VU la requête sommaire et le mémoire complémentaire présentés pour M. X... par la SCP LE GRIEL, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; ils ont été enregistrés les 3 août et 10 novembre au greffe de la cour administrative d'appel ; M. X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 874032 en date du 11 mai 1993 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 120.000 F diminuée de 27.431,25 F déjà perçue au titre des fonctions exercées du 3 décembre 1980 au 21 septembre 1981 ;
2°) de lui accorder l'indemnité sollicitée augmentée des intérêts et des intérêts des intérêts ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU l'ordonnance n° 59-244 en date du 4 février 1959 portant statut général des fonctionnaires ;
VU l'arrêté interministériel en date du 16 mars 1970 ;
VU l'arrêté interministériel en date du 6 octobre 1971 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 1995 :
- le rapport de Mme MARTIN, conseiller,
- les observations de la SCP LE GRIEL, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour M. X...,
- et les conclusions de Mme MARTEL, commissaire du Gouvernement ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions combinées des articles 34 et 38 de l'ordonnance n° 59-244 du 4 février 1959 portant statut général des fonctionnaires, alors applicable, qu'un fonctionnaire placé par son administration d'origine en détachement auprès d'une autre collectivité ou organisme, qui accepte de le recevoir, doit être nommé dans son corps de détachement à la date fixée conjointement par ces deux organismes ;
Considérant, d'autre part, que l'article 2 de l'arrêté interministériel du 16 mars 1970, pris pour l'application du décret du 28 mars 1967 fixant les modalités de calcul de la rémunération des personnels de l'Etat et des établissements publics de l'Etat à caractère administratif en service à l'étranger, prévoit qu'entrent notamment dans le champ d'application de ce décret et de cet arrêté "les fonctionnaires en position de détachement au sens de l'article 34-2° de l'ordonnance du 4 février 1959 ... désignés par arrêté du ministre des affaires étrangères pris en vertu du décret du 28 mars 1967 susvisé et du présent arrêté, en vue d'exercer, soit une mission d'enseignement, soit des fonctions administratives" ; qu'aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 16 mars 1970 : "Les fonctionnaires en position de détachement perçoivent le traitement correspondant à l'indice hiérarchique qu'ils détiennent dans leurs corps d'origine" ; qu'enfin les dispositions de cet arrêté ont été étendues par l'arrêté interministériel du 6 octobre 1971 au personnel enseignant en service dans les établissements d'enseignement français de l'Algérie, du Maroc et de la Tunisie à compter du 1er janvier 1969 ;
Considérant que M. X..., instituteur titulaire alors en disponibilité pour convenances personnelles, a accepté d'effectuer à partir du 3 décembre 1980 le remplacement d'un professeur de mathématiques au lycée Lyautey de Casablanca (Maroc) ; que le ministre des affaires étrangères ne lui a versé pour la période du 3 décembre 1980 au 21 septembre 1981 qu'une rémunération de vacataire et ne l'a nommé et rémunéré sur un poste d'enseignant en détachement qu'à compter de cette dernière date ; qu'il résulte de l'instruction et notamment de la lettre adressée par le ministre des affaires étrangères au ministre de l'éducation nationale le 21 mai 1984, que le détachement de l'intéressé devait être effectif à compter du 3 décembre 1980 et qu'il incombait au ministre des affaires étrangères, conformément à sa propre demande auprès de l'administration d'origine de M. X..., de nommer l'intéressé à compter de cette date sur un poste d'enseignant titulaire au lycée Lyautey ; qu'en ne nommant M. X... dans son corps de détachement qu'au 21 septembre 1981 et non à la date du 3 décembre 1980, le ministre des affaires étrangères a commis une illégalité fautive, qui engage sa responsabilité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer une indemnité correspondant au traitement qu'il aurait dû percevoir pour la période du 3 décembre 1980 au 21 septembre 1981 dans son corps d'origine, diminuée des 27.431,25 F déjà perçus, indemnité qui ne pourra toutefois excéder les 120.000 F mentionnés dans sa requête d'appel ;
Sur la demande d'intérêts et de capitalisation des intérêts :
Considérant que la somme accordée doit être augmentée des intérêts à compter de la demande présentée à l'administration le 31 décembre 1986 ;
Considérant qu'il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts échus à la date du 3 août 1993 ;
Article 1er : Le jugement n° 874032 en date du 11 mai 1993 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à payer à M. X... une indemnité correspondante au traitement qu'il aurait dû percevoir pour la période du 3 décembre 1980 au 21 septembre 1981 compte tenu de l'indice hiérarchique qu'il détenait dans son corps d'origine, diminuée des 27.431,25 F, sans que l'indemnité puisse excéder 120.000 F.
Article 3 : Les intérêts échus le 3 août 1993 seront capitalisés à compter de cette date pour produire intérêts.