Vu la requête enregistrée au greffe de la cour le 29 juin 1993, présentée pour M. X... demeurant Faaha, commune de Tahaa ; M. X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 92-00326 en date du 20 avril 1993 par lequel le tribunal administratif de Papeete l'a condamné à remettre les lieux en l'état dans un délai de deux mois, faute de quoi il y sera procédé d'office par l'administration à ses frais ;
2°) de rejeter le déféré du haut-commissaire de la république en Polynésie ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 71-1060 du 24 décembre 1971 relative à la délimitation des eaux territoriales françaises ;
Vu la loi n° 84-820 du 6 septembre 1984 portant statut du territoire de la Polynésie française modifiée par la loi du 12 juillet 1990 ;
Vu la loi organique n° 95-173 du 20 février 1995 portant dispositions diverses relatives aux territoires d'outre-mer ;
Vu les délibérations n° 77-142 du 29 décembre 1977 et n° 78-128 du 3 août 1978 de l'assemblée territoriale de la Polynésie française ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 septembre 1995,
- le rapport de Mme ALBANEL, conseiller,
- et les conclusions de Mme BRIN, commissaire du Gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête :
Considérant que M. X... conteste l'existence de l'infraction relevée à son encontre, résultant de l'exécution de travaux de remblai dans une partie du lagon située au droit de sa propriété à Faaha, commune de Tahaa ; que contrairement à ce que soutient le ministre des départements et territoires d'outre-mer sa requête d'appel comporte un exposé suffisant des faits et moyens auxquels il entend se référer ;
Considérant qu'aux termes de l'article 45 du décret du 22 juillet 1957 : "... L'assemblée territoriale délibère sur tous projets établis par le chef du territoire en conseil de gouvernement relatifs aux objets ci-après : g) classement, déclassement du domaine public du territoire, et notamment ...des rades, cours d'eau, canaux, lacs, lagons et étangs" ; que ce texte a été abrogé par l'article 77 de la loi susvisée du 12 juillet 1977 qui prévoit également en son article 62 que "l'Etat conserve ses droits de souveraineté et de propriété sur son domaine public ... maritime" ;
Considérant que l'article 2 de la loi du 6 septembre 1984 portant statut du territoire de la Polynésie française modifiée par la loi du 12 juillet 1990 dispose que les autorités du territoire sont compétentes dans toutes les matières qui ne sont pas réservées à l'Etat en vertu de l'article 3 de cette même loi ; que cet article précise, notamment, dans son avant-dernier alinéa que "L'Etat exerce ses droits de souveraineté et de propriété sur son domaine public ... maritime" ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées - ainsi d'ailleurs que cela a été confirmé lors des travaux préparatoires de la loi susvisée du 20 février 1995 (J.O. Sénat, séance du 11 janvier 1995, débats : p. 141 et suivantes) - que la conservation et la protection du domaine public maritime en Polynésie relèvent de la souveraineté exclusive de l'Etat ; qu'ainsi, le territoire ne pouvait légalement, sur le fondement de la délibération de l'assemblée territoriale du 3 août 1978, réglementer la répression des atteintes à la conservation de rivages de la mer sans porter atteinte aux droits de propriété et de souveraineté reconnus à l'Etat ; qu'ainsi la notification d'un procès-verbal de contravention de grande voirie à l'encontre de M. X... pour la réalisation d'un mur et des travaux de remblai situés sur le domaine public maritime de l'Etat, a par suite eu lieu en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 3 de la loi du 6 septembre 1984 ;
Considérant, dès lors, que la condamnation litigieuse est dépourvue de toute base légale ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'annuler le jugement en date du 20 avril 1992 du tribunal administratif de Papeete et de rejeter le déféré du haut-commissaire ;
Article 1er : Le jugement n° 92-00326 en date du 20 avril 1992 du tribunal administratif de Papeete est annulé.
Article 2 : Le déféré du haut-commissaire de la république en Polynésie est rejeté.