Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 5 août 1993, présentée pour la société anonyme Franco-Suisse Gestion, dont le siège social est ..., par Me X..., avocat ; la société demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 8904940/1 en date du 5 janvier 1993 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en réduction du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1986 ;
2°) de lui accorder la décharge sollicitée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 novembre 1995 :
- le rapport de Mme MARTIN, conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour la société Franco-Suisse Gestion,
- et les conclusions de Mme MARTEL, commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment : ...2. Les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation" ; qu'aux termes de l'article 38 sexies de l'annexe III au même code : "La dépréciation des immobilisations qui ne se déprécient pas de manière irréversible, notamment les terrains, les fonds de commerce, les titres de participation, donne lieu à la constitution de provisions dans les conditions prévues aux articles 39-1-5° et 54 quinquies du code général des impôts" ; que si le code du commerce aménagé par la loi du 30 avril 1983 et le décret du 29 novembre 1983 ne prévoient ni le principe ni la durée de l'amortissement du fonds de commerce, le plan comptable général approuvé par un arrêté en date du 27 avril 1982 mentionne un compte 2807 "amortissement du fonds commercial" ;
Considérant que la société requérante, qui exerce l'activité d'administrateur de biens, a acquis un portefeuille de mandats de gestion d'immeubles ; qu'estimant que cet élément d'actif était appelé à se déprécier, elle l'a porté en amortissement pour 20 % de son montant et a déduit la somme correspondante des résultats imposables de l'exercice 1986 ;
Considérant que les mandats de gestion acquis par la société constituent des éléments incorporels de son fonds de commerce ; qu'un élément d'actif incorporel peut, en vertu des dispositions précitées du 2° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, donner lieu à une dotation annuelle à un compte d'amortissement s'il est normalement prévisible, lors de sa création ou de son acquisition par l'entreprise, que cet élément se déprécie, c'est-à-dire que ses effets bénéfiques sur l'exploitation sont amenés à prendre fin ; que tel est le cas pour les mandats de gestion que détiennent les administrateurs de biens ; que, par suite, cet élément d'actif peut faire l'objet chaque année d'une dotation à un compte d'amortissement, en retenant un taux calculé selon la durée attendue de ses effets bénéfiques sur l'exploitation, telle qu'elle est admise par les usages de la profession ou justifiée par des circonstances particulières à l'entreprise et dont celle-ci doit alors établir la réalité ;
Considérant que la société apporte la preuve, par les éléments statistiques qu'elle produit, que le taux de 20 % qu'elle a retenu correspond à la durée d'amortissement des mandats de gestion qu'elle détient ; que, par suite, elle est fondée à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit tenu compte de l'amortissement pratiqué dans les conditions susindiquées ;
Article 1er : L'article 2 du jugement n° 8904940/1 du tribunal administratif de Paris en date du 5 janvier 1993 est annulé.
Article 2 : La société Franco-Suisse Gestion est déchargée du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1986 du fait de la réintégration dans ses résultats d'une somme de 927.344 F.