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23/12/2022 | FRANCE | N°22NT00598

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 23 décembre 2022, 22NT00598


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités suédoises, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que l'arrêté du même jour l'assignant à résidence dans le même département pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2201689 du 15 février 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédu

re devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 février 2022 M. C..., représenté par Me K...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé son transfert aux autorités suédoises, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que l'arrêté du même jour l'assignant à résidence dans le même département pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 2201689 du 15 février 2022, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 février 2022 M. C..., représenté par Me Kaddouri, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif du 15 février 2022 ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) d'enjoindre au préfet de Maine-et-Loire de lui délivrer un récépissé en qualité de demandeur d'asile dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 800 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de l'arrêté de transfert aux autorités suédoises :

- il n'est pas suffisamment motivé ;

- il n'est pas établi qu'il se soit effectivement vu délivrer, dans une langue qu'il comprend et dès le début de la procédure, les informations prévues à l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et notamment l'intégralité de la brochure ;

- il n'est pas établi que l'entretien individuel se soit déroulé dans les conditions prévues à l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et en particulier que la confidentialité de celui-ci ait été respectée ;

- l'arrêté de transfert est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions des articles 3 et 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de l'arrêté portant assignation à résidence :

- il est insuffisamment motivé ;

- il n'a pas été procédé à un examen individuel de sa situation ;

- l'illégalité de l'arrêté de transfert aux autorités suédoises entache d'illégalité l'arrêté d'assignation à résidence ;

- l'arrêté d'assignation à résidence est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors notamment qu'il prévoit qu'il prévoit une obligation de se rendre avec ses effets personnels, tous les mardis à 8h au commissariat d'Angers.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 8 juin et le 22 août 2022, le préfet de Maine-et-Loire conclut à ce qu'il n'y ait plus lieu de statuer sur l'arrêté de transfert et au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant irakien, relève appel du jugement du 15 février 2022 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 janvier 2022 par lequel le préfet de Maine-et-Loire a décidé sa remise aux autorités suédoises, responsables de l'examen de sa demande d'asile, ainsi que de l'arrêté du même jour l'assignant à résidence.

Sur l'étendue du litige :

2. D'une part, aux termes de l'article 29 du règlement n° 604-2013 du 26 juin 2013 : " Le transfert du demandeur ou d'une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), de l'Etat membre requérant vers l'Etat membre responsable s'effectue conformément au droit national de l'Etat membre requérant, après concertation entre les Etats membres concernés, dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3. / 2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'Etat membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'Etat membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. ".

3. D'autre part, l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date de la notification à l'administration du jugement par lequel le tribunal administratif statue au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel, ni d'ailleurs le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.

4. Le délai initial de six mois dont disposait le préfet de Maine-et-Loire pour procéder à l'exécution de la décision de transfert de la requérante vers la Suède a été interrompu par la saisine du tribunal administratif de Nantes. Ce délai a recommencé à courir à compter de la notification à l'administration, 15 février 2022, du jugement attaqué. Il ressort des pièces du dossier que ce délai n'a pas fait l'objet d'une prolongation et que cet arrêté n'a pas non plus reçu exécution pendant sa période de validité. Par suite, l'arrêté en cause est caduc à la date du présent arrêt. La France est donc devenue responsable de la demande d'asile de l'intéressé, sur le fondement des dispositions du 2 de l'article 29 du règlement n° 604-2013 du 26 juin 2013. Le litige ayant perdu son objet, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. C... tendant à l'annulation du jugement du 15 février 2022 en tant qu'il a rejeté ses conclusions en annulation de l'arrêté de transfert du 24 janvier 2022.

5. L'arrêté portant assignation à résidence de l'intéressée ayant été exécuté, il y a lieu de statuer sur les conclusions tendant à son annulation, présentées par M. C....

Sur le bien-fondé du jugement attaqué en tant qu'il concerne l'arrêté portant assignation à résidence :

6. M. C... soulève, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision préfectorale du 24 février 2022 décidant son transfert aux autorités suédoises.

7. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée est suffisamment motivée en droit et en fait. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait.

8. En deuxième lieu, le préfet a procédé à un examen particulier de la situation du requérant avant de prendre sa décision.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 visé ci-dessus : " Droit à l'information /1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment: /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable (...); /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 (...) ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert;/e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune (...). Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les Etats membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux Etats membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. / 3. Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. ".

10. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, en temps utile pour lui permettre de faire valoir ses observations, c'est-à-dire au plus tard lors de l'entretien prévu par les dispositions de l'article 5 du même règlement, entretien qui doit notamment permettre de s'assurer qu'il a compris correctement ces informations, l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature de ces informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 citées au point précédent constitue pour le demandeur d'asile une garantie.

11. Au cas d'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. C... s'est vu remettre, le 20 décembre 2021, soit le jour de sa présentation au guichet unique des demandeurs d'asile et de la tenue de l'entretien individuel de détermination de l'Etat membre responsable de sa demande d'asile, l'ensemble des informations requises à travers le guide du demandeur d'asile ainsi que la brochure A intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - Quel pays sera responsable de ma demande ' " et la brochure B intitulée : " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' ", conformes aux modèles figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 et qui contiennent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions précitées. Ces documents, dont M. C... a signé les pages de garde, lui ont été remis dans leur intégralité en langue arabe qu'il a déclaré comprendre. Il a d'ailleurs été assisté lors de cet entretien d'un interprète en cette même langue. Il a certifié sur l'honneur à l'issue de cet entretien que ces informations lui ont été remises. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du droit à l'information du demandeur d'asile énoncé à l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 doit être écarté.

12. En quatrième, aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'Etat membre responsable, l'Etat membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. / (...) 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'Etat membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. (...) ".

13. Il ressort des mentions figurant sur le compte-rendu signé par M. C... qu'il a bénéficié de l'entretien individuel mentionné par les dispositions précitées, en langue arabe comprise par lui, par l'intermédiaire d'un interprète agréé, le 20 décembre 2021, à la préfecture de Maine-et-Loire. Le compte-rendu de cet entretien a été signé et conduit par une secrétaire administrative dénommée, qui doit être regardée comme ayant la qualité, au sens de l'article 5 précité de ce règlement, de " personne qualifiée en vertu du droit national " pour mener l'entretien prévu à cet article. La teneur de ce résumé, qui fait état d'informations appropriées et pertinentes sur la situation personnelle et administrative du requérant à l'effet de permettre à l'autorité compétente de statuer sur cette situation, établit que cette agente était qualifiée et formée à cet effet. A ce titre, l'intéressé a été mis à même de faire état de toutes informations se rapportant à sa situation, notamment sur d'éventuels éléments de vulnérabilité. Par ailleurs, il ressort du compte-rendu produit que M. C... en a disposé et a pu en prendre connaissance dès lors qu'il l'a lui-même signé. Enfin, il ne ressort d'aucune pièce du dossier et il n'est pas établi par le requérant que son entretien n'aurait pas été soumis aux exigences de confidentialité prévues par les dispositions de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

14. En cinquième lieu, aux termes du 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " (...) Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'Etat membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet Etat membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entrainent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'Etat membre procédant à la détermination de l'Etat membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre Etat membre peut être désigné comme responsable ". Ces dispositions doivent être appliquées dans le respect des droits garantis par la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

15. Par ailleurs, eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne, lorsque la demande de protection internationale a été introduite dans un Etat autre que la France, que cet Etat a accepté de prendre ou de reprendre en charge le demandeur et en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les craintes dont le demandeur fait état quant au défaut de protection dans cet Etat membre doivent en principe être présumées non fondées, sauf à ce que l'intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire. La seule circonstance qu'à la suite du rejet de sa demande de protection par cet Etat membre l'intéressé serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet Etat de ses obligations.

16. M. C... soutient que les autorités suédoises ont pour habitude de refuser d'enregistrer et d'instruire les demandes d'asile et qu'il fera nécessairement l'objet d'une obligation de quitter le territoire suédois vers l'Irak où il encourt des risques de traitements inhumains et dégradants. Toutefois, la décision de transfert de l'intéressé aux autorités suédoises ne constitue pas une mesure d'éloignement vers l'Irak. Ensuite, aucun élément produit au débat ne permet de tenir pour établi que sa demande d'asile serait exposée à un risque sérieux de ne pas être traitée par les autorités suédoises dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile, alors que la Suède est un Etat membre de l'Union européenne, partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Faute d'établir ainsi qu'il serait exposé au risque de subir en Suède des traitements contraires aux dispositions des articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ainsi que de l'article 3 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

17. En sixième lieu aux termes de l'article 17 du même règlement : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. (...)". La faculté laissée aux autorités françaises, par les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013, de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le règlement précité, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

18. M. C... indique souffrir d'hypertension et d'un diabète de type 2 ainsi que, sans qu'il s'en soit prévalu lors de son entretien devant les services préfectoraux, d'hidradénite suppurée, dont il souffrirait depuis 2019. S'il se prévaut de l'impossibilité de prise en charge de ces pathologies en cas de retour en Suède en raison de la fin de la prise en charge de ses conditions matérielles d'accueil suite au rejet de sa demande d'asile dans cet Etat, il ressort du courrier du médecin produit pour en justifier, au demeurant rédigé en anglais et non traduit, que des soins de santé d'urgence, des soins dentaires et des soins de santé qui ne peuvent pas attendre pourraient être pris en charge. Ce courrier se prononce précisément sur la prise en charge de l'hidradénite suppurative dont il est atteint et indique que cette pathologie ne relève pas de ce type de soins. Toutefois, le requérant a indiqué à l'audience ne pas prendre de médicaments à ce titre, le courrier précisant d'ailleurs que la perte de poids et l'arrêt du tabac sont recommandés pour y mettre un terme. Il n'établit pas, par suite, qu'il ne pourrait bénéficier de l'accès aux médicaments nécessaires à la prise en charge de son diabète et de son hypertension en Suède. Enfin, en application de l'article 32 du règlement du 26 juin 2013, les autorités françaises, dans le cadre du transfert, seront tenues de transmettre aux autorités suédoises toutes informations relatives aux besoins du requérant en la matière. Il s'ensuit que, quand bien même il parvient à se procurer ses médicaments en France depuis la fin du mois de décembre 2021, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article 17 du règlement du 26 juin 2013.

19. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision qui oblige M. C... à une présentation hebdomadaire à la permanence du commissariat central d'Angers serait disproportionnée au regard des buts poursuivis ou entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, alors qu'il ne ressort pas des pièces que le préfet s'est abstenu d'examiner la situation personnelle de l'intéressé.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 janvier 2022 portant assignation à résidence.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

21. Si, compte tenu de la caducité de la décision de transfert attaquée, la France est l'Etat membre responsable de l'examen de la demande d'asile présentée par M. C..., le présent arrêt n'implique, par lui-même, aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

22. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. C... présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins d'annulation en tant qu'elles se rapportent à l'arrêté de transfert du 24 janvier 2022 du préfet de Maine-et-Loire.

Article 2 : Le surplus de la requête de M. C... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Une copie en sera adressée pour information au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 9 décembre 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. Giraud, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 décembre 2022.

Le rapporteur,

T. B...

Le président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT00598


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00598
Date de la décision : 23/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Thomas GIRAUD
Rapporteur public ?: Mme MALINGUE
Avocat(s) : KADDOURI

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-12-23;22nt00598 ?
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