Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 18 juillet 2022 par lequel le préfet du Finistère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays à destination duquel il serait reconduit à l'issue de ce délai.
Par un jugement no 2205639 du 30 janvier 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 26 avril 2023, M. A..., représenté par Me Vervenne, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 30 janvier 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Finistère du 18 juillet 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Finistère, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention avec autorisation de travailler ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour et de travail ;
4°) de mettre à la charge de l'État, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de séjour méconnaît les articles L. 811-2 et R. 431-10 et R. 431-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur de droit au regard de l'article R. 113-6 du le code des relations entre le public et l'administration ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- elle méconnaît l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;
- elle n'est pas motivée ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 juillet 2023, le préfet du Finistère conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun de moyens soulevés par M. A... n'est fondé.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 mars 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code du travail ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Catroux a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant guinéen se disant né le 20 juillet 2001, est entré irrégulièrement en France en novembre 2017 selon ses déclarations. Par une décision du conseil départemental du Finistère du 24 juillet 2018, il a été mis fin à sa prise en charge provisoire depuis le 3 novembre 2017 au titre de l'aide sociale à l'enfance, dès lors que la qualité de mineur non accompagné ne lui a pas été reconnue. Il a sollicité le 3 mars 2022, la délivrance d'un titre de séjour, sur le fondement des articles L. 423-23, L. 421-1 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 18 juillet 2022, le préfet du Finistère a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 30 janvier 2023 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, le requérant reprend en appel le moyen invoqué en première instance, tiré de ce que le refus de séjour contesté est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. (...) ". L'article L. 5221-2 du code du travail dispose que : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ".
4. Pour refuser d'admettre au séjour M. A... sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'administration s'est fondée sur la circonstance que l'intéressé était dépourvu de visa d'entrée et de séjour. Ce motif est suffisant pour fonder le refus d'admission à cet égard. En se bornant à soutenir qu'il a transmis à la préfecture une demande d'autorisation de travail et que l'administration ne pouvait se fonder sur une absence de lien entre sa formation et l'emploi envisagé, le requérant ne remet pas en cause la légalité de ce motif. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut donc qu'être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Selon les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur version applicable au litige : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".
6. A la date de l'arrêté contesté, le requérant résidait en France depuis moins de cinq ans, en raison tout d'abord de l'instruction de sa prise en charge par l'aide sociale à l'enfance puis de son maintien sur le territoire français en situation irrégulière. Célibataire et sans personne à charge en France, il n'avait pas noué dans ce pays des liens d'une particulière intensité. Il n'y disposait pas de ressources suffisantes ou d'un logement et n'y était pas inséré au plan professionnel, malgré les diplômes et les promesses d'embauche obtenus. Il ne ressort pas, de plus, des pièces du dossier qu'il serait dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où réside sa mère et où il a vécu la plus grande partie de sa vie. Dans ces conditions, la décision du préfet du Finistère refusant d'admettre M. A... au séjour n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Par suite, le préfet du Finistère n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. En quatrième lieu, le préfet aurait pris la même décision en se fondant seulement sur les motifs que M. A... ne remplissait pas les conditions prévues les articles L. 421-1 et
L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour se voir délivrer un titre de séjour sur leur fondement. Dès lors, les moyens tirés de ce que, compte tenu de la valeur probante des documents d'état civil produits par l'intéressé, la décision portant refus de séjour méconnaîtrait les articles L. 811-2, R. 431-10 et R. 431-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et serait entachée d'une erreur de droit au regard de l'article
R. 113-6 du code des relations entre le public et l'administration ne peuvent qu'être écartés comme inopérants.
8. En cinquième lieu, eu égard à ce qui précède, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français devrait être annulé par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour.
9. En sixième lieu, la décision portant refus de séjour expose de façon suffisante les circonstances de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde. De ce seul fait, l'obligation de quitter le territoire français est également suffisamment motivée en conséquence des dispositions du second alinéa de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. En septième lieu, eu égard à ce qui précède, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination devrait être annulé par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
11. En huitième lieu, l'arrêté contesté, qui vise notamment l'article L. 721-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, constate qu'il est fait obligation de quitter le territoire français à l'intéressé, qu'il est de nationalité guinéenne et le requérant n'apporte pas d'éléments de nature à établir qu'il serait exposé à des peines ou des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, la décision fixant le pays de destination est suffisamment motivée.
12. En dernier lieu, il ne ressort d'aucune pièce du dossier et n'est pas même allégué que la vie ou la liberté de M. A... seraient menacées en cas de retour en Guinée ou qu'il y serait exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de l'erreur de droit au regard de ces dispositions ne peuvent qu'être écartés.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant au bénéfice des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et
37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera transmise, pour information, au préfet du Finistère.
Délibéré après l'audience du 12 octobre 2023, à laquelle siégeaient :
- Mme Brisson, présidente,
- M. Vergne, président-assesseur,
- M. Catroux, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2023.
Le rapporteur,
X. CatrouxLa présidente,
C. Brisson
La greffière,
A. Martin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°23NT01203