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29/02/1996 | FRANCE | N°93PA00986

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1e chambre, 29 février 1996, 93PA00986


(1ère Chambre)
VU l'arrêt en date du 23 juin 1994, par lequel, avant de statuer sur les conclusions de Mme Monique DENOU tendant à la condamnation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à réparer le préjudice qu'elle subit du fait de sa contamination par le virus de l'immunodéficience humaine, la cour a ordonné une expertise, ensemble l'ordonnance en date du 15 juillet 1994, par laquelle le président de la cour administrative d'appel a désigné M. le professeur Y... comme expert ;
VU, enregistré au greffe de la cour le 11 mai 1995, le rapport déposé par l'expert ;

VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de la santé publique ;
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(1ère Chambre)
VU l'arrêt en date du 23 juin 1994, par lequel, avant de statuer sur les conclusions de Mme Monique DENOU tendant à la condamnation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à réparer le préjudice qu'elle subit du fait de sa contamination par le virus de l'immunodéficience humaine, la cour a ordonné une expertise, ensemble l'ordonnance en date du 15 juillet 1994, par laquelle le président de la cour administrative d'appel a désigné M. le professeur Y... comme expert ;
VU, enregistré au greffe de la cour le 11 mai 1995, le rapport déposé par l'expert ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code de la santé publique ;
VU la loi du 21 juillet 1952 modifiée par la loi du 2 août 1961 ;
VU la loi n° 91-1406 du 31 décembre 1991 portant diverses dispositions d'ordre social ;
VU le décret n° 54-65 du 16 janvier 1954 ;
VU le décret n° 92-759 du 31 juillet 1992 modifié ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 février 1996 :
- le rapport de Mme KAYSER, président-rapporteur,
- les observations de la SCP MASSE-DESSEN, GEORGES THOUVENIN, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour les consorts X... et celles du cabinet FOUSSARD, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris,
- et les conclusions de M. DACRE-WRIGHT, commissaire du Gouvernement;

Sur la responsabilité :
Considérant que M. Louis DENOU, Mme Sylvie DENOU, M. Jean-Louis DENOU et M. Dominique DENOU, venant aux droits de Mme Monique DENOU, décédée, pour demander la condamnation de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à réparer le préjudice subi par Mme DENOU du fait de sa contamination par le virus de l'immunodéficience humaine, soutiennent que la responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris est engagée à raison des transfusions de produits sanguins pratiquées par les services de l'hôpital Paul-Brousse lors de l'intervention chirurgicale subie le 7 juin 1985 par Mme DENOU ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de la loi du 21 juillet 1952 modifiée par la loi du 2 août 1961, les centres de transfusion sanguine ont le monopole des opérations de collecte du sang et ont pour mission d'assurer le contrôle médical des prélèvements, le traitement, le conditionnement et la fourniture aux utilisateurs des produits sanguins ; qu'eu égard tant à la mission qui leur est ainsi confiée par la loi qu'aux risques que présente la fourniture de produits sanguins, les centres de transfusion sanguine sont responsables, même en l'absence de faute, des conséquences dommageables de la mauvaise qualité des produits fournis ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport de l'expert désigné en application de l'arrêt précité, que la contamination de Mme DENOU par le virus de l'immunodéficience humaine résulte des transfusions de produits sanguins qu'elle a reçus lors d'une transplantation hépatique pratiquée le 8 juin 1985 dans le service de chirurgie digestive de l'hôpital Paul-Brousse et qu'en l'absence de tout autre élément ayant concouru à sa réalisation, le dommage subi par Mme DENOU est uniquement imputable auxdits produits qui ont été fournis par le centre de transfusion de cet hôpital, relevant de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ; que, dès lors, la responsabilité de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à l'égard des consorts X... est engagée, même si aucune faute n'est établie à son encontre ;
Considérant que les consorts X... sont, par suite, fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a, par le jugement attaqué, rejeté la requête présentée par Mme DENOU ;
Sur la réparation :

Considérant qu'il y a lieu, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des troubles de toute nature subis par la victime, de fixer à la somme de 2.000.000 F la réparation du préjudice subi par Mme DENOU du fait de sa contamination par le virus de l'immunodéficience humaine ;
Mais considérant qu'en application des dispositions de l'article 47 de la loi du 31 décembre 1991 et de l'article 17 du décret du 31 juillet 1992 modifié pris pour son application, le Fonds d'indemnisation des transfusés et hémophiles contaminés par le virus de l'immunodéficience humaine a informé la cour administrative d'appel que l'offre d'indemnisation de 1.047.000 F faite à Mme DENOU au titre du même préjudice, a été acceptée par Mme Monique DENOU ; qu'ainsi il convient de déduire la somme de 1.047.000 F du montant de la réparation fixée ci-dessus ; que, dès lors, il y a lieu de condamner l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à verser aux consorts X... une indemnité de 953.000 F ;
Sur les intérêts :
Considérant que les consorts X... ont droit aux intérêts au taux légal de la somme de 953.000 F, à compter de la date de réception de la demande préalable à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris en date du 27 décembre 1989 ;
Sur la capitalisation des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée les 19 août 1993 et 23 juin 1995 ; qu'à chacune de ces dates, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de mettre les frais d'expertise, d'un montant de 3.500 F à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 3 mars 1993 est annulé.
Article 2 : l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris est condamnée à verser aux consorts X... la somme de 953.000 F.
Article 3 : La somme de 953.000 F portera intérêts au taux légal à compter du 27 décembre 1989. Les intérêts échus les 19 août 1993 et 23 juin 1995 seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 : Les frais d'expertise, d'un montant de 3.500 F, sont mis à la charge de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête des consorts X... est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 93PA00986
Date de la décision : 29/02/1996
Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - FONDEMENT DE LA RESPONSABILITE - RESPONSABILITE SANS FAUTE - RESPONSABILITE FONDEE SUR LE RISQUE CREE PAR CERTAINES ACTIVITES DE PUISSANCE PUBLIQUE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - PROBLEMES D'IMPUTABILITE - PERSONNES RESPONSABLES - COLLECTIVITE PUBLIQUE OU PERSONNE PRIVEE.

SANTE PUBLIQUE - UTILISATION THERAPEUTIQUE DE PRODUITS D'ORIGINE HUMAINE.


Références :

Code civil 1154
Décret 92-759 du 31 juillet 1992 art. 17
Loi 52-854 du 21 juillet 1952
Loi 61-846 du 02 août 1961
Loi 91-1406 du 31 décembre 1991 art. 47


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme KAYSER
Rapporteur public ?: M. DACRE-WRIGHT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1996-02-29;93pa00986 ?
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