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30/04/1996 | FRANCE | N°94PA00531;94PA01114;94PA01116

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 30 avril 1996, 94PA00531, 94PA01114 et 94PA01116


VU I) la requête enregistrée le 2 mai 1994 sous le n° 94PA00531 au greffe de la cour présentée par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU TOURISME ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 925799-925801 en date du 21 décembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté en date du 22 novembre 1991 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a déclaré projet d'intérêt général la réalisation d'un collecteur d'eaux usées entre Brie-Comte-Robert et Valenton ;
2°) de rejeter la demande de l'association Les Amis du

Breuil ;
VU II, la requête enregistrée le 28 avril 1994 au secrétariat de...

VU I) la requête enregistrée le 2 mai 1994 sous le n° 94PA00531 au greffe de la cour présentée par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU TOURISME ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 925799-925801 en date du 21 décembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté en date du 22 novembre 1991 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a déclaré projet d'intérêt général la réalisation d'un collecteur d'eaux usées entre Brie-Comte-Robert et Valenton ;
2°) de rejeter la demande de l'association Les Amis du Breuil ;
VU II, la requête enregistrée le 28 avril 1994 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat ; elle a été transmise au greffe de la cour où elle a été enregistrée le 1er août 1994 sous le n° 94PA01114 ; le ministre de l'environnement demande à la cour ;
1°) d'annuler le jugement n° 925799-925801 en date du 21 décembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté en date du 22 novembre 1991 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a déclaré projet d'intérêt général la réalisation d'un collecteur d'eaux usées entre Brie-Comte-Robert et Valenton ;
2°) de rejeter la demande de l'association Les Amis du Breuil ;
VU III, la requête enregistrée le 21 mars 1994 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat ; elle a été transmise à la cour où elle a été enregistrée sous le n° 94PA01116 le 1er août 1994 ; le maire de Brie-Comte-Robert formule les mêmes conclusions que celles visées sous les n° 531 et 1114 ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de l'urbanisme ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 avril 1996 :
- le rapport de Mme MARTIN, conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour l'Association Les Amis du Breuil et celles de la SCP MILON-SIMON, avocat, et associés pour le Syndicat d'agglomération nouvelle de Sénart,
- et les conclusions de Mme MARTEL, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU TOURISME, le MINISTRE DE L'ENVIRONNEMENT et la COMMUNE DE BRIE-COMTE-ROBERT demandent l'annulation du jugement en date du 21 décembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté en date du 22 novembre 1991 du préfet de Seine-et-Marne déclarant projet d'intérêt général la réalisation d'un collecteur d'eaux usées entre Brie-Comte-Robert et Valenton ; que les trois requêtes présentant à juger de la même question, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;
Sur la recevabilité des requêtes :
Considérant, en premier lieu, que l'association Les Amis du Breuil fait valoir que le préfet de Seine-et-Marne, auteur de l'arrêté annulé, n'a pas fait appel ; que, toutefois, il résulte des dispositions de l'article R.117 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel que seul le ministre est compétent pour représenter l'Etat en appel ;
Considérant, en deuxième lieu, que si l'association soutient que les notifications du jugement ont été faites entre le 22 et 25 janvier 1994, il résulte des mentions du jugement que celui-ci n'a pas été notifié au ministre, mais au seul préfet ; qu'il résulte des dispositions de l'article R.216 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel qu'en pareille circonstance, le délai d'appel n'a pas couru ; que, par suite, en tout état de cause, les requêtes des deux ministres sont recevables ;
Considérant, en troisième lieu, que l'association fait valoir que le maire de la COMMUNE DE BRIE-COMTE-ROBERT ne justifie pas d'une délibération du conseil municipal l'autorisant à faire appel ; que malgré la demande qui lui en a été faite, celui-ci n'a produit aucune délibération l'autorisant à agir ; que, par suite, sa requête est irrecevable ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les requérants font valoir que le jugement a été rendu sans que soit respecté le principe de la procédure contradictoire ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'association a produit le 9 décembre 1993, soit cinq jours avant l'audience, un mémoire accompagné de vingt-quatre pièces ; que les motifs du jugement font apparaître que les premiers juges se sont en partie fondés sur ce mémoire et ses annexes, notamment, sur le moyen nouveau tiré du coût financier de l'opération, pour annuler l'arrêté du préfet de Seine-et-Marne ; que dès lors que les documents n'ont été communiqués à l'administration que le jour de l'audience, le jugement est irrégulier et doit être annulé ; que l'affaire étant en état, il y a lieu d'évoquer les conclusions de la demande et d'y statuer ;
Sur la qualité à agir de l'association :
Considérant qu'aux termes des statuts de l'association, celle-ci a pour but : "La sauvegarde du patrimoine architectural, de l'environnement, de la faune et de la flore de Combs-la-Ville et des communes limitrophes de la vallée de l'Yerre" ; que rien n'établit, comme le soutient le maire de Combs-la-Ville que cette action en justice ait été engagée pour la seule satisfaction des intérêts de ses dirigeants et non dans le but de répondre aux objectifs définis par le statut ;
Sur le fond :

Considérant que la réalisation du collecteur d'eaux usées entre BRIE-COMTE-ROBERT et Valenton via Combs-La-Ville entre dans le cadre de l'opération "Seine propre" engagée notamment par le conseil régional d'Ile-de-France avec le Conseil général de Seine-et-Marne dans l'objectif d'améliorer la qualité des rivières irriguant la région, en favorisant le traitement des eaux usées par de grosses unités d'épuration ; que le projet a plus particulièrement pour objet, eu égard à sa présentation dans l'étude d'impact, la suppression des stations d'épuration de Combs-la-Ville qui présentait de multiples inconvénients et de Brie-Comte-Robert dont la capacité de traitement était arrivée à saturation, ainsi que la suppression de postes de relevage du réseau d'assainissement de Combs-la-Ville et l'assainissement futur du plateau d'Egrenay ; que l'association soutient que cette opération est dépourvue d'utilité publique, compte tenu des inconvénients qu'elle présente ;
Considérant qu'une opération ne peut légalement être déclarée d'intérêt général au sens de l'article R.121-3 du code de l'urbanisme que si notamment le coût financier et, éventuellement, l'atteinte à l'environnement qu'elle comporte, ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;
Considérant, en premier lieu, que si, aux termes de l'étude d'impact, le collecteur litigieux doit permettre la déconnection de la station d'épuration de Combs-la-Ville, il est reconnu par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT dans ses écritures d'appel, que c'est un collecteur de soixante-dix mètres de long qui, réalisé en 1994 indépendamment du projet litigieux, a conduit à la déconnection de cette installation ; que, toutefois, même si ne subsiste comme avantage pour la commune que la suppression de deux postes de relèvement, l'intérêt général du projet n'en demeure pas moins incontestable et doit être apprécié tant au niveau des deux communes que, le cas échéant, en ce qui concerne les communes environnantes ; que l'intérêt général du projet pour Brie-Comte-Robert n'est pas critiqué ; que l'association ne conteste pas utilement que le dimensionnement du collecteur permettra la prise en charge de l'urbanisation future ; qu'enfin, le projet a pour but de supprimer le rejet de déchets polluants dans l'Yerre ;
Considérant, en deuxième lieu, que si, aux termes de l'étude d'impact, en raison de l'enfouissement du collecteur, sa réalisation nécessite l'ouverture d'une trouée de 15 mètres de large dans un espace boisé classé à protéger en vertu du plan d'occupation des sols applicable en 1991 à Combs-la-Ville, d'une part, dans le cadre d'une procédure fondée sur l'article R.121-3 du code de l'urbanisme, les documents d'urbanisme communaux sont soumis à une révision, d'autre part, la servitude, une fois les travaux achevés, ne portera que sur une bande de trois mètres de large, qui sera d'ailleurs reboisée, sous réserve des nécessités d'accès au collecteur ; que, dès lors, l'atteinte portée aux espaces boisés de la commune sera limitée ;

Considérant, en troisième lieu, que l'association fait valoir que le projet longe le périmètre de protection d'un captage d'eau potable, à flanc d'un coteau boisé, dans un secteur qui connaîtrait des risques de glissement de terrain susceptibles d'entraîner la rupture des canalisations d'eaux usées et la pollution des eaux potables de la région ; que le collecteur sera réalisé en fonte sur Combs-la-Ville, et qu'il sera muni de joints pouvant résister à des déplacements de terrain ; que si la commune a fait l'objet d'un arrêté ministériel en date du 4 décembre 1991 reconnaissant l'état de catastrophe naturelle en raison de mouvements de terrains consécutifs à la sécheresse, les désordres ont affecté des maisons aux fondations superficielles dont la majorité était située à distance du tracé prévu pour le collecteur ; que, d'ailleurs, si le rapport du géologue du bureau de recherche géologique et minière souligne que des tranchées peuvent aggraver les mouvements de terrain, l'étude d'impact du syndicat d'agglomération nouvelle fait apparaître que "du fait des terrains très humides" que traverse le collecteur, toutes précautions seront prises pour un drainage optimal des eaux de pluie à l'intérieur de la tranchée recevant la canalisation ; qu'au surplus, le collecteur ne passe à la limite du périmètre de protection qu'en deux endroits sur une longueur très restreinte ;
Considérant, en quatrième lieu, que l'admi-nistration fait valoir, sans être contredite, que seul le projet litigieux permet un écoulement gravitaire normal des eaux du collecteur ; que, de ce fait, les coûts ultérieurs de fonctionnement sont limités ; que si le tracé suivi nécessite cependant le passage en siphon sous l'Yerre suivi d'une remontée du collecteur de vingt mètres, le seul ouvrage nécessaire sera un "aéroéjecteur" destiné à fonctionner de manière intermittente pour assurer l'efficacité du système de franchissement de la rivière ; que les autres tracés qui ne permettent pas l'écoulement gravitaire nécessiteraient la création de stations de pompage coûteuses et laisseraient subsister des risques de rejet en milieu naturel en cas de panne ; qu'en outre, l'administration fait valoir que certains tracés, et notamment celui par Servon soutenu par l'association, se heurtent à l'obligation de créer le collecteur sur une longueur de 1.850 m sous la voirie de Brie-Comte-Robert, alors que le projet retenu ne comporte que 500 m de canalisation enfouie ; qu'enfin, elle fait également valoir, sans être utilement contredite par l'association, qui se borne à faire référence au rapport de la direction départementale de l'équipement de 1987 qui ne mentionne pas ce point, que le collecteur de Santeny ne pourrait prendre en compte la population de Brie-Comte-Robert ; que pour ces raisons et notamment la dernière, le tracé proposé répond seul aux objectifs recherchés, sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur les coûts financiers ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les éventuels inconvénients du projet ne sont pas de nature eu égard aux avantages qu'il présente, à lui ôter son caractère d'utilité générale ;
Article 1er : Le jugement n° 925799-925801 du tribunal administratif de Versailles en date du 21 décembre 1993 est annulé.
Brticle 2 : La demande de l'Association Les Amis du Breuil est rejetée.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 94PA00531;94PA01114;94PA01116
Date de la décision : 30/04/1996
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - NOTIONS GENERALES - NOTION D'UTILITE PUBLIQUE - EXISTENCE - EAUX - Construction d'un collecteur d'eaux usées dans le cadre de l'opération "Seine propre".

34-01-01-02-02, 68-01-002-01 Déclaration d'intérêt général, en application des dispositions de l'article R. 121-3 du code de l'urbanisme, de travaux ayant pour objet la réalisation d'un collecteur d'eaux usées entre Brie-Comte-Robert et Valenton, dans le cadre de l'opération "Seine propre" engagée notamment par le conseil régional d'Ile-de-France avec le conseil général de Seine-et-Marne afin d'améliorer la qualité des rivières irriguant la région, en favorisant le traitement des eaux usées par de grosses unités d'épuration. Cette opération doit permettre le remplacement de stations d'épuration présentant de multiples inconvénients ou dont la capacité de traitement est arrivée à saturation, ainsi que la suppression des postes de relevage du réseau d'assainissement de Combs-la-Ville et l'assainissement futur du plateau d'Egrenay. Eu égard à ces avantages, ni l'ouverture temporaire d'une trouée de 15 m de large dans un espace boisé classé, ni la servitude permanente de 3 m de large qui grèvera ensuite cet espace, ni les risques, étroitement limités, entrainés par le passage du collecteur dans une zone susceptible de glissements de terrain, ne sont de nature à ôter au projet son caractère d'utilité publique, compte tenu, en outre, du fait que le parti adopté permet seul un écoulement gravitaire normal des eaux, moyennant un seul ouvrage de remontée.

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PLANS D'AMENAGEMENT ET D'URBANISME - DISPOSITIONS GENERALES COMMUNES AUX SCHEMAS DIRECTEURS ET AUX PLANS D'OCCUPATION DES SOLS - PROJETS D'INTERET GENERAL - Construction d'un collecteur d'eaux usées dans le cadre de l'opération "Seine propre" - Utilité publique - Existence en l'espèce.


Références :

Code de l'urbanisme R121-3
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R117, R216


Composition du Tribunal
Président : M. Beyssac
Rapporteur ?: Mme Martin
Rapporteur public ?: Mme Martel

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1996-04-30;94pa00531 ?
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