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02/07/2020 | FRANCE | N°18NT03174

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 02 juillet 2020, 18NT03174


Vu, sous le n°18NT03174, la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de l'année 2009.

Par une ordonnance n° 1702996 du 20 juin 2018, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 17 août 2018, 23 janvier 2019, 5 avril

2019, 2 mai 2019, 14 mai 2019 et 17 mai 2019, M. B... C..., représenté par Me E..., demande à la cou...

Vu, sous le n°18NT03174, la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de l'année 2009.

Par une ordonnance n° 1702996 du 20 juin 2018, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 17 août 2018, 23 janvier 2019, 5 avril 2019, 2 mai 2019, 14 mai 2019 et 17 mai 2019, M. B... C..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de prononcer cette décharge, en droits et pénalités, à hauteur de 47 116 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'a pas pu produire les justificatifs de sa contestation devant le tribunal administratif mais apporte désormais les précisions suffisantes au soutien de sa contestation ;

- il ressort des pièces comptables produites, et notamment des comptes annuels de l'exercice 2009 que son bénéfice imposable était de 29 994 euros et non de 119 595 euros comme l'a retenu le vérificateur ; ces pièces permettent de démontrer le caractère exagéré des impositions en litige ;

- l'administration a accepté, pour l'année 2010, de tenir compte des pièces comptables produites postérieurement aux opérations de contrôle ;

- en conséquence, l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2009 s'élève à 5 673 euros, et non 44 383 euros ; il est ainsi fondé à contester les rectifications litigieuses à hauteur des sommes de 38 620 euros en droits et 8 496 euros en pénalités.

Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 mars 2019 et 11 février 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

II. Vu, sous le n°18NT03176, la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010.

Par une ordonnance n° 1702943 du 20 juin 2018, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 17 août 2018, 5 avril 2019, 2 mai 2019, 15 mai 2019 et 17 mai 2019, M. B... C..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de prononcer cette décharge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'a pas pu produire les justificatifs de sa contestation devant le tribunal administratif mais apporte désormais les précisions suffisantes au soutien de sa contestation ;

- il ressort des pièces comptables produites, et notamment des comptes annuels de l'exercice 2009 qu'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 6 861,45 euros a été comptabilisé au titre de cette période ; il ressort également des pièces comptables relatives à l'exercice 2010 qu'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée a été comptabilisé au titre de cette période ; il est par conséquent fondé à demander que soit prononcée la décharge, en droits et pénalités, de l'intégralité des impositions en litige.

Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 mars 2019 et 11 février 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public,

- et les observations de Me D..., représentant M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... exerce une activité d'exploitant agricole. Les revenus de cette activité sont soumis à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices agricoles. Cette activité est également assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée. En 2004, l'entreprise de M. C... a été placée en liquidation juridiciaire. Par un jugement du 21 octobre 2010, le tribunal de grande instance de Chartres a prononcé la clôture de cette liquidation judiciaire pour extinction de passif. Dans le cadre d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, l'administration a constaté que M. C... avait omis de déposer ses déclarations de résultats professionnels et d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2009. Elle a également constaté que M. C... n'avait pas déposé ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2009 et 2010. A l'issue de ce contrôle, le service a alors déterminé son bénéfice agricole au titre de l'année 2009 et a rectifié en conséquence son impôt sur le revenu selon la procédure contradictoire prévue aux articles L. 55 et suivants du livre des procédures fiscales. Dans le même temps, l'administration a procédé à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2009 et 2010, selon la procédure de taxation d'office prévue aux articles L. 65 et L.66 du livre des procédures fiscales. Après mise en recouvrement et rejet de ses réclamations, M. C... a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions. Par une ordonnance n° 1702996 du 20 juin 2018, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Orléans a rejeté, sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative sa demande en matière d'impôt sur le revenu. Par une ordonnance n° 1702943 du même jour, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Orléans a rejeté, sur le même fondement, sa demande en matière de taxe sur la valeur ajoutée. M. C... relève appel de ces deux ordonnances.

Sur la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu :

2. Aux termes de l'article 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. / Elle incombe également au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu, comme en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69. ".

3. M. C... n'ayant pas présenté de pièces comptables lors du contrôle, la charge de la preuve lui incombe, en application du troisième alinéa de l'article 192 du livre des procédures fiscales cité au point 2. Pour démontrer le caractère exagéré des impositions en litige, M. C... produit, pour la première fois en appel, les comptes annuels de l'exercice 2009 établis par un cabinet d'expertise comptable. M. C... produit en outre les liasses fiscales correspondantes, un extrait des grands-livres des comptes généraux retraçant l'intégralité des opérations de l'exercice 2009 ainsi que l'ensemble des factures et pièces justificatives correspondantes. Si l'administration oppose le fait que ces documents comptables ont été établis postérieurement aux opérations de contrôle, cette seule circonstance ne saurait priver ces pièces de tout caractère probant. Par ailleurs, il ressort des pièces versées aux débats que M. C... n'a pas déposé ses déclarations fiscales pour l'année 2009 en raison du fait qu'il pensait que cette formalité incombait au mandataire liquidateur. Ainsi, eu égard au caractère complet des documents comptables produits, du fait qu'ils sont assortis des pièces justificatives, M. C... doit être regardé, dans les circonstances très particulières de l'espèce et compte tenu de l'absence de toute critique de ces documents de la part de l'administration, comme apportant la preuve, qui lui incombe, du caractère exagéré des impositions mises à sa charge. En conséquence, il y a lieu de retenir le résultat fiscal mentionné sur les documents comptables et sur les liasses fiscales produites en cause d'appel par M. C..., bien que ces pièces aient été établies postérieurement aux opérations de contrôle. Par suite, M. C... est fondé à soutenir qu'il doit être déchargé, en ce qui concerne la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2009, à hauteur de la somme de 47 116 euros correspondant à une décharge de 38 620 euros en droits et 8 496 euros en pénalités.

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

4. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ". Aux termes de l'article R. 193-1 du même livre : " Dans le cas prévu à l'article L. 193 le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré. ".

5. Les montants des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2009 et 2010 ont été calculés par le service sur la base du chiffre d'affaires reconstitué de ces mêmes années. Pour démontrer le caractère exagéré de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée, M. C... a produit, ainsi qu'il a été rappelé au point 3, l'ensemble des pièces comptables relatives à l'année 2009. En outre, M. C... produit les documents comptables relatifs à l'année 2010 ainsi que les liasses fiscales correspondantes. Ainsi qu'il a été également rappelé au point 3, la seule circonstance que ces documents ont été établis postérieurement aux opérations de contrôle ne saurait les priver de tout caractère probant. Par suite, M. C... apporte la preuve, qui lui incombe, du caractère exagéré des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige. Les pièces comptables produites faisant apparaître, pour les années 2009 et 2010, un crédit de taxe sur la valeur ajoutée, M. C... est fondé à solliciter la décharge totale de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance n° 1702996 du 20 juin 2018, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Orléans a refusé de prononcer la réduction, en droits et pénalités, à hauteur de 47 116 euros, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de l'année 2009. M. C... est également fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance n° 1702943 du 20 juin 2018, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des années 2009 et 2010.

Sur les frais liés au litige :

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. C... une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Les ordonnances n° 1702996 du 20 juin 2018 et n° 1702943 du 20 juin 2018 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif d'Orléans sont annulées.

Article 2 : M. C... est déchargé, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2009, à hauteur de 47 116 euros.

Article 3 : M. C... est déchargé, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- M. Geffray, président assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Lu en audience publique le 2 juillet 2020.

Le rapporteur,

H. A...Le président,

F. Bataille

Le greffier,

C. Popse

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 18NT03174 - 18NT031762


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18NT03174
Date de la décision : 02/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Harold BRASNU
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : SELARL LEHUEDE GUENNO-LE-PARC ; SELARL LEHUEDE GUENNO-LE-PARC ; SELARL LEHUEDE GUENNO-LE-PARC

Origine de la décision
Date de l'import : 08/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2020-07-02;18nt03174 ?
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