VU la requête présentée pour M. Michel X... demeurant ..., par Me AUGEREAU, avocat à la cour ; elle a été enregistrée au greffe de la cour le 4 juin 1993 ; M. X... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 8810184/2 du 1er décembre 1992 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge du rappel de droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été assigné au titre de l'année 1979, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge du rappel de taxe contesté ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 18 octobre 1994 :
- le rapport de Mme MARTEL, conseiller,
- et les conclusions de Mme de SEGONZAC, commissaire du Gouvernement ;
Sur le rappel de taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant qu'aux termes de l'article 259. du code général des impôts : "Les prestations de services sont imposables en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ... " ; qu'aux termes de l'article 259 A. : "Par dérogation aux dispositions de l'article 259, sont imposables en France : ... 4° Les prestations ci-après lorsqu'elles sont matériellement exécutées en France : prestations culturelles, artistiques ... et prestations accessoires ainsi que leur organisation ...." ; qu'aux termes de l'article 259 B. : "Egalement par dérogation aux dispositions de l'article 259, les prestations suivantes : cessions et concessions de droits d'auteurs ... prestations de publicité ; .... ne sont pas imposables en France, même si le prestataire est établi en France, lorsque le bénéficiaire est établi hors de la communauté économique européenne ou qu'il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée dans un autre Etat membre de la communauté" ;
Considérant que M. X..., qui exerce à titre libéral la profession de "photographe créateur d'édition et de publicité", était assujetti, sur option, à la taxe sur la valeur ajoutée au titre, notamment, de l'année 1979 en litige ; que l'intéressé n'ayant pas souscrit dans le délai légal sa déclaration annuelle de chiffre d'affaires de ladite année a fait l'objet, dans le cadre d'un contrôle sur pièces de son dossier, d'une taxation d'office dont il n'est pas contesté qu'elle a été régulièrement mise en oeuvre sur le fondement de l'article L.66-3° du livre des procédures fiscales ; que M. X... ne conteste pas en appel que les droits de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 6.728 F résultent de l'encaissement en 1979 de trois factures de travaux photographiques au profit de clients établis en Belgique et en Hollande pour un montant hors taxe de 38.229 F ; qu'il soutient que les prestations facturées ne sont pas imposables à la taxe sur la valeur ajoutée, à titre principal, en vertu de l'article 259 B. du code général des impôts et, à titre subsidiaire, en vertu de l'article 259-A-4° du même code ;
Considérant, en premier lieu, que M. X... fait valoir qu'il détient en tant qu'auteur d'oeuvres photographiques des droits patrimoniaux bénéficiant des protections prévues par la loi n° 57-298 du 11 mars 1957 modifié sur la propriété littéraire et artistique et qu'en cette qualité il réalise des prestations de cessions de droits d'auteurs entrant dans le champ d'application de l'article 259 B. du code général des impôts ; que, toutefois, pour bénéficier des dispositions dérogatoires prévues par ce texte, il appartient à l'intéressé, prestataire établi en France, de justifier, notamment, de la réalité des cessions de droits de cette nature ; que si, sur ce point, le requérant se prévaut de factures et d'une brochure dans laquelle il est mentionné comme photographe, il résulte de leur examen que ces pièces ne comportent aucune énonciation précise et expresse de nature à établir que les prestations litigieuses facturées en journées de prises de vues ou de travaux de reportage assorties de frais de déplacement et de fournitures, sont la contrepartie d'une cession ou concession effective de droits d'auteurs ; qu'en outre, la circonstance que M. X... ait obtenu d'un contrefacteur une indemnité pour reproduction, sans son accord préalable, de clichés dont il était l'auteur, est sans influence sur l'appréciation des éléments de faits sus-indiqués au regard de l'existence alléguée d'une transaction relative à des droits d'auteur ; qu'ainsi le requérant n'est pas fondé à soutenir que le montant des factures en cause n'était pas imposable à la taxe sur la valeur ajoutée en France en vertu des dispositions de l'article 259 B. relatives aux droits d'auteurs ;
Considérant, en deuxième lieu, que s'agissant de la facture de 29.645 F établie au nom d'une entreprise de publicité ayant son siège en Belgique, M. X... invoque les mêmes dispositions de l'article 259 B, en tant qu'elles s'appliquent également aux "prestations de publicité" ; qu'il ressort des énonciations de cette facture et du bon de commande y afférent que les travaux de prise de vue réalisés par le requérant ont eu pour objet l'édition d'un catalogue de publicité pour des bijoux de la collection d'un joaillier belge ; que cette opération constituait dès lors une prestation de publicité au sens de l'article 259 B. ; qu'en outre, il n'est pas contesté, ce qui ressort d'ailleurs du bon de commande en cause, que le bénéficiaire de cette prestation de publicité a la qualité d'assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en Belgique ; que, par suite, M. X... est fondé à soutenir que le montant de cette facture n'était pas imposable en France en application de l'article 259 B. du code ;
Considérant, en dernier lieu, que s'agissant des deux factures relatives à des prestations qui n'entrent pas, ainsi qu'il a été dit dans le champ d'application de l'article 259 B. du code général des impôts, M. X... ne peut utilement invoquer, à titre subsidiaire, les dispositions précitées de l'article 259 A-4° du même code, dès lors, qu'ayant le siège de son activité en France, ses prestations, à les supposer même matériellement exécutées en Belgique, demeurent imposables en France en vertu de l'article 259. du code ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande à hauteur d'un montant de droits de taxe sur la valeur ajoutée de 5.217,52 F ;
Sur les conclusions tendant à la condamnation de l'Etat au paiement d'une somme de 7.000 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circons-tances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 3.000 F ;
Article 1er : Il est accordé à M. X..., au titre de la période couvrant l'année 1979, la décharge d'un montant de droits de taxe sur la valeur ajoutée de 5.217,52 F ainsi que des pénalités y afférentes.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 1er décembre 1992 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat est condamné à payer à M. X..., au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux admi-nistratifs et des cours administratives d'appel, la somme de 3.000 F.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.