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08/10/1991 | FRANCE | N°90PA00296;90PA00511

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 08 octobre 1991, 90PA00296 et 90PA00511


Vu I) la requête n° 90PA00296 présentée par le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget ; elle a été enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 22 mars 1990 ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler ou de réformer le jugement n° 876983/1, 883925/1, 898002/1 en date du 7 novembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à Mme X... la décharge de l'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre des années 1983, 1984, 1985 et 1987 ;
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°) de décider à titre principal que Mme X... sera rétablie au rôle de l'impôt...

Vu I) la requête n° 90PA00296 présentée par le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget ; elle a été enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 22 mars 1990 ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler ou de réformer le jugement n° 876983/1, 883925/1, 898002/1 en date du 7 novembre 1989 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à Mme X... la décharge de l'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre des années 1983, 1984, 1985 et 1987 ;
2°) de décider à titre principal que Mme X... sera rétablie au rôle de l'impôt sur le revenu au titre des années 1983, 1984, 1985 et 1987 à raison des droits dont les premiers juges ont accordé la décharge ;
3°) de décider à titre subsidiaire que Mme X... sera rétablie au rôle de l'impôt sur le revenu au titre des années 1983, 1984, 1985 et 1987 à raison des droits correspondant aux bases déclarées et calculées selon le barème de droit commun ;
Vu II) la requête n° 90PA00511 présentée par le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget ; elle a été enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Paris le 1er juin 1990 ; le ministre demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 8904978 du 27 février 1990 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à Mme X... la décharge de l'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1986 ;
2°) de décider, à titre principal, que Mme X... sera rétablie au rôle de l'impôt sur le revenu à raison des droits dont les premiers juges ont accordé la décharge ;
3°) de décider à titre subsidiaire que Mme X... sera rétablie au rôle de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1986 à raison des droits correspondants aux bases déclarées et calculées selon le barème de droit commun ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n°87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 septembre 1991 :
- le rapport de Mme Tricot, conseiller,
- et les conclusions de Mme Martin, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il y a lieu de joindre les deux requêtes susvisées qui présentent à juger les mêmes questions ;
Sur les conclusions principales :
Considérant que Mme X... qui avait souscrit auprès du service fiscal français des non-résidents une déclaration aux termes de laquelle elle était fiscalement résidente en Suisse n'a jamais contesté devant le tribunal administratif que tel fut bien le cas, au sens et pour l'application de l'article 4-1 de la convention Franco-Suisse du 9 septembre 1966, et qu'elle était, en vertu de la législation Suisse, assujettie à l'impôt en Suisse, en raison de son domicile, sur les revenus dont l'imposition n'était pas attribuée à la France par la convention, alors même qu'elle indiquait que ni elle-même ni son époux, fonctionnaire de l'Organisation des Nations Unies à Genève, dont les revenus étaient fiscalement exonérés en Suisse, n'étaient "soumis" à l'impôt dans ce pays ; que l'attribution à la France par les articles 6 et 16 de la convention de l'imposition de revenus de source française n'impliquait pas par elle-même, alors même que durant les années litigieuses Mme X... n'aurait pas acquitté en Suisse d'impôt sur le revenu, que celle-ci n'y fût pas assujettie audit impôt au sens de l'article 4-1 ; qu'il ne ressortait d'aucune pièce du dossier et n'en ressort pas davantage en appel, où la requérante persiste, comme l'adminis-tration, à soutenir qu'elle est fiscalement domiciliée en Suisse, que les autorités Suisses n'aient pas regardé Mme X... comme résidente Suisse au sens et pour l'application des dispositions de la convention Franco-Suisse ; que par ailleurs si elle a fait valoir dans son mémoire de première instance enregistré le 13 mars 1989 qu'elle avait son domicile fiscal en France "au sens des alinéas a et b de l'article 4 B 1 du code général des impôts", ce qui n'était au demeurant nullement contesté, elle n'a jamais soutenu qu'elle n'avait pas son domicile en Suisse au sens de l'article 4-1 de la convention Franco-Suisse ; que par suite, dès lors, qu'il ne ressortait pas du dossier que Mme X... ne dût être regardée comme ayant pour l'application de cette convention sa résidence tant en Suisse qu'en France et qu'il était constant et non contesté que son foyer d'habitation permanent au sens de l'article 4-2 était bien en Suisse, le tribunal ne pouvait, comme il l'a fait, considérer, en l'état du dossier qui lui était soumis, qu'elle était domiciliée en France contrairement à ce que soutenaient les deux parties et déduire de cette constatation l'inapplicabilité de l'article 197 A du code général des impôts, faute que soit remplie la condition légale de domiciliation fiscale hors de France ; que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort sur le tribunal administratif a accordé pour ce motif décharge des cotisations litigieuses ; qu'il appartient, en conséquence, à la cour administrative d'appel statuant par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les demandes soumises par Mme X... au tribunal administratif ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 5 section 18 de la convention sur les privilèges et imunités des Nations-Unies du 13 février 1945 : "Les fonctionnaires de l'organisation ... seront exonérés de tout impôt sur les traitements et émoluments versés par celle-ci" ; que ces dispositions ont une portée différente de celle des conventions bilatérales aux fins d'éviter la double imposition ; qu'aucune disposition de la convention ne prévoit la possibilité de prendre en compte les revenus qu'elle exonère pour le calcul de l'impôt dû par un résident d'un Etat en application de la loi interne de celui-ci ; que les dispositions précitées doivent être ainsi interprétées comme excluant toute prise en compte, même indirecte, des revenus exonérés dans tous les Etats parties à la convention pour la détermination des bases comme du taux d'une imposition établie sur le territoire d'un de ces Etats, alors même que cette prise en compte ne conduirait pas à l'imposition de ces revenus dans cet Etat, mais à l'application d'un taux minimal d'imposition prévu par la loi interne et qui n'aurait pas eu lieu de l'être si les revenus exonérés n'avaient pas été pris en compte, seul un taux inférieur étant dans ce cas applicable à l'imposition des revenus imposables dans cet Etat ;
Considérant qu'aux termes de l'article 197-A du code général des impôts applicable, à l'exclusion de l'article 193 bis, à l'imposition litigieuse des revenus de source française de Mme X..., domicilée en Suisse avec son époux fonctionnaire de l'Organisation des Nations Unies dont les émoluments sont exonérés d'impôt sur le revenu en Suisse comme en France : "Les règles de l'article 197-1 sont applicables pour le calcul de l'impôt sur le revenu dû par les personnes qui n'ayant pas leur domicile fiscal en france : a) perçoivent des revenus de source francaise : l'impôt ne peut en aucun cas être inférieur à 25 % de revenu net imposable ..., ces taux minima d'imposition ne sont toutefois pas applicables aux personnes qui peuvent justifier que l'impôt français sur leur revenu global serait inférieur à celui résultant de l'application de ces taux minima" ;

Considérant que ces dispositions ont eu pour objet de permettre une comparaison entre le taux minimal d'imposition qu'elles prévoient et le taux moyen applicable au revenu mondial du contribuable pour déterminer le taux d'imposition applicable ; qu'elles n'ont pas eu toutefois pour effet de permettre pour la fixation du revenu mondial la prise en compte de ressources exonérées dans tous les pays qui sont soumis à la convention du 13 février 1945 et qui ne sont imposables dans aucun de ces pays ; que par suite Mme X... n'était tenue, ni de déclarer ces revenus aux termes de l'article 170-4 du code général des impôts, ni de fournir des renseignements les concernant aux services fiscaux français dans le cadre de l'instruction de la réclamation qu'elle avait formulée aux fins d'être imposée pour ses revenus de source française, non au taux de 25 %, mais selon le taux moyen applicable à son revenu mondial abstraction faite des émoluments versés par l'Organisation des Nations Unies à son époux qui ne pouvaient à aucun titre être pris en compte pour la fixation du taux d'imposition applicable à ses revenus de source française imposables en France ; que d'ailleurs dans la mesure où l'article 197 A du code général des impôts aurait eu pour objet et pour effet de permettre une telle prise en compte, il aurait été dans cette mesure incompatible avec les dispositions conventionnelles précitées dont Mme X... se prévaut, qui n'ont pas autorisé pour le calcul des impositions des Etats parties aux taux prévus par leur législation, la prise en compte à quelque titre que ce soit des revenus qu'elles exonèrent ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à se plaindre de ce que le tribunal administratif ait dans la limite des conclusions dont il était saisi fait droit à la demande de Mme X... ;
Sur les conclusions subsidiaires :
Considérant qu'il est constant que le tribunal administratif a accordé décharge des cotisations litigieuses en statuant au delà des conclusions dont il était saisi et du quantum de la réclamation ; qu'il y a lieu de faire droit sur ce point aux conclusions du ministre en rétablissant partiellement la requérante aux rôles desdites cotisations ; que toutefois en l'instance 90.511 concernant 1986, le ministre n'a expressément soutenu que ses conclusions principales et qu'il n'y a donc lieu pour ladite année à rétablissement partiel ;
Article 1er : Mme X... est rétablie aux rôles de l'impôt sur le revenu au titre des années 1983, 1984, 1985 et 1987 à raison des droits correspondant aux bases déclarées par elle calculées selon le barème de droit commun.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 7 novembre 1989 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions du ministre délégué au budget est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 90PA00296;90PA00511
Date de la décision : 08/10/1991
Sens de l'arrêt : Droits maintenus
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - CONVENTIONS INTERNATIONALES - Exonération de tous impôts sur les traitements servis aux fonctionnaires de l' O - N - U - (convention du 13 février 1945 sur les privilèges et immunités des Nations-Unies).

19-01-01-05, 19-01-01-05-01, 19-04-01-02-03-02 En application des dispositions de l'article 5, section 18 de la Convention du 13 février 1945 sur les privilèges et immunités des Nations-Unies, le revenu global mentionné au a) de l'article 197 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années 1983 à 1987, relatif aux personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal en France, mais perçoivent des revenus de source française, est déterminé abstraction faite des traitements et émoluments perçus par les fonctionnaires de l'ONU.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - TEXTES FISCAUX - CONVENTIONS INTERNATIONALES - CONVENTIONS MULTILATERALES - Nations-Unies - Convention du 13 février 1945 sur les privilèges d'immunité des Nations-Unies.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU - DETERMINATION DU REVENU IMPOSABLE - MONTANT GLOBAL DU REVENU BRUT - Exonération de tous impôts sur les traitements servis aux fonctionnaires de l'O - N - U - (convention du 13 février 1945 sur les privilèges et indemnités des Nations-Unies).


Références :

CGI 197 A, 5, 197, 193 bis, 170 par. 4
Convention du 09 septembre 1966 France Suisse art. 6, art. 16


Composition du Tribunal
Président : M. Lévy
Rapporteur ?: Mme Tricot
Rapporteur public ?: Mme Martin

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1991-10-08;90pa00296 ?
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