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31/08/2023 | FRANCE | N°23NT02328

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Juge unique, 31 août 2023, 23NT02328


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B..., représentée par Me Lietavova, a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 5 juin 2023 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé de son transfert aux autorités italiennes, d'enjoindre au même préfet de procéder à un nouvel examen de sa situation et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice adminis

trative.

Par le jugement n° 2308456 du 6 juillet 2023, le tribunal administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B..., représentée par Me Lietavova, a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 5 juin 2023 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé de son transfert aux autorités italiennes, d'enjoindre au même préfet de procéder à un nouvel examen de sa situation et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Par le jugement n° 2308456 du 6 juillet 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 31 juillet 2023, Mme B..., représentée par Me Lietavova, demande à la cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 2308456 du 6 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 5 juin 2023 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités italiennes.

2°) de surseoir à l'exécution de l'arrêté de transfert cité ci-dessus ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros à verser au conseil du requérant, au titre des articles L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'exécution du jugement en cause entrainera des conséquences difficilement réparables dès lors que l'exécution de l'arrêté en cause l'expose à un transfert immédiat en Italie, qui se trouve dans une situation de défaillance systémique ;

- le jugement a écarté à tort le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté ;

- la décision attaquée est entachée d'un défaut d'examen particulier de la situation de l'intéressée ;

-l'auteur de la consultation du fichier EURODAC ne justifie pas de son habilitation ;

- la décision de transfert méconnaît les articles 4, 5, 6, 10, 17, 23, 9, et 3-2 du règlement n° 604/2013, ainsi que les articles 3-1 et 9 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article 17 du règlement n° 604/2013 et porté une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance de l'article 8 de la CEDH.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 août 2023, le préfet de Maine-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu la requête n° 23NT02327 par laquelle Mme B... relève appel du jugement n° 2308456 du 6 juillet 2023 du tribunal administratif de Nantes.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er août 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gaspon,

- et les observations de Me Renaud, substituant Me Lietavova, représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante guinéenne, est entrée irrégulièrement en France selon ses déclarations le 18 janvier 2023 et a présenté une demande d'asile à la préfecture de la Loire-Atlantique le 27 janvier 2023 pour solliciter le statut de réfugié. Les recherches conduites par la préfecture sur le fichier EURODAC ont fait apparaître que l'intéressé avait sollicité l'asile auprès des italiennes préalablement à sa demande d'asile en France. Les autorités italiennes, saisies le 13 février 2023, ayant donné leur accord pour la reprise en charge de Mme B... le 11 avril 2023, le préfet de Maine-et-Loire a pris à l'encontre de Mme B... le 5 juin 2023 la décision de transfert litigieuse. A la suite du rejet de sa demande d'annulation de cette décision par le jugement n°2308456 du 6 juillet 2023 du tribunal administratif de Nantes. Mme B..., qui a par ailleurs sollicité l'annulation de ce jugement, demande à la cour, par la présente requête, de surseoir à son exécution.

Sur les conclusions relatives au sursis à exécution,

2. Aux termes de l'article R. 222-25 du code de justice administrative : " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. / Par dérogation à l'alinéa précédent, (...) le président de chambre statue en audience publique et sans conclusions du rapporteur public sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17 ". Par ailleurs, l'article R. 811-15 du même code prévoit que : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement.". Enfin, aux termes de l'article R.811-17 du même code : " Dans les autres cas, le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction. ".

3. L'exécution du jugement visé ci-dessus du 6 juillet 2023 rejetant la demande d'annulation de la décision de transfert de Mme B... en Italie est susceptible d'entraîner pour la requérante des conséquences difficilement réparables, notamment quant au respect des droits fondamentaux et garanties qu'il tient des règles du droit européen de l'asile, dès lors qu'il n'est pas possible pour l'intéressé de demander, par la voie du référé prévu par l'article L.521-1 du code de justice administrative, la suspension de la décision de transfert.

4. Le moyen tiré de la méconnaissance par le préfet de l'article 3-2 du règlement n°604/2013 présente un caractère sérieux paraissant, en l'état de l'instruction, de nature à justifier l'annulation du jugement attaqué.

5. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu, par application des dispositions de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, d'ordonner le sursis à exécution du jugement du 6 juillet 2023 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande de Mme B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 juin 2023 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert vers l'Italie.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Mme B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Lietavova, avocate de Mme B..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Lietavova de la somme de 1000 euros.

DECIDE :

Article 1er : Il sera sursis à l'exécution du jugement n° 2308456 du 6 juillet 2023 du tribunal administratif de Nantes jusqu'à ce qu'il ait été statué sur le fond de la requête n° 23NT02327.

Article 2 : L'Etat (ministre de l'intérieur) versera à Me Lietavova une somme de 1000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Mme A... B....

Une copie en sera adressée pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Fait à Nantes, le 31 août 2023.

Le président de la 6ème chambre La greffière

Olivier GASPON Isabelle PETTON

La République mande et ordonne au ministre l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Juge unique
Numéro d'arrêt : 23NT02328
Date de la décision : 31/08/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Suspension sursis

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier GASPON
Avocat(s) : LIETAVOVA

Origine de la décision
Date de l'import : 03/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2023-08-31;23nt02328 ?
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