, a annulé l'arrêt n° 91LY1052-91LY1062 de la cour administrative d'appel de Lyon en date du 9 juillet 1992 et renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Paris ;
VU I) la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour de Lyon les 4 décembre 1991 et 14 février 1992, puis au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 15 mars 1995, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE GRASSE représenté par son directeur en exercice, par Me LE PRADO, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE GRASSE demande à la cour d'annuler le jugement du 1er octobre 1991 par lequel le tribunal administratif de Nice l'a condamné à payer aux héritiers de Mme Marie-Christine Y... la somme de 600.000 F, à M. Y... la somme de 420.000 F et à Mlle Z... la somme de 180.000 F ;

VU II) la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 9 décembre 1991 puis au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 15 mars 1995, présentée pour Mlle Z... demeurant Les Terrasses de Grasse, ..., par la SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; Mlle Z... demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du 1er octobre 1991 par lequel le tribunal administratif de Nice a condamné le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE GRASSE à lui verser une indemnité de 180.000 F qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la maladie suivie du décès de sa mère Mme Y... contractée lors de son séjour dans cet établissement hospitalier à la suite d'une transfusion sanguine ;
2°) de condamner le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE GRASSE à lui verser la somme de 500.000 F avec intérêts au taux légal à compter du 29 juin 1990 et capitalisation ;
3°) de condamner le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE GRASSE à lui verser la somme de 20.000 F au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel ;

VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 1996 :
- le rapport de Mme KAYSER, président-- rapporteur,
- les observations de Me LE PRADO, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour le centre hospitalier régional de Grasse et celles de la SCP LYON-CAEN, FABIANI, THIRIEZ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour Mlle Z...,
- et les conclusions de M. DACRE-WRIGHT, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que, par décision en date du 24 février 1995, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative de Lyon du 9 juillet 1992 statuant sur les requêtes du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE GRASSE et Mlle Z... etrenvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Paris ;
Considérant que les requêtes du CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE GRASSE et de Mlle Nathalie Z..., enregistrées respectivement au greffe de la cour adminis- trative d'appel de Lyon les 4 décembre et 9 décembre 1991 sont dirigées contre le même jugement en date du 1er octobre 1991 du tribunal administratif de Nice ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la responsabilité :
Considérant que Mme Y..., qui avait subi le 5 février 1980, au CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE GRASSE une intervention chirurgicale au cours de laquelle le chirurgien avait oublié une compresse dans l'abdomen de sa patiente, a dû subir deux nouvelles interventions chirurgicales, d'une part, le 2 mai 1984 pour retirer cette compresse et, d'autre part, le 13 mai 1984 en raison de la survenance d'un syndrome occlusif en rapport avec l'opération du 2 mai ; qu'au cours des deux interventions de mai 1984, trois culots globulaires ont été transfusés à l'intéressée ; que sa contamination par le virus de l'immunodéficience humaine a été révélée en avril 1986 ; que Mme Y... est décédée du syndrome de l'immunodéficience acquise le 16 février 1991 ;
Considérant, d'une part, que si l'oubli de la compresse constitue une faute de nature à engager la responsa- bilité des services hospitaliers et si cette faute a rendu nécessaires les interventions chirurgicales subies par Mme Y... les 2 mai et 13 mai 1984, il résulte de l'instruction que lesdites interventions exigeaient le recours à la transfusion sanguine et que, en l'absence de toute autre cause de contamination, les conséquences dommageables dont M. Y... et Mlle Z... demandent réparation sont dues exclusivement à l'injection d'un sang vicié au cours de ces interventions et par suite, ne sont pas en relation directe avec la faute commise le 5 février 1980 ; que, par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction qu'une autotransfusion était possible en l'espèce ;
Considérant, d'autre part, qu'en vertu de la loi du 21 janvier 1952, modifiée par la loi du 2 août 1961, les centres de transfusion sanguine ont le monopole des opérations de contrôle médical des prélèvements sanguins, du traitement, du conditionnement et de la fourniture aux utilisateurs des produits sanguins ; qu'ainsi le préjudice résultant pour un malade de sa contamination par des produits sanguins transfusés est imputable à la personne morale publique ou privée dont relève le centre de transfusion sanguine qui a élaboré les produits utilisés ; que lorsque la transfusion a été effectuée dans un hôpital qui ne relève pas de cette personne morale, cet hôpital ne peut être responsable des conséquences dommageables de la transfusion ;

Considérant que les produits sanguins transfusés à Mme Y... lors des interventions chirurgicales qu'elle a subies en mai 1984 au CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE GRASSE et qui sont à l'origine de sa contamination par le virus de l'immunodéficience humaine ont été fournis par le centre de transfusion sanguine des Alpes-maritimes qui ne relève pas de ce centre hospitalier ; qu'il suit de là que le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE GRASSE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 1er octobre 1991, le tribunal administratif de Nice l'a condamné à verser des indemnités aux ayants-droit de Mme Y..., au titre du préjudice résultant de la contamination de cette dernière par le virus de l'immunodéficience humaine ;
Sur les conclusions de la Caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes :
Considérant que le tribunal administratif de Nice a rejeté comme irrecevables les conclusions de la Caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes qui n'étaient pas chiffrées ; que ladite caisse ne conteste pas l'irreceva- bilité qui lui a été opposée ; que ses conclusions tendant à ce que ledit centre hospitalier soit condamné à lui verser la somme de 43.171,40 F en remboursement des frais qu'elle a exposés antérieurement au jugement du tribunal ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que l'article R.217 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel dispose : "Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction. Ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties" ; que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu de laisser à la charge du CENTRE HOSPITALIER REGION DE GRASSE les frais d'expertise exposés en première instance, d'un montant de 780 F ;
Sur l'application des dispositions de l'arti- cle L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours adminis- tratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ... à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ..." ; qu'il y a lieu, en application desdites dispositions, de condamner le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE GRASSE à verser, d'une part à M. Y..., d'autre part, à Mlle Z... la somme de 8.000 F ;
Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal adminis- tratif de Nice du 1er octobre 1991 est annulé.
Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER REGIONAL DE GRASSE est condamné à verser, d'une part à Mlle Z..., d'autre part à M. Y... une somme de 8.000 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 3 : Le surplus de la requête et de la demande devant le tribunal administratif de Mlle Z..., les conclusions de M. Y... et les conclusions incidentes de la Caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 95PA00651
Date de la décision : 12/09/1996
Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTE - ETABLISSEMENTS PUBLICS D'HOSPITALISATION.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - PROBLEMES D'IMPUTABILITE - PERSONNES RESPONSABLES - COLLECTIVITE PUBLIQUE OU PERSONNE PRIVEE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - PREJUDICE - CARACTERE DIRECT DU PREJUDICE.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R217, L8-1
Loi 52-854 du 21 juillet 1952
Loi 61-846 du 02 août 1961


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme KAYSER
Rapporteur public ?: M. DACRE-WRIGHT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1996-09-12;95pa00651 ?
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