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22/07/2021 | FRANCE | N°21NT01665

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, Juge des référés, 22 juillet 2021, 21NT01665


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision en date du 12 novembre 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision prise le 20 juillet 2020 par les autorités consulaires françaises à Conakry (Guinée) refusant de délivrer à Mme C... B... et aux jeunes Moussa A... et Aissatou A... des visas de long séjour en qualité de membres de famille de réfugié a

insi que cette décision de refus consulaire.

Par un jugement n° 2012948 du 14...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision en date du 12 novembre 2020 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre la décision prise le 20 juillet 2020 par les autorités consulaires françaises à Conakry (Guinée) refusant de délivrer à Mme C... B... et aux jeunes Moussa A... et Aissatou A... des visas de long séjour en qualité de membres de famille de réfugié ainsi que cette décision de refus consulaire.

Par un jugement n° 2012948 du 14 juin 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visas d'entrée en France du 12 novembre 2020 et enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme C... B... et aux jeunes Moussa A... et Aissatou A... des visas de long séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 juin 2021, le ministre de l'intérieur demande à la cour de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 juin 2021.

Il soutient que :

- la mère et les deux enfants seraient tous nés le 1er janvier ;

- l'âge du père mentionné sur ces actes de naissance est faux ;

- le prénom et le domicile du déclarant ne sont pas mentionnés ;

- M. A... n'étant pas âgé de 21 ans, il ne pouvait être déclarant ;

- il n'est pas fait mention de la lecture des actes ;

- la mention de l'âge de la mère est incohérente ;

- les actes ne sont pas écrits réglementairement ;

- les actes n'ont pas été légalisés ;

- le tampon est un faux grossier ;

- les autorités locales n'ont pas répondu à la demande de levée d'actes ;

- le prénom de la mère est erroné ;

- il en résulte que ces actes de naissance, qui présentent les mêmes irrégularités alors qu'ils ont été dressés à 4 ans d'intervalle, sont inauthentiques ;

- le jugement supplétif de Mme B... est incomplet ;

- il a été prononcé sur une requête déposée la veille par un tiers sans qualité pour agir ;

- le lieu de naissance est imprécis ;

- le jugement ne peut légalement ordonner l'inscription de l'acte de naissance dans un registre clos ;

- un des deux témoins serait le requérant ;

- le tampon sur l'acte de naissance est un faux ;

- il en résulte que ce jugement supplétif n'a aucune valeur probante ;

- il n'y a aucune preuve d'un mariage ou d'un lien de concubinage entre Mme B... et M. A... ;

- la possession d'état n'est pas établie ;

- il n'y a pas méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2021, M. E... A... et Mme C... B..., représentés par Me D..., concluent au rejet de la requête.

Ils soutiennent que :

- les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur ne sont pas fondés.

M. E... A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale en première instance par une décision du 29 décembre 2020.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la requête n° 21NT01664, enregistrée au greffe de la cour le 22 juin 2021, par laquelle le ministre de l'intérieur a demandé l'annulation du même jugement.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. F... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1.M. A... a demandé le 24 juin 2021 le maintien en appel de l'aide juridictionnelle. Compte tenu de la nature du recours, il y a lieu de se prononcer sur cette demande à titre provisoire en application des dispositions de l'article 20 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique aux termes desquelles : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président. " et de l'article 61 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 qui dispose " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence (...) L'admission provisoire est accordée par le président du bureau ou de la section ou le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle ou d'aide à l'intervention de l'avocat sur laquelle il n'a pas encore été statué. " En l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions précitées et d'admettre provisoirement M. E... A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

2. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ". Aux termes de l'article R. 222-25 du même code : " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. / Par dérogation à l'alinéa précédent, le président de la cour ou le président de chambre statue en audience publique sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17. ".

3. M. E... A..., ressortissant guinéen, né le 15 février 1991, s'est vu reconnaître le bénéfice de la protection subsidiaire. Par une décision en date du 20 juillet 2020, les autorités consulaires françaises à Conakry (Guinée) ont rejeté les demandes de visas de long séjour présentées par Mme C... B... et les jeunes Moussa A... et Aissatou A..., se présentant comme l'épouse et les enfants allégués de M. A..., en qualité de membres de famille de bénéficiaire de la protection subsidiaire. Par une décision du 12 novembre 2020, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé le 17 septembre 2020 contre cette décision de refus consulaire. Par un jugement n° 2012948 du 14 juin 2021, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visas d'entrée en France du 12 novembre 2020 et enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à Mme C... B... et aux jeunes Moussa A... et Aissatou A... des visas de long séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

4. D'une part, aux termes de l'article L. 752-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors applicable : " I. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / 1° Par son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par une union civile, âgé d'au moins dix-huit ans, si le mariage ou l'union civile est antérieur à la date d'introduction de sa demande d'asile ; 2° Par son concubin, âgé d'au moins dix-huit ans, avec lequel il avait, avant la date d'introduction de sa demande d'asile, une vie commune suffisamment stable et continue ; / 3° Par les enfants non mariés du couple, âgés au plus de dix-neuf ans. / (...) L'âge des enfants est apprécié à la date à laquelle la demande de réunification familiale a été introduite (...) / II. - Les articles L. 411-2 à L. 411-4 et le premier alinéa de l'article L. 411-7 sont applicables. / La réunification familiale n'est pas soumise à des conditions de durée préalable de séjour régulier, de ressources ou de logement. / Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. / Pour l'application du troisième alinéa du présent II, ils produisent les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 721-3 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire. Les documents établis par l'office font foi jusqu'à inscription de faux. (...) ".

5. D'autre part, aux termes de l'article L. 111-6 du même code, alors applicable : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ", ce dernier article disposant que " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

6. Les moyens énoncés dans la requête, tirés de ce que les actes de naissance des enfants, qui présentent les mêmes irrégularités alors qu'ils ont été dressés à 4 ans d'intervalle, sont inauthentiques, qu'il n'y a aucune preuve d'un mariage ou d'un lien de concubinage entre Mme B... et M. A... et que la possession d'état n'est pas établie, paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement.

7. En conséquence, il y a lieu de faire droit à la requête du ministre de l'intérieur tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 juin 2021.

DÉCIDE :

Article 1er : M. E... A... est admis, à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Jusqu'à ce qu'il ait été statué sur le fond de l'instance n° 21NT01664, il sera sursis à l'exécution du jugement du 14 juin 2021 du tribunal administratif de Nantes.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. E... A... et à Mme C... B....

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juillet 2021.

Le président-rapporteur,

T. F...La greffière,

C. POPSE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 21NT01665


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 21NT01665
Date de la décision : 22/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Thibaut CELERIER
Avocat(s) : SCP SEGUIN ET KONRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2021-07-22;21nt01665 ?
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