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09/02/2024 | FRANCE | N°22NT03611

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 09 février 2024, 22NT03611


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision par laquelle le comptable public a procédé à des retenues sur ses traitements des mois de mars et avril 2020 et la décision du 22 juin 2020 par laquelle le directeur régional des finances publiques Bretagne et Ille-et-Vilaine a rejeté son recours gracieux à l'encontre de ces deux retenues sur traitement.



Par un jugement n° 2003509 du 22 septembre 2022, le tribunal admi

nistratif de Rennes a rejeté la demande de M. A... D....



Procédure devant la cour :


...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision par laquelle le comptable public a procédé à des retenues sur ses traitements des mois de mars et avril 2020 et la décision du 22 juin 2020 par laquelle le directeur régional des finances publiques Bretagne et Ille-et-Vilaine a rejeté son recours gracieux à l'encontre de ces deux retenues sur traitement.

Par un jugement n° 2003509 du 22 septembre 2022, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. A... D....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 22 novembre 2022 et 24 janvier 2024, M. A... D..., représenté par Me Moreau-Verger, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 22 septembre 2022 ainsi que la décision de procéder au recouvrement d'indus de rémunération sur ses traitements des mois de mars et avril 2020 et la décision du 22 juin 2020 rejetant son recours gracieux ;

2°) d'enjoindre au ministre des armées ou au directeur régional des finances publiques de reverser les sommes retenues aux mois de mars et avril 2020 et d'assortir ces sommes des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé, s'agissant de la réponse au moyen tiré de l'absence de bien-fondé de la créance en litige ;

- l'administration ne lui a pas délivré l'information sur les bases de liquidation requise par l'article 24 du décret n°2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- elle n'était pas fondée à lui réclamer les sommes en litige, dès lors qu'il a été indûment privé de son traitement au cours de mois de novembre et de décembre de l'année 2019, y compris de l'indemnité de fonctions, de sujétions, et d'expertise (IFSE) et de l'indemnité compensatrice de contribution sociale généralisée (ICCSG) et que les sommes versées à ce titre lui étaient effectivement dues.

Par un mémoire en défense enregistré le 8 février 2023, le directeur régional des finances publiques Bretagne et Ille-et-Vilaine conclut à ce qu'il n'y ait pas lieu de statuer sur la requête.

Il soutient que les sommes en litige ont été reversées à M. A... D... sur sa paie du mois de novembre 2021.

Les parties ont été informées, le 18 janvier 2024, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrégularité du jugement attaqué en ce qu'il a omis de prononcer un non-lieu à statuer s'agissant des conclusions à fin d'annulation des décisions contestées et d'injonction de reversement des sommes en litige.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 janvier 2024, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la demande du requérant devant le tribunal n'était pas recevable, faute de décision liant le contentieux, dès lors que la décision du 22 juin 2020 ne saurait être regardée comme le rejet d'un recours que le requérant n'a jamais formé, portant sur la restitution de sommes indument perçues par le requérant au mois de janvier 2020 ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Catroux,

- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,

- et les observations de Me Moreau-Verger, représentant M. A... D....

Une note en délibéré présentée pour M. A... D... a été enregistrée le 25 janvier 2024.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... D..., ingénieur d'études et de fabrications du ministère des armées, a été placé en congé de maladie imputable au service à la suite d'un accident survenu le 12 novembre 2012. Après avoir constaté que M. A... D... ne s'était pas rendu, le 19 septembre 2019, à une visite médicale à laquelle il avait été convoqué le 27 août 2019, l'administration a interrompu le versement de sa rémunération. Par un jugement nos 1902695,1905181 du 29 septembre 2021, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision interrompant le versement de la rémunération de M. A... D....

2. Par un courrier du 26 février 2020, le directeur du centre ministériel de gestion (CMG) de Rennes l'a informé de la prochaine régularisation d'un trop perçu sur salaire d'un montant de 5 631,91 euros, sur la période allant du 20 septembre au 31 octobre 2019, et qu'un titre de perception serait émis à cet effet. Par courrier du 1er avril 2020 son conseil a introduit un recours administratif préalable auprès du directeur régional des finances publiques (DRFIP) d'Ille-et-Vilaine, pour s'opposer à l'exécution de cette procédure. Le 22 juin 2020, cette autorité par un courrier, lui a confirmé la teneur des éléments d'information apportés par le CMG de Rennes, et lui a indiqué que deux autres retenues ont été réalisées sur les traitements de mars et avril 2020, pour des montants respectifs de 2 699,16 euros et 72,82 euros, destinées à recouvrer un versement indu effectué sur la paie de janvier 2020 au titre de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE) et de l'indemnité compensatrice de contribution sociale généralisée (CSG). M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision procédant aux prélèvements opérés sur ses traitements de mars et avril 2020 ainsi que celle du 22 juin 2020 par lequel le directeur régional des finances publiques Bretagne et Ille-et-Vilaine a rejeté son recours gracieux à l'encontre de ces deux retenues sur traitement. Par un jugement du 22 septembre 2022, dont M. A... D... relève appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Un recours dirigé contre un état exécutoire, contre un ordre de reversement, ou, comme en l'espèce, contre une retenue sur traitement relève, par nature, du plein contentieux. Les demandes du requérant tendant à l'annulation de la retenue sur son traitement des sommes en litige et du rejet de son recours gracieux contre cette retenue doivent, dès lors, être regardées comme tendant à la décharge de l'obligation de payer ces sommes.

4. Il résulte de l'instruction, compte tenu du bulletin de paie de M. A... D... du mois de novembre 2021, produit pour la première fois devant la cour, qu'au cours de ce dernier mois, en exécution du jugement nos 1902695,1905181 du 29 septembre 2021 du tribunal administratif de Rennes, qui avait annulé la décision interrompant le versement de la rémunération de M. A... D... à compter du 20 septembre 2019, le comptable public a versé à l'intéressé la somme de 2 699,16 euros, au titre d'un rappel " années antérieures " d'IFSE, ainsi que la somme de

72,82 euros, au titre d'un rappel " années antérieures " d'indemnité compensatrice de CSG. Il résulte de ces éléments que, ainsi que le fait valoir le directeur régional des finances publiques Bretagne et Ille-et-Vilaine, les sommes, en litige, consistant dans des retenues sur les paies de mars et d'avril 2020 pour des indemnités de même nature et des mêmes montants, n'ont plus été mises à la charge de l'intéressé par l'administration et qu'elles lui ont été reversées.

5. Il s'ensuit que la demande présentée par M. A... D... devant le tribunal était, dans cette mesure, devenue sans objet à la date à laquelle le tribunal a statué. En omettant de prononcer un non-lieu à statuer, les premiers juges ont entaché leur jugement d'irrégularité. Ce jugement doit, dès lors, être annulé.

6. Il y a lieu pour la cour d'évoquer la demande de M. A... D... devant le tribunal et de constater, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen invoqué par le ministre et tiré de l'irrecevabilité de cette demande, qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... D... tendant à l'annulation de la décision d'effectuer le recouvrement, par compensation sur les paies de mars et d'avril 2020, d'indus d'IFSE et de l'indemnité compensatrice de CSG et de la décision rejetant son recours gracieux. Il n'y a pas lieu non plus de statuer sur ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte.

Sur les intérêts et leur capitalisation :

7. M. A... D... a demandé, le 18 août 2020, date d'enregistrement de sa demande au greffe du tribunal, que les sommes de 2 699,16 euros et de 72,82 euros soient assorties des intérêts, ainsi que de leur capitalisation. Dans le cas où ces intérêts ne lui auraient pas déjà été versés, il y a lieu, dès lors, d'assortir ces sommes des intérêts au taux légal à compter du 18 août 2020.

8. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée le 18 août 2020. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 18 août 2021, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi que, dans le cas où les intérêts n'auraient pas encore été versés, à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Sur les frais d'instance :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros que demande M. A... D... au titre de titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes du 22 septembre 2022 est annulé.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de M. A... D... devant le tribunal administratif de Rennes à fin d'annulation de la décision d'effectuer le recouvrement, par compensation sur les paies de mars et d'avril 2020, d'indus d'IFSE et de l'indemnité compensatrice de CSG et de la décision rejetant son recours gracieux ni sur ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte.

Article 3 : Les sommes indument recouvrées sur les paies de mars et d'avril 2020 seront assorties des intérêts et de leur capitalisation, dans les conditions précisées aux points 7 et 8 du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à M. A... D... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... D... et au ministre des armées.

Une copie en sera adressée pour information au directeur régional des finances publiques Bretagne et Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente,

- M. Vergne, président assesseur,

- M. Catroux, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 février 2024.

Le rapporteur,

X. CATROUXLa présidente,

C. BRISSON

La greffière,

A. MARTIN

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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No 22NT03611


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT03611
Date de la décision : 09/02/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BRISSON
Rapporteur ?: M. Xavier CATROUX
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : MOREAU-VERGER

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-09;22nt03611 ?
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