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15/10/2021 | FRANCE | N°20NT01704

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 15 octobre 2021, 20NT01704


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 13 décembre 2017 par laquelle le directeur de l'établissement public de santé mentale de Saint-Avé a refusé de reconnaître comme imputable au service la pathologie à l'origine de ses arrêts de travail et soins à compter du 24 avril 2016.

Par un jugement n° 1800592 du 4 juin 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le

22 juin 2020, Mme G... C..., représentée par Me Matel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... C... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 13 décembre 2017 par laquelle le directeur de l'établissement public de santé mentale de Saint-Avé a refusé de reconnaître comme imputable au service la pathologie à l'origine de ses arrêts de travail et soins à compter du 24 avril 2016.

Par un jugement n° 1800592 du 4 juin 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 juin 2020, Mme G... C..., représentée par Me Matel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 4 juin 2020 ;

2°) d'annuler la décision du directeur de l'établissement public de santé mentale (EPSM) de Saint-Avé du 13 décembre 2017 ;

3°) de mettre à la charge de l'EPSM de Saint-Avé la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- ainsi qu'il résulte de l'avis de la commission de réforme du 27 avril 2017 et des certificats médicaux établis par le docteurs E..., Sourdaine et D..., c'est à tort que sa pathologie caractérisée par un syndrome anxiodépressif réactionnel n'a pas été reconnue comme maladie professionnelle dès lors qu'elle est directement et exclusivement imputable au service ;

- à supposer même que des évènements extérieurs soient susceptibles d'expliquer, en tout ou partie, son état de santé, une telle circonstance n'est pas de nature à rompre le lien de causalité entre sa pathologie et le service.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juin 2020, l'EPSM de Saint-Avé, représenté par la SELARL Valadou-Josselin et associés, conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme C... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- l'ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. L'hirondel,

- et les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. Mme G... C..., qui est née le 10 août 1960, a été recrutée en 1991 par l'établissement public de santé mentale (EPSM) de Saint-Avé en qualité d'agent de service intérieur et a exercé, à compter du 1er juin 1999, les fonctions de secrétaire médicale au centre médico-psychologique de Ploërmel. Elle a été placée en arrêt de travail à compter du 22 avril 2016 jusqu'au 6 mai 2016 pour une anxiété généralisée réactionnelle. Le 23 avril 2016, elle a demandé au directeur de l'établissement public de reconnaître la pathologie dont elle souffre comme maladie professionnelle. Par un arrêté du 13 décembre 2017, le directeur de cet établissement a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cette affection. Par un jugement du 4 juin 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision. Mme C... relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...). / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales ".

3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

4. Mme C... produit plusieurs courriers et attestations émanant du docteur E..., psychiatre, en charge de son suivi depuis septembre 2016 ainsi que le rapport du docteur D... du 6 mars 2017, également psychiatre, qui se prononcent en faveur d'une imputabilité au service de cette pathologie ainsi que l'avis favorable rendu le 27 avril 2017 par la commission de réforme sur cette imputabilité à la suite du rapport effectué sur sa demande par ce dernier médecin. Toutefois, deux autres experts, également psychiatres, ont conclu en l'absence d'imputabilité au service de la pathologie dont souffre Mme C... : le docteur B... dans son rapport effectué à la suite de la demande de reconnaissance de maladie professionnelle exprimée par Mme C... et le docteur F..., dans son rapport du 30 novembre 2017, établi à la demande du directeur de l'EPSM de Saint-Avé compte tenu de la contrariété des conclusions exprimées par les deux experts précédents.

5. Il ressort des pièces du dossier, en particulier du courrier de Mme C... du 15 juin 2016 adressée à son employeur et de son courriel du 11 avril 2016 sollicitant un

rendez-vous auprès du médecin du travail, que pour expliquer les motifs de sa pathologie ayant conduit au congé de maladie du 22 avril 2016, la requérante s'est plainte d'un dysfonctionnement d'encadrement infirmier au sein de son service, qui s'est accru lors de la dernière année, résultant d'une " mouvance " de ces infirmiers, du peu de fiabilité de leurs plannings dont elle était tributaire pour son travail et d'un manque de communication général, ce qui a engendré son incrédibilité auprès de différents interlocuteurs, entrainant notamment pour elle du stress et des troubles du sommeil. Elle s'est également plainte de n'avoir été invitée à aucune réunion informelle lors de l'installation de l'infirmier d'accueil et d'orientation (IAO) afin de définir son rôle dans la nouvelle organisation mise en place, en particulier s'agissant de l'articulation entre son bureau et le secrétariat, l'organisation qui a été convenue n'ayant été au demeurant pas respectée. Elle critiquait, enfin, le fait qu'il ait été décidé, malgré sa proposition de créer un agenda commun et visible de tous, de continuer avec l'agenda papier commun au secrétariat, lequel est complexe à établir et crée des perturbations dans le service. Selon elle, elle ne disposait plus, dans ces conditions, malgré sa volonté de s'adapter à l'évolution de l'EPSM ainsi qu'aux différentes équipes, des moyens d'effectuer efficacement son travail. Selon les différents rapports médicaux produits à l'instance et qui sont tous concordants sur ce point,

Mme C... n'a souffert avant ces évènements d'aucun antécédent psychiatrique personnel ou familial. L'évolution des conditions de travail ainsi décrite par l'intéressée ne sont pas sérieusement contestée par l'EPSM de Saint-Avé.

6. Toutefois, Mme C... exerçait les fonctions de secrétaire médicale qui consistent en l'accueil et au renseignement des patients, en la planification des activités (agenda des consultations, admissions, convocations, etc.) et en la gestion, la saisie et le classement des informations relatives aux dossiers des patients. Il ressort du courriel du Dr A... du 24 juin 2016 que la pathologie dont souffre Mme C... résulte de la frustration que cette dernière a ressentie depuis la création du poste d'IAO, l'intéressée se sentant dépossédée du rôle polyvalent qu'elle s'était attribuée et acceptant mal de se recentrer sur les fonctions de secrétaire médicale alors qu'elle se plaignait d'une surcharge de travail. En outre, l'organisation infirmière, qui ne la concerne pas directement et qui a été mise en place dans un contexte de transition, n'a fait l'objet d'aucune plainte de la part des principaux intéressés. Le rapport du Dr B... présente l'intéressée comme un " sujet hyper consciencieux, très soucieux du travail accompli, avec une volonté de maîtrise ". Selon cet expert, elle a pu alors se sentir spoliée, voire dépossédée de certaines de ses fonctions et se trouver en difficulté d'adaptation dans la nouvelle organisation du service, projetant la responsabilité sur ses supérieurs hiérarchiques. De même, dans son rapport du 30 novembre 2017, le Dr F... précise que la personnalité décrite dans les expertises des docteurs B... et D... " se croise et se ressemble. Là où tout lui réussissait dans une organisation personnelle et rationnelle, elle ne s'y retrouve plus, toute la mobilité psychique est disparue. ". Il suit de là, alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la nouvelle organisation mise en place dans le service dans lequel Mme C... travaillait présentait un caractère pathogène, que le développement de la maladie est dû à un fait personnel de l'agent conduisant, de ce fait, à détacher sa survenance du service. Enfin, si Mme C... a également évoqué devant les experts, le comportement " tyrannique " et le management inapproprié d'un cadre de santé, à l'origine d'un sentiment de pression et de dévalorisation, ces seules allégations, qui sont contestées par l'EPSM de Saint-Avé, ne permettent pas de tenir pour établie la situation qu'elle décrit. Par suite, le directeur de l'EPSM de Saint-Avé n'a pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce en refusant, par la décision contestée du 13 décembre 2017, de faire droit à la demande de Mme C... de reconnaître sa pathologie anxio dépressive comme imputable au service.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de Mme C... la somme que l'établissement public de santé mentale (EPSM) de Saint-Avé demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Les dispositions du même article font par ailleurs obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par Mme C... soit mise à la charge de l'EPSM de Saint-Avé, qui n'est pas la partie perdante à l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'établissement public de santé mentale de

Saint-Avé au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... C... et à l'établissement public de santé mentale de Saint-Avé.

Délibéré après l'audience du 30 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Salvi, président,

- Mme Brisson, présidente-assesseure,

- M. L'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 octobre 2021.

Le rapporteur

M. L'hirondel

Le président

D. Salvi

Le greffier

R. Mageau

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20NT01704


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT01704
Date de la décision : 15/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALVI
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: M. BERTHON
Avocat(s) : SELARL VALADOU JOSSELIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-10-15;20nt01704 ?
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