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04/10/1994 | FRANCE | N°92PA01347

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 04 octobre 1994, 92PA01347


VU la requête, présentée pour la société à responsabilité limitée WLADIMIR Y... représentée par son gérant M. Wladimir Y... et dont le siège social est sis ... ; elle a été enregistrée au greffe de la cour le 7 décembre 1992 ; la société WLADIMIR Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 8900560/1 du 12 mai 1992 par lequel le tribunal administratif de Paris a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1980 à 1983, ainsi que des pénalités y aff

érentes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
VU les autres ...

VU la requête, présentée pour la société à responsabilité limitée WLADIMIR Y... représentée par son gérant M. Wladimir Y... et dont le siège social est sis ... ; elle a été enregistrée au greffe de la cour le 7 décembre 1992 ; la société WLADIMIR Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 8900560/1 du 12 mai 1992 par lequel le tribunal administratif de Paris a partiellement rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des années 1980 à 1983, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 1994 :
- le rapport de Mme MARTEL, conseiller,
- et les conclusions de Mme de SEGONZAC, commissaire du Gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par deux décisions, en date des 20 avril 1993 et 25 avril 1994, postérieures à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de Paris-Ouest a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 149.247 F du complément d'impôt sur les sociétés auquel la société à responsabilité limitée WLADIMIR Y... a été assujettie au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1981 ; que les conclusions de la requête de la société WLADIMIR Y... relatives à l'imposition dudit exercice sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la recevabilité des conclusions relatives aux redressements afférents aux frais de déplacements des exercices clos en 1980 et 1982 :
Considérant que par le jugement attaqué le tribunal administratif a accordé à la société requérante la décharge en droits et pénalités des compléments d'impôt sur les sociétés résultant de ce chef de redressement ; que, par suite, les conclusions de la requête sont irrecevables ;
Sur les conclusions restant en litige :
En ce qui concerne la procédure d'impo-sition :
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles L.57, L.59 et R.57-1 du livre des procédures fiscales qu'en cas de maintien du désaccord entre l'administration et le contribuable après la production par ce dernier d'observations dans le délai d'un mois suivant la notification de redressement, le contribuable dispose d'un nouveau délai de trente jours pour demander que le litige soit soumis à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;
Considérant que la société WLADIMIR Y..., qui exerce à Paris l'activité de loueur de voitures automobiles avec chauffeur, a fait l'objet en 1984, d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés, sur les exercices clos les 31 décembre des années 1980 à 1983 ; que des redres-sements lui ont été notifiés à l'issue de ce contrôle selon la procédure de taxation d'office pour l'exercice 1982 et selon la procédure de redressement contra-dictoire pour les exercices 1980 et 1983 ; que par lettre en date du 2 décembre 1985 portant réponse aux observations du contribuable, l'administration a confirmé les redressements envisagés au titre de ces exercices en litige ; que si la société requérante prétend que par lettre en date du 2 janvier 1986, elle a réitéré son désaccord sur les redressements maintenus à sa charge et a demandé que ce différend soit soumis à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, elle ne justifie cependant pas en se bornant à produire en appel une copie de cette "lettre recommandée avec AR" de l'envoi effectif de ce pli à l'administration ; qu'ainsi la société WLADIMIR Y..., qui ne conteste pas par ailleurs la taxation d'office de l'exercice 1982, n'est pas fondée à soutenir que les impositions des exercices 1980 et 1983 seraient irrégulières faute de saisine de la commission départementale des impôts ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
Sur les amortissements :

Considérant, en premier lieu, que pour apprécier la durée d'amortissement d'un bien il y a lieu de se référer aux dispositions de l'arti-cle 39-1-2° du code général des impôts selon lesquelles les amortissements annuels effectués par une entreprise peuvent être déduits de ses résultats "dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation" ; que, par usages, il y a lieu d'entendre, sous le contrôle du juge de l'impôt, les pratiques qui, en raison notamment de leur ancienneté, de leur fréquence ou de leur généralité, sont regardées comme normales, dans chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation, pour le bien à amortir, à la date d'acquisition de celui-ci par l'entreprise ;
Considérant qu'à la date d'acquisition des véhicules en cause, l'usage généralement admis dans le secteur de la location de véhicules de tourisme auquel appartient la société requérante était de retenir, pour ces biens, une durée d'amortissement de quatre à cinq ans ; que, la société WLADIMIR Y... n'établit pas que les conditions d'utilisation des véhicules justifieraient une dérogation à cet usage ;
Considérant, en second lieu, que la société requérante ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales de la réponse ministérielle à M. X... publiée au Journal officiel du 6 avril 1981, dès lors que ladite réponse, au tant qu'elle se borne à admettre une appréciation de l'usure des véhicules "au vu des circonstances de fait propres à chaque cas particulier", ne comporte aucune interprétation des dispositions fiscales susrappelées ; Sur les comptes clients et fournisseurs de l'exercice clos en 1983 :
Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209-1 du même code : " ... 2 - Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt ... L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiées" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté que les créances sur les clients et les dettes à l'égard de fournisseurs qui figuraient encore à l'actif et au passif du bilan du dernier exercice vérifié clos le 31 décembre 1983, à concurrence respectivement des sommes de 79.356,88 F et 40.836 F restées impayées, avaient été bien avant cette date abandonnées ; que dès lors, et sans qu'y fasse obstacle la circonstance que la société requérante ait ultérieurement procédé elle-même à ces régularisations au titre de l'exercice clos en 1984, les sommes litigieuses ont été, à bon droit, réintégrées par l'administration dans les valeurs de l'actif net de la société et, partant, dans ses bases imposables au titre de l'année 1983 ;
Sur la dette d'impôt sur les sociétés :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite d'un précédent contrôle fiscal la société à responsabilité limitée WLADIMIR Y..., à laquelle un redressement de sa cotisation d'impôt sur les sociétés de l'année 1977 d'un montant de 82.018 F avait été notifié, avait porté dans ses écritures comptables de l'exercice au cours duquel elle avait eu connaissance du redressement une provision d'un montant égal ; que, toutefois, il est constant que, pour la détermination du résultat fiscal dudit exercice, servant de base à l'établissement de l'impôt sur les sociétés, elle a ajouté au bénéfice comptable de l'exercice au titre des charges non admises en déduction du résultat fiscal la provision ainsi constituée laquelle n'est pas déductible des bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés dès lors que l'impôt sur les sociétés auquel elle se rapporte n'est pas lui-même admis dans les charges déductibles en vertu de l'article 213 du code général des impôts ; que la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de 1977 n'ayant jamais été mise en recouvrement par l'administration la dette fiscale de la société s'est trouvée atteinte par la prescription au 31 décembre 1983 ; que la société a alors considéré que la provision qu'elle avait constituée et maintenue au passif des bilans des exercices 1980 à 1982 n'avait plus lieu de figurer au passif du bilan de l'exercice clos le 31 décembre 1983 ; que si la réintégration de cette provision a effectivement augmenté le bénéfice comptable de la société d'un montant égal à celle-ci, ladite société était en droit pour déclarer son résultat fiscal imposable à l'impôt sur les sociétés de retrancher dudit résultat comptable la provision qui avait déjà été taxée antérieurement ;
Sur les primes versées aux associés :
Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre ..." ; qu'il résulte de ces dispositions que les dépenses de personnel non encore réglées à la clôture d'un exercice, peuvent être déduites des résultats de cet exercice notamment au titre des "frais à payer" qu'à la condition que l'entreprise ait pris à l'égard des salariés intéressés des engagements fermes, rendant certaine l'obligation de versement des sommes en cause ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société requérante a inscrit à un compte de régularisation de passif de son bilan de clôture au 31 décembre 1983, notamment, une somme de 130.000 F dont elle soutient qu'elle correspond à une prime, charges sociales comprises, attribuée à un associé non dirigeant et salarié de l'entreprise ; que, si elle soutient que la prime ainsi provisionnée a été allouée dans le cadre du contrat de travail du bénéficiaire, que ce dernier en a été informé avant le 31 décembre 1983 et qu'enfin cette rémunération ainsi que celle des autres associés a été postérieurement ratifiée par l'assemblée générale des porteurs de parts, elle ne fournit toutefois à l'appui de ses allégations aucun des documents auxquels elle se réfère ; que, dans ces conditions, elle ne peut être regardée, ainsi que l'a déjà estimé à juste titre le tribunal administratif, comme ayant pris à l'égard de ce salarié un engagement ferme rendant certaine, à la clôture de l'exercice litigieux, l'obligation de versement de cette somme ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration en a refusé la déduction sur le fondement des dispositions précitées ;
Sur les commissions versées à des tiers :
Considérant que la société requérante a comptabilisé dans les charges de ses exercices clos en 1980, 1982 et 1983 des commissions et autres rémunérations à concurrence respectivement des sommes de 9.000 F, 24.000 F et 26.700 F ; qu'il est constant que ces sommes n'ont pas été déclarées dans les conditions prévues aux articles 240 et 238 du code général des impôts ; qu'en outre si la société soutient que les bénéficiaires de ces versements, l'un membre de l'ambassade du Brésil, l'autre salarié d'une société américaine, auraient favorisé, par leur entremise, la promotion et le développement de son activité de loueur de voitures avec chauffeur, elle ne fournit, à cet égard, aucun commencement de preuve ; qu'ainsi, en tout état de cause, ces réintégrations ont été opérées à bon droit ;
Sur les autres frais en litige :
Considérant que les frais de déplacement, de mission, de réception, de cadeaux et de publicité, invoqués par la requérante ne sont appuyés d'aucun justificatif ; que, dès lors, lesdits frais ne sauraient être admis en déduction au titre des frais généraux prévus à l'article 39-1 précité du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société WLADIMIR Y... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a refusé de réduire sa base d'imposition à l'impôt sur les sociétés au titre de 1983 d'un montant de 82.018 F ;
Article 1er : A concurrence de la somme de 149.247 F, en ce qui concerne le complément, en droits et pénalités d'impôt sur les sociétés auxquels la société WLADIMIR Y... a été assujettie au titre de l'année 1981, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société WLADIMIR Y....
Article 2 : La base d'imposition de la société WLADIMIR Y... à l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1983 est réduite de 82.018 F.
Article 3 : La société WLADIMIR Y... est déchargée de la différence entre l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1983 et celui qui résulte de l'article 2 ci-dessus.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le jugement attaqué en date du 12 mai 1992 du tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire avec le présent arrêt.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 92PA01347
Date de la décision : 04/10/1994
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - REDRESSEMENT.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - AMORTISSEMENT.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - DETERMINATION DU BENEFICE NET - PROVISIONS.


Références :

CGI 38, 213, 209, 240, 238, 39
CGI Livre des procédures fiscales L57, L59, R57-1, L80 A


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme MARTEL
Rapporteur public ?: Mme DE SEGONZAC

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1994-10-04;92pa01347 ?
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