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15/11/2022 | FRANCE | N°21NT03530

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 6ème chambre, 15 novembre 2022, 21NT03530


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 21 octobre 2020 par laquelle le préfet du Calvados a refusé d'abroger l'arrêté d'expulsion pris à son encontre le 8 août 2019.

Par un jugement n° 2002581 du 22 octobre 2021 le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 décembre 2021, M. A... représenté par Me Boezec, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22

octobre 2021 ;

2°) d'annuler la décision du 21 octobre 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Calvados d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 21 octobre 2020 par laquelle le préfet du Calvados a refusé d'abroger l'arrêté d'expulsion pris à son encontre le 8 août 2019.

Par un jugement n° 2002581 du 22 octobre 2021 le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 décembre 2021, M. A... représenté par Me Boezec, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 octobre 2021 ;

2°) d'annuler la décision du 21 octobre 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les dispositions de l'article L. 524-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction applicable aux fait de l'espèce ont été méconnues ;

- l'arrêté est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il ne représente plus une menace actuelle à l'ordre public ;

- il travaille régulièrement comme il le justifie.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 mars 2022 le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun moyen dirigé contre la décision attaquée n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de Mme D...,

- et les observations de Me Beaudoin, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., de nationalité tunisienne, a fait l'objet le 8 août 2019 d'un arrêté d'expulsion pris par le préfet du Calvados. Le 17 septembre 2020, le préfet du Calvados a pris un arrêté l'assignant à résidence. Le 1er octobre 2020, M. A... a demandé au préfet du Calvados d'abroger l'arrêté d'expulsion. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet du Calvados du 21 octobre 2020 par laquelle celui-ci a refusé d'abroger son arrêté d'expulsion.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Lorsque le ressortissant étranger réside en France et ne peut invoquer le bénéfice des exceptions définies par l'article L. 524-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité préfectorale est en situation de compétence liée pour rejeter la demande d'abrogation présentée. Toutefois, le requérant peut utilement invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Si M. A... a commis de nombreuses infractions de nature délictuelle pour lesquelles il a été incarcéré jusqu'au 5 décembre 2015, il ressort des pièces du dossier que celles-ci sont anciennes, la dernière datant de 2013. Il ressort également des pièces du dossier que M. A... est entré en France en 1998 et y a séjourné, de manière continue à partir de 2002 sous couvert d'une carte de résident en qualité de conjoint de français puis d'un titre de séjour. Il est le père d'un enfant français. Il produit également de nombreuses pièces, des devis, des factures, des contrats de sous-traitance, des attestations variées de clients justifiant des travaux accomplis chez eux, qui établissent sa bonne insertion professionnelle en qualité de plâtrier depuis 2016. Dans ces conditions, eu égard à l'ancienneté des infractions en cause laquelle ne permet pas d'établir que M. A... présenterait un risque actuel de trouble à l'ordre public et aux circonstances évoquées précédemment sur sa vie privée en France, le préfet du Calvados a porté une atteinte disproportionnée au droit garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en refusant d'abroger l'arrêté contesté.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction, sous astreinte :

5. Les motifs développés au point 3 du présent arrêt impliquent qu' il soit enjoint au préfet du Calvados d'abroger l'arrêté d'expulsion du 8 août 2019.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement 2002581 du 22 octobre 2021 du tribunal administratif de Caen ainsi que la décision du 21 octobre 2020 par laquelle le préfet du Calvados a refusé d'abroger l'arrêté d'expulsion pris à son encontre le 8 août 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Calvados d'abroger l'arrêté d'expulsion du 8 août 2019.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Une copie en sera adressée pour information au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 21 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. Giraud, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 novembre 2022.

Le rapporteur,

T. C...

Le président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21NT03530


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT03530
Date de la décision : 15/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Thomas GIRAUD
Rapporteur public ?: Mme MALINGUE
Avocat(s) : SELARL BOEZEC CARON BOUCHE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-11-15;21nt03530 ?
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