Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 9 avril 2021 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination où il est susceptible d'être éloigné d'office.
Par un jugement n° 2204630 du 5 avril 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 avril 2023 et 8 mars 2024,
M. B... A..., représenté par Me Chaumette, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 5 avril 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 9 avril 2021 du préfet de la Loire-Atlantique ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard, et de lui délivrer dans l'attente d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé et entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- le préfet a commis une erreur de droit en n'examinant pas sa situation au regard de l'article L. 313-14 et du 7° de l'article L. 313-11 ;
- il a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a commis une inexacte application du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation du refus de titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 février 2024, le préfet de la
Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lellouch ;
- les observations de Me Lietavova, substituant Me Chaumette, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant marocain né le 11 juin 1978, déclare être entré irrégulièrement en France en 1999. Il relève appel du jugement du 5 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 avril 2021 du préfet de la Loire-Atlantique portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant son pays de renvoi.
Sur le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, le refus de titre de séjour en litige que produit aux débats le préfet, qui vise le 7° de l'article L. 313-11 et l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, précise la nature des faits criminels dont M. A... a été l'auteur, la condamnation prononcée à son encontre et indique qu'ils révèlent une très grave atteinte à l'ordre public, une absence d'intégration dans la société française et un risque de menace à l'ordre public. Il comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. L'arrêté expose en outre les éléments relatifs à la vie privée et familiale de l'intéressé qui ont conduit le préfet à estimer que le refus de titre ne portait pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des motifs qui le fondent. M. A... fait valoir que l'arrêté dont il a reçu notification en détention est tronqué en ce que les deux premiers paragraphes de la deuxième page de cet arrêté, relatifs au motif tiré de ce que la présence de l'intéressé constitue une menace pour l'ordre public, sont absents, et produit à l'appui de ses allégations une version ainsi tronquée de l'arrêté. Toutefois, le préfet de la Loire-Atlantique joint à son mémoire en défense une version complète de l'arrêté, notifiée le 15 mars 2022 à l'intéressé, ainsi que cela ressort de la signature de M. A... et de celle de l'officier de police judiciaire qui le lui a remis. Dans ces conditions, les moyens tirés de l'insuffisante motivation de l'arrêté litigieux et du défaut d'examen particulier de sa situation doivent être écartés.
3. En deuxième lieu, alors que les titres de séjour prévus aux articles L. 313-14 et L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent être délivrés aux étrangers dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public, il ressort tant des visas que des motifs de l'arrêté litigieux dans la version produite par le préfet de la Loire-Atlantique que ce dernier a bien examiné le droit au séjour de M. A... au regard des dispositions qu'il vise. Le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait ainsi commise le préfet doit être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur à la date de l'arrêté litigieux : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. ".
5. Il est constant que M. A..., âgé de quarante-et-un ans à la date de l'arrêté litigieux, a été l'auteur d'arrestation, d'enlèvement, de séquestration ou détention arbitraire d'otage pour faciliter un crime ou un délit, de viol et de vol du 11 août au 12 août 2001 et qu'il a été condamné à raison de ces faits à une peine de dix-sept ans de réclusion criminelle par un arrêt de la cour d'assises du Vaucluse du 24 juin 2014. Il était incarcéré depuis près de dix ans à la date de la décision en litige. A supposer même qu'il soit entré en France en 1999 et qu'il y réside depuis lors, et même si ses parents résident régulièrement sur le territoire national et qu'il a un frère et une sœur de nationalité française, de telles circonstances ne sont pas de nature à caractériser un motif exceptionnel ou des considérations humanitaires justifiant son admission exceptionnelle au séjour en dépit des réels efforts de réinsertion qu'il a déployés en détention. Dès lors, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant son admission exceptionnelle au séjour.
6. En quatrième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Et aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Si M. A... se prévaut d'une présence continue de vingt-deux ans en France, il n'a pas produit d'éléments de nature à l'établir entre la date des faits criminels qui lui sont reprochés et l'année 2011. Il ne justifie d'aucune période de séjour régulier sur le territoire national et il est constant qu'il est incarcéré depuis le 30 août 2012 et qu'il purgeait une peine de dix-sept ans de réclusion criminelle à la date de l'arrêté contesté. M. A... est célibataire et sans enfant. S'il se prévaut de la présence en France de ses parents, de son frère et de sa sœur, qui ont attesté être prêts à l'accueillir, il ne justifie ni de l'intensité ni de la stabilité de ses liens avec ces derniers. Il ne justifie pas davantage être dépourvu d'attaches familiales au Maroc. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Loire-Atlantique aurait fait une inexacte application des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou qu'il aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, l'illégalité du refus de titre de séjour n'étant pas établie, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision d'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de ce refus.
9. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
10. Eu égard aux motifs exposés au point 7 et alors que M. A... est de nationalité marocaine et qu'il ne conteste pas avoir vécu au Maroc jusqu'à son entrée en France, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Les conclusions à fin d'injonction ainsi que la demande présentée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Une copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 14 mars 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Brisson, présidente,
- M. Vergne, président-assesseur,
- Mme Lellouch, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2024.
La rapporteure,
J. LELLOUCH
La présidente,
C. BRISSON
Le greffier,
R. MAGEAU
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT01218